Smartphones et téléphones mobiles omniprésents en Afrique constituent des outils de choix pour améliorer la prévention des maladies chroniques, le suivi et l’accès aux soins.
Enfermer pendant quatre jours et quatre nuits une centaine d’étudiants venus des différentes universités et écoles supérieures ivoiriennes, mettre à leur disposition les meilleurs ordinateurs et leur demander de développer des solutions innovantes à des problématiques sociétales : voici le programme du Hackathon organisé à l’été 2018 par la Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE). Parmi les projets développés, plusieurs concernaient la santé, un enjeu majeur pour les jeunes Ivoiriens. Partie du constat que le nombre d’hématologues est très restreint en Côte d’Ivoire, une équipe a développé un système couplant smartphone et intelligence artificielle. Le comptage des cellules dans un frottis sanguin peut ainsi être automatisé, et faire gagner un temps précieux pour accélérer le diagnostic des patients.
Les expérimentations de ce genre se multiplient sur le continent où la téléphonie mobile est reine et les smartphones de plus en plus présents. 660 millions d’Africains en posséderont un en 2020, selon une étude récente du cabinet Deloitte, de quoi faire du téléphone un outil majeur de progrès sanitaire.
Les Nations unies ont, elles, décidé dès 2011 d’unir les forces de deux de leurs agences, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Union internationale des télécommunications (UIT), pour lancer un programme de promotion de la santé utilisant les téléphones portables. « BeHe@lthy Be Mobile est centré sur les maladies non transmissibles et a été imaginé pour passer à l’échelle certains des petits programmes qui se développaient un peu partout à l’époque, rappelle Line Kleinebreil, présidente de l’Université numérique francophone mondiale. Le programme est ouvert à tous les pays, chacun choisit la thématique qu’il souhaite cibler, et rédige un handbook qui doit aider à diffuser la pratique. »
Campagnes par SMS
Parmi les pays africains impliqués, le Sénégal, qui a lancé en 2014 le programme « m-diabète ». « Il fallait faire le plus accessible possible, on a donc choisi les SMS dont la réception ne nécessite qu’un téléphone mobile classique. Or aujourd’hui, chaque foyer africain a au moins un téléphone portable », précise Line Kleinebreil, qui a accompagné le déploiement du programme. Ouvert à tous, patients, proches ou soignants, le programme est structuré en campagnes étalées sur plusieurs semaines avec le plus souvent l’envoi d’un SMS par jour. La période du ramadan est un moment-clé pour les patients diabétiques et l’adhésion de la population est particulièrement forte à cette occasion.
Pour compléter ces courts messages, un site Web propose également différents types de ressources. Une étude, publiée en 2018 dans le British Medical Journal, a démontré l’impact positif du programme sur le contrôle de la glycémie des patients, significativement plus basse dans le groupe ayant reçu les SMS. Les auteurs soulignent l’intérêt de ce type d’approche pour améliorer l’accès à l’éducation thérapeutique, particulièrement dans les pays à revenus faibles et intermédiaires, puisque le coût d’une campagne ne dépasserait pas les 2,50 euros par patient.
Le Monde