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Développement socio-économique du Mali, bonne gouvernance, salaires des fonctionnaires, lutte contre la pauvreté et la corruption… Les propositions du Dr Hamed Sow !

Le 22 juin passé, nous avons publié la 1ère partie de la longue interview que le Dr. Hamed Sow nous a accordée après plus de 4 années de silence.  Cette partie portait sur les questions politiques et sécuritaires. Dans ce numéro de votre hebdomadaire nous visiterons avec celui que ” d’aucuns qualifient de meilleur économiste malien “, la situation et les perspectives de notre pays.

Pour rappel et pour ceux qui n’ont pas lu notre précédente livraison, Hamed Sow fait partie des rares leaders qui font l’unanimité au Mali sur leur compétence. Nanti d’un diplôme de l’Institut National des Sciences et Techniques Nucléaires (INSTN) de Saclay (France) et d’un Doctorat en Économie de la Production de la célèbre Université de Paris IX – Dauphine, Dr. Hamed Sow a connu une riche carrière professionnelle. D’abord au niveau international pour avoir fait ses débuts dans de grands cabinets de conseil en France. Ensuite, il fut expert détaché auprès de la Commission européenne à Bruxelles et assistant technique principal du ” Projet Énergie II ” de la Banque Mondiale au Niger. Il finira sa carrière internationale comme directeur général du CDE à Bruxelles, une institution commune du Groupe des 77 pays ACP et des 25 membres de l’UE. Rentré au Mali, il fut ministre des Mines, de l’énergie et de l’eau. A sa sortie du Gouvernement, il devint aussitôt Pdg du Groupe Arama/Amic-Invest, une société d’intermédiation financière, basée à Dubaï. En mai 2011, Dr. Hamed Sow fut nommé conseiller spécial du président de la République du Mali, en charge du suivi des grands chantiers de l’Etat et cela jusqu’au coup d’état de mars 2012.

Il convient de rappeler également que le Dr. Hamed Sow est l’auteur du Pdes, le projet de société du président ATT pour sa réélection en 2007. Et pour bon nombre d’hommes de presse de d’associations de la société civile, le projet de société du Dr. Hamed était de loin le meilleur lors de l’élection présidentielle de 2013.

Récemment, c’est à Lomé que nous avons retrouvé le Dr. Hamed Sow. Au 6ème étage de l’imposant building de la Btci, l’économiste malien dirige une FinTech (Uint Africa), filiale pour toute l’Afrique d’un groupe leader dans la monétique. L’homme n’a rien perdu de sa connaissance poussée des réalités de notre pays. Son interview de la semaine passée a rencontré un succès rarement égalé dans notre journal. Acte II donc dans ce numéro où il est question de la situation et des perspectives socioéconomiques du Mali.

Aujourd’hui-Mali : Monsieur le Ministre, la semaine dernière vous avez parlé de l’échec du président de la République dans le domaine sécuritaire et en matière de gouvernance. Vous avez évoqué la visite “désastreuse” du Premier ministre en mai 2014 à Kidal, suivi de la défaite cuisante infligée à l’armée nationale, des fortes concessions faites par le Gouvernement dans l’Accord d’Alger, de la montée de l’insécurité constante dans le Nord et le Centre du pays, de la découverte de charniers de civils tués par l’armée nationale, de la mauvaise gouvernance, avec son lot de corruption, concussion et de népotisme jamais égalés dans notre pays, de l’instabilité institutionnelle avec 5 changements de 1er ministre et de 7 remaniements ministériels. Vous expliquez tous ces échecs par les mauvais choix des membres du Gouvernement et des dirigeants de la haute administration et des sociétés d’économistes.

Selon vous, tous les postes clés ont été confiés à des parents, des amis et des compagnons du président de la République. Tirant les enseignements de cette déception, vous avez décidé de soutenir Soumaila Cissé pour la prochaine élection présidentielle. Ai-je bien résumé vos propos ?  

Dr. Hamed Sow :  Un résumé est toujours réducteur. Il donne le sentiment de l’alignement d’une série d’affirmations, confortées pas d’autres affirmations. Alors que tous les propos évoqués la semaine dernière étaient étayés de démonstrations incontestables. Une amie commune avec le président de la République m’a appelé le dimanche pour me demander pourquoi j’avais “lâché” mon grand frère. Je lui ai d’abord fait comprendre que pour lâcher quelqu’un encore faudrait-il avoir des liens constants avec lui. J’ai connu IBK avant qu’il ne soit président de la République. C’était un Républicain ayant des convictions gaulliennes sur la grandeur et le respect de notre pays. Je ne reconnais pas cet homme au président actuel que j’ai très rarement vu au cours de son mandat. Ensuite, j’ai demandé à mon interlocutrice de me signaler un seul propos non fondé dans mon interview afin de me permettre de le corriger lors de la présente. Elle a fini par lâcher dans un soupir : “Allah ko tignè : c’est très difficile de défendre IBK”. Dont acte ! Je voudrais revenir sur 2 autres points par rapport à votre résumé.

D’abord, je dois préciser que malgré la reconnaissance par le ministre de la Défense et des Anciens combattants de fosses communes à Nantaka et Kobaka, suite à des exécutions uniquement de peuls par l’armée nationale, et malgré la forte condamnation de toutes les missions diplomatiques dans notre pays, nous n’avons pas enregistré d’actions proactives et coercitives du Gouvernement. Celui-ci s’est contenté de l’ouverture d’une enquête par l’armée. Dans des pays qui se respectent, des responsables auraient été démissionnés pour moins que ça. Cette impunité (momentanée peut-être) a-t-elle encouragé le massacre de plus de 30 peuls (dont des femmes et des enfants, sans aucune défense), probablement par des par des chasseurs dossos, à Koumaga, le 23 juin passé ? Des images insupportables, peut-être manipulatrices, circulent sur les réseaux sociaux. Face à ces dérives, qui hypothèquent dangereusement la paix civile, qui remet en cause la bonne entente entre nos communautés, une Association est en cours de constitution par des patriotes de toutes origines, soutenue par une ONG internationale, ayant pour but de constituer un dossier visant à saisir la Cour pénale internationale. J’ai été touché par un ami pour faire partie de cette Association, mais j’ai décliné la proposition car ne disposant pas d’éléments probants. En plus, je pense que l’intérêt du Mali est plutôt à la recherche de l’apaisement par le dialogue.

Des discussions sont lancées au sein de notre propre formation, le Rtd, pour fusionner avec l’Urd ou conclure une alliance en vue des législatives

Autre point à préciser dans votre résumé : le choix de Soumaïla Cissé.  Ce n’est pas un choix par défaut. Il est basé sur une analyse objective sur les qualités, l’expérience et la compétence de l’homme. Depuis la “révolution de 1991/1992”, Soumaïla Cissé a occupé des hautes fonctions administratives et techniques, notamment secrétaire général de la Présidence, ministre de l’Economie et des Finances, ministre de l’Equipement et de l’Environnement, Commissaire, puis président de la Commission de l’Uemoa. De toutes les candidates et tous les candidats, faisant face au président sortant, il me semble qu’il soit, avec le Dr. Oumar Mariko, les seuls députés, c’est-à-dire ceux qui se sont frottés au suffrage des électeurs. En outre, Soumaïla est le seul à disposer d’un parti politique bien implanté sur le territoire national et bien structuré. Des discussions sont lancées au sein de notre propre formation, le Rtd, pour fusionner avec l’Urd ou conclure une alliance en vue des législatives. Enfin, nous espérons très prochainement que le Cdr de Ras Bath designera Soumaïla comme son candidat à l’élection présidentielle (ndlr : c’est fait hier matin).

Au-delà de tout ça, je me retrouve dans le projet de société du candidat Soumaïla Cissé. Mais avant de passer au projet de société du futur président de la République, je voudrais vous remercier de m’avoir mentionné comme étant parmi les meilleurs économistes maliens. Je préférerais le terme de monteurs de projets, de créateurs d’entreprises, de mobilisateurs de financement… Je suis plus porté sur les réalisations que sur la théorie qui a, cependant, toute son importance pour ériger les stratégies et les conditions propices aux réalisations concrètes. A cet effet, je connais un bien meilleur économiste que moi : c’est le Dr. Habib Ouane, ancien haut responsable de la Cnuced, ancien ministre de l’Energie et de l’Eau.

Pouvez-vous nous dire deux mots sur le projet de société de votre candidat ?

Le projet de société du candidat Soumaïla Cissé repose sur 5 piliers :

  1. Consolider nos institutions garantes de la constitution et d’une société juste basée sur le travail et le mérite
  2. Bâtir une société civile active, responsable et engagée
  3. Travailler à la croissance d’une économie compétitive, durable et juste
  4. Fournir aux populations des services sociaux à la mesure de leurs attentes et besoins
  5. Faire des jeunes et des femmes un véritable atout pour l’avenir.

On dirait un catalogue de bonnes intentions, qui ne me paraît pas différent des promesses classiques des autres candidats.

Alors, deux remarques. D’abord ne pas confondre un projet de société avec un Programme de Gouvernement. Le projet de société définit les grandes lignes de ce que le candidat compte faire lorsqu’il sera élu Président. C’est son engagement vis-à-vis du Peuple. 2ème remarque : les Maliens votent peu en fonction des projets des candidats. Suivez mon regard et vous verrez que l’actuel locataire de Koulouba n’avait aucun projet de société en 2013.  Ceci étant dit, donnez-vous la peine de lire entièrement le projet de société de Soumaïla Cissé. Vous y constaterez la clarté des objectifs, la définition des moyens et la cohésion d’ensemble qui en font le prélude à un bon Programme de Gouvernement. Vous me connaissez : si je ne croyais pas au Projet, je n’allais pas le mentionner. Naturellement, il y a toujours des points qui peuvent être approfondis. Tout est améliorable.

Avez-vous contribué à l’élaboration de ce Projet, comme pour le PDES.

Non pas du tout. Mais, j’espère avoir l’occasion de l’approfondir avec la Commission de rédaction, après les élections.

“Quand Soumaïla Cissé remplissait le stade du 26 mars pour sa  déclaration d’investiture, IBK se contentait de réunir ses proches chez lui à Sébénikoro”

Vous êtes donc confiant en votre victoire ?

En celle de Soumaila à la présidentielle, sûrement. On ne prend pas part à un combat si on ne croit pas à la victoire. Quand Soumaïla remplissait le stade du 26 mars pour sa déclaration d’investiture, IBK se contentait de réunir ses proches chez lui à Sébénikoro. Nous verrons bien comment le président sortant s’y prendra pour faire sa campagne ? Si l’on fait fi des “montages de l’Ortm”, je ne pense qu’il y aura foule. Tout comme son ami Gbagbo, je pense que l’entourage du Président lui cache la profondeur de la cassure avec le peuple malien. Tous les gens qui aiment sincèrement IBK, sans arrière-pensée, auraient dû le déconseiller de se présenter pour un second mandat. Pourrions-nous, enfin, attaquer les sujets socioéconomiques.

Très bien. Comment voyez-vous la situation socioéconomique du pays ?

C’est une question tellement vaste que l’on pourrait y consacrer plusieurs livres. Je vous propose la démarche suivante : vous présenter une fiche synoptique des chiffres-clés de l’économie malienne et ensuite aborder les fondamentaux qui agrègent l’avenir.

– Population 2017 : 18.3 et 18,9 hbts, avec un taux moyen de croissance démographique variant entre 3,36% de 2,97 %. Population active par secteur : agriculture 80%, industrie 10%, services 10%

– PNB en 2016 : 38,09 milliards de dollars PPA

– PIB par hbt en 2017 : 2200 dollars PPA.  PIB par secteur en 2017 : agriculture 40,9%, industrie 18,9%, service 40,2%

– Taux de croissance : 2013 =2,3%, 2014= 7%, 2015 = 6%, 2016 = 5,8%, 2017 = 5,3%.

– Formation brute du capital en 2016 autour de 16%

– Taux d’inflation : 1,4% en 2015, – 0,3% en 2016. (-1,8% selon d’autres évaluations Inflation alimentaire 4,1. Indice des prix à la consommation : 115.

– Budget National 2017/2018 : Recette 1.957 milliards de Fcfa, Dépenses 2.330 milliards de Fcfa. Solde global négatif : 373 milliards de Fcfa

– Masse salariale : autour de 450 milliards – Nombre de fonctionnaires en 2017 : 110.000

– Budget affecté à l’armée : 272,2 milliards de Fcfa – Effectif de l’armée : environ 20.000

Voilà pour l’essentiel. Ajoutons que le déficit courant est passé de 5,3% du PIB en 2015 à 7,3% du PIB en 2016.  Conséquence, les réserves de change ont fondu et la masse monétaire a augmenté de 6,4% en 2016. Le déficit budgétaire global (dons compris) est passé de 1,8% du PIB en 2015 à 4% en 2016.

Mais Monsieur le Ministre, tous ces chiffres ne veulent rien dire pour le commun des Maliens.

Je vous le concède. Mais, ils ont leur importance car ils permettent de mesurer aux yeux de nos partenaires régionaux et internationaux les performances de notre économie. Ces chiffres sont également pris en compte par les investisseurs potentiels. La conclusion, qui peut être tirée, est qu’en dépit du contexte de semi-guerre, semi-paix, l’économie est restée globalement performante.

“Jamais, les tentatives d’achat de vote n’avaient atteint de telles sommités ”

 Une chose est d’avoir de bons indicateurs (du reste qui varient entre les sources) macroéconomiques, une toute autre chose est la répartition des fruits de la croissance. Je pense avoir suffisamment démontré lors de la précédente interview, l’avancée de la pauvreté dans notre pays d’une part et l’enrichissement et l’extravagance “des nouveaux riches”, d’autre part. Jamais, les tentatives d’achat de vote n’avaient atteint de telles sommités : à coup de trentaines de millions et de voitures 4×4. Des marabouts (ceux qui n’ont pas peur de Dieu) aux rappeurs & autres artistes, en passant par toutes sortes d’opportunistes/affairistes. Il y a à se demander si les poseurs et les accepteurs de ces actes grossiers se posent simplement la question que “Demain pourrait être un Autre Jour”.

Bien, Monsieur le Ministre. Supposons que votre candidat gagne les élections, quelles sont les mesures qui seront prises pour booster l’économie et créer des emplois ?

Ce n’est pas moi qui gagnerai les élections, c’est Soumaïla Cissé. Il demandera certainement à son Premier ministre et au Gouvernement d’élaborer un Programme quinquennal, inspiré de son projet de société. Ce Programme sera synthétisé dans une Déclaration de Politique Générale que le chef du Gouvernement soumettra à la nouvelle Assemblée nationale.

Pour ma part, je proposerai au Président Soumaïla Cissé d’approfondir la réflexion sur les fondamentaux suivants et de mettre en œuvre les actions afférentes :

– Le choix et la rémunération des dirigeants et des travailleurs

– L’intensification des systèmes de production primaire

– Le développement des industries agro-alimentaires et des mines

– L’assainissement urbain, le sauvetage du fleuve Niger, la navigabilité sur le fleuve Sénégal, la lutte contre la désertification et préservation de notre écosystème

Je voudrais aborder ces sujets dans une approche régionalisée. Tout en gardant en tête la cohérence globale de notre système socioéconomique, je voudrais apporter des solutions aux problèmes spécifiques à chacune des entités régionales qui composent notre pays. A mon avis, il vaut mieux mener à bien quelques grands projets structurants en fonction des besoins de nos régions que de vouloir tout faire, partout et en même temps.

C’est bien compris. Commençons donc sur la question des salaires, puisque la dernière fois vous avez bien développé la méthodologie proposée à IBK pour doter le Mali des meilleurs managers.  

Le salaire moyen au Mali oscille autour de 55.000 Fcfa par mois. La rémunération minimale fixée par l’Etat (Smig) est de 40.000 Fcfa/mois. Toutefois, comme dans la majorité des pays d’Afrique, des rémunérations en dessous du minimum légal sont couramment versés aux travailleurs informels, non déclarés. Ce qui ramène le salaire minimum réel au Mali à 31.370 Fcfa/mois. Des efforts ont été consentis par le Gouvernement par une augmentation de 20% des salaires, des allocations familiales et une baisse de l’ITS. Je ne voudrais pas rentrer dans la polémique sur les revenus du président de la République et du Premier ministre, qui disposent d’indemnités dites de souveraineté (caisse noire). En moyenne, le salaire d’un ministre ne dépasse pas 3 millions (avantages en nature compris). Les salariés du privé, à l’exception des sociétés de téléphonie, des banques et des sociétés minières, sont un peu plus élevés que ceux de la Fonction publique. Malgré ces efforts, le niveau des salaires demeure bas au Mali.

“Il faut commencer par améliorer les revenus des travailleurs, aussi bien du public que du privé”

Pour lutter efficacement contre la corruption, il faut commencer par améliorer les revenus des travailleurs, aussi bien du public que du privé. En 2013, dans mon projet de société, j’avais préconisé de doubler le niveau des salaires dans les trois prochaines années. N’étant pas candidat lors de cette élection, il ne m’appartient pas d’avancer des chiffres. Par contre, je reste convaincu, qu’il faut trouver des managers compétents et honnêtes et leur confier les responsabilités des postes-clés de l’Etat, les motiver en leur octroyant des rémunérations satisfaisantes et en les rassurant sur leur avenir. Ce qui permettrait de disposer d’une administration efficace et efficiente. C’est à partir de là qu’un pays peut rentrer dans les vertus de la bonne gouvernance. Condition indispensable à tout décollage socioéconomique.

Et pourtant la corruption existe dans les pays où les salaires sont élevés ?

Pas autant comme au Mali ou dans des pays similaires. Loin s’en faut. Il faut savoir que la corruption s’exerce à différentes échelles. Il y a d’abord “la petite corruption”. C’est celle concernant le policier dans la rue qui vous trouve une infraction pour vous soutirer quelques billets. C’est celle de l’agent de tel service public qui vous établit un document officiel moyennant “une petite récompense”. C’est l’enseignant qui privilégie ses cours privés, voire qui s’arrangent avec certains parents pour faire passer en classe supérieure de mauvais élèves. Comment voudrez-vous qu’avec le niveau de salaire ci-dessus mentionné, ces gens puissent joindre les deux bouts.   Dans le contexte actuel, cette petite corruption sert en quelque sorte de soupape de sécurité contre l’explosion sociale. Elle est indispensable aux basses classes pour faire face à leurs besoins de base. L’augmentation des salaires, accompagnés de fortes mesures coercitives peuvent réduire fortement ce type de corruption.

Et puis, il y’a la grande corruption, celle qui mets en jeu les hautes autorités de l’Etat, des hauts responsables de l’Administration, notamment ceux appartenant à des corps en charge de recettes de l’Etat, ainsi que de gros commerçants. Les principaux bénéficiaires de cette corruption sont connus. Avec des salaires inférieurs à 500.000 Fcfa, ils vivent dans des villas de plus de 300 millions de Fcfa et roulent dans des voitures coûtant plus de 50 millions de Fcfa. Cette corruption à coup de milliards de manque à gagner pour l’Etat est prédatrice.  Elle permet à une extrême minorité de piller les ressources du pays au détriment des investissements dans les secteurs sociaux.  La seule solution efficace que je vois contre la grande corruption prédatrice est de revenir à la loi sur le délit d’apparence et d’apparenter un détournement de 500 millions Fcfa (équivalent à 20 salles de classes ou 10 Centres de Soin Primaire) à un “crime de sang”.

Monsieur le Ministre, je vous propose de revenir sur les solutions régionalisées dans un prochain numéro. En attendant, quelle conclusion pourriez-vous tirer de ce long débat ?

D’abord vous remercier de m’avoir permis de m’exprimer dans les colonnes de votre super hebdomadaire sur la prochaine élection présidentielle, qui marquera un tournant décisif pour notre pays.

Voyez-vous, nous sommes dans un monde de plus en plus difficile. Le repli des Etats-Unis sur eux-mêmes et les taxes décrétées par leur Président contre certains produits exportés par la Chine et l’Union européenne pourraient déclencher une guerre commerciale, sans précédent. Combinée à la logique de la recherche des supers profits des grands groupes financiers et à la dérégulation des marchés, l’économie mondiale risque de connaître une autre crise, pire que celle des subprimes de 2008.

“Avec Soumaïla Cissé cela est possible au Mali”

Par ailleurs, nous autres africains au Sud du Sahara, serons plus de 1,2 milliards d’habitants en 2050, plus que les Chinois. Nous maliens, sommes aujourd’hui presque 19 millions. En 2020, nous pourrions atteindre les 20 millions. Comment nourrir toutes ces populations avec des moyens de production primaires ?  Plus de 65% de nos agriculteurs utilisent encore la daba ? Comment donner de l’eau saine, les soins de base, l’accès à l’école à tous les Maliens ? Comment créer des emplois pour ces centaines de milliers de jeunes diplômés ?  Et tout cela dans un environnement de plus en plus austère. Nous, les moins pollueurs, risquons d’être les 1ères victimes du réchauffement climatique. A l’instar du Lac Tchad, le fleuve Niger risque de disparaitre sur des milliers de kms de son lit, avec ce que cela pourrait représenter de désastres pour les populations riveraines. Face à la pauvreté, nous jeunes risqueront de plus en plus d’aller chercher l’eldorado imaginaire en Occident. Beaucoup y laisseront leurs vies en cours de chemin. Beaucoup seront refoulés. La bravoure de Gassama ne doit pas être un incitateur à des aventures périlleuses. Nos jeunes, qui resteront sur place sans perspective, seront des proies faciles pour les recruteurs terroristes et des trafiquants. L’alcool, la drogue, le banditisme, la prostitution gagnent facilement les jeunes désemparés.

L’Europe semble comprendre que si elle veut éviter le renforcement des troupes terroristes ou la multiplication des ” boat people ” africains, alors il faut une véritable politique de développement pour fixer les populations. Elle est prête à concéder des moyens aux Africains. Les diagnostics sont posés et les moyens identifiés. Le seul grand problème reste celui du leadership africain. Des pays comme le Rwanda, le Ghana, le Botswana, la Côte d’Ivoire … ont prouvé qu’avec un bon président, un visionnaire, il est possible de déclencher un processus de développement socioéconomique. Avec Soumaïla Cissé, cela est possible pour le Mali.

            Réalisée par A.B. HAÏDARA

 

Source: aujourd’hui mali

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