Dans un entretien à bâtons rompus, le président du Conseil malien des transporteurs routiers, Youssouf Bani Traoré, s’est exprimé d’une part sur le projet de création d’une société mixte de transport collectif piloté par la mairie du district de Bamako. Et d’autre part sur les sinistres à répétions des camions citernes.
Le jeudi 23 août 2019, au cours de la 3è session extraordinaire du conseil du district, le maire de Bamako, Adama Sangaré, a procédé à la signature de l’acte de création de la société mixte de transport collectif par bus à Bamako et ses environs. C’était en présence de Lui Yong, représentant de la société chinoise ZEV, concessionnaire et principal actionnaire de la société. Ce vaste projet de modernisation du transport à Bamako se fait sans le Conseil malien des transporteurs routiers (Cmtr).
La facilitation de l’accès aux services sociaux de base est une impérieuse nécessité pour une ville comme Bamako, où seulement 5% de la population a accès à son lieu de travail en moins d’une heure. Cette volonté date bien avant le coup d’Etat de 2012 contre le président ATT. Selon le président du Cmtr, le développement de la mobilité urbaine est un vieux dossier du gouvernement. « La mise en œuvre du projet a été bloquée suite aux événements politiques de 2012. Donc, c’est pour vous dire que le développement du transport urbain est un objectif pour le gouvernement et ses partenaires ».
L’atteinte de cet objectif exige une synergie d’action entre les autorités politiques, plus particulièrement la mairie du district de Bamako et les acteurs du transport comme le Cmtr.
Certes la mairie, dans la conduite de son projet, a associé le syndicat des chauffeurs, mais il était souhaitable, selon le président du Conseil malien des transporteurs routiers, de consulter sa structure. Selon Youssouf Bani Traoré, consulter le Cmtr est une exigence dans la mesure où c’est la principale organisation des transporteurs qui dispose de l’expertise qu’il faut pour soutenir le projet. « Un projet conduit par la mairie sans le Cmtr ne peut nullement être un facteur de blocage. Bamako est engorgé et le besoin de la population a augmenté. Face à cette problématique, il est important de mettre en place un mécanisme pour répondre aux besoins de cette population. Ce mécanisme n’est autre que la modernisation du parc d’automobiles pour le développement du transport urbain».
La mairie du District participe à la création de la société à hauteur de 20% dans le capital, dont 5% gracieusement offerts aux transporteurs, aux syndicats des chauffeurs de Sotrama.
Dans deux mois, une cinquantaine de bus sera à Bamako pour une phase d’essai qui coïncidera avec la fin des études de faisabilité, puis suivront 500 bus, avant une rallonge de 1500 à 2000 bus.
Il faut noter que la société ZE opère avec ses bus à Accra, Kigali et Alger. Au Mali, elle assura le service après la vente par l’ouverture d’un garage à la périphérie de Bamako.
Le deuxième volet de notre entretien avec le président du Cmtr portait sur la circulation des camions à Bamako. Cette pratique n’est pas sans conséquence. L’incendie, le 24 septembre 2019, d’un camion-citerne qui s’est renversé sur l’avenue OUA, relance le débat sur la circulation des camions à Bamako. L’accident a entraîné la mort de plusieurs personnes, tandis qu’une quarantaine d’autres ont été blessées. Pour Youssouf Bani Traoré, les autorités et les organisations des transporteurs doivent travailler en concert pour apporter une réponse à cette problématique qui très souvent est à l’origine des drames à Bamako. «Il faut réglementer la circulation des camions à Bamako. Pour ce faire, il y à deux possibilités. Il s’agit d’une part de créer des couloirs de passages des camions ; ce qui permet de gagner du temps. Le temps accordé par les autorités pour la circulation des camions est insuffisant pour acheminer les produits et faire le déchargement. Et d’autre part, il s’agit de mettre à la disposition des transporteurs des espaces en dehors de Bamako. Cette deuxième proposition engendre forcément des coups supplémentaires sur le transport», a-t-il recommandé.
En plus du président du Cmtr, nous avons rencontré un expert des services techniques des transports qui souhaite garder l’anonymat. Contrairement à la vision du transporteur Youssouf Bani Traoré, notre expert du jour estime que l’accident des camions n’est pas uniquement un problème d’engorgement de la ville de Bamako. Mais il y a également le non respect des normes techniques. Selon lui, plus de 60% des camions ne respectent pas les normes techniques. Selon lui, l’Etat est le seul responsable de cette situation. « Il est important de revoir le contrat de la société en charge de la visite technique. La société qui détient le contrat n’est pas en mesure de couvrir les besoins des Maliens. A part l’unité de Bamako, aucune région ne dispose des équipements en à la matière ».
Nouhoum DICKO
Source: Le Prétoire