Le deuxième anniversaire de la fin du régime du président Ibrahim Boubacar Keïta a été célébré, jeudi 18 août 2022, dans un contexte difficile marqué par l’insécurité, l’inflation des prix des produits de première nécessité, la restauration de l’honneur et la dignité de l’homme malien et le respect du Mali sur la scène internationale. Si sur les plans militaire et diplomatique, des succès sont à saluer, l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Le changement prôné est devenu le serpent de mer.
En dépit des décisions courageuses prises par les autorités de la transition pour imposer le respect de notre pays sur la scène internationale afin qu’il retrouve son rayonnement d’antan face à l’impérialisme rampant, l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Le changement, slogan mobilisateur, qui a constitué le socle de la lutte du Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP) contre le régime du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) et contribué à sa chute, le 20 août 2020, peine à être réalisé par les autorités de la transition, incarnées par les militaires et les hommes dudit mouvement. Deux (02) entités qui gèrent le pays depuis l’éviction du pouvoir de Bah N’Daw, président de la transition et Moctar Ouane, Premier ministre par le colonel Assimi Goïta, le 24 mai 2021 et la nomination de Choguel Kokalla Maïga comme Premier ministre, en juin 2021. Ils avaient donné le ton dans les discours dès l’entame de leur prise de fonction que rien ne sera comme avant. La promesse a- t-elle été tenue ?
Pour les uns, le bilan de la transition dirigée par le colonel Assimi Goïta est positif. Pour les autres, il est mitigé. Les premiers pensent que le premier travail de la transition doit être de recouvrer la souveraineté du Mali sur l’ensemble du territoire national en boutant le terrorisme hors de nos frontières et de redonner le blason de notre pays sur la scène internationale, terni par trente ans de gestion chaotique dont les seuls bénéficiaires ont été ceux qui se qualifiaient de démocrates. Mamadou Sangaré, enseignant de son État, membre d’un mouvement de soutien de la transition, dit que les deux ans de gestion ont galvanisé le peuple malien à prendre son destin en mains. Il est confiant que le Mali va se libérer de la domination néocoloniale sous le leadership du colonel Assimi Goïta, président de la transition et de Choguel Kollage Maïga, Premier ministre, chef du gouvernement.
Zeïnab Touré, autre soutien de la transition, se lâche: «La transition doit vite procéder à l’audit de la nation pour mettre la main sur tous ceux qui sont responsables du pillage du Trésor public». Elle invite les autorités du pays «à continuer le processus du démantèlement du système de prédation instauré par les démocrates et leurs parrains occidentaux».
Enfin, Boubacar Diallo, militant d’un parti politique, se dit satisfait du bilan des deux ans de la transition. Il cite entre autres l’acquisition de nouveaux équipements pour l’armée, les œuvres sociales, la défense des intérêts du Mali, la lutte contre la corruption.
Pour les seconds, ils jugent le bilan de la transition mitigé. Sidiky Tangara, membre d’un regroupement de partis politiques, pense que le travail du gouvernement devait consister à l’organisation des élections au lieu de tenir des discours populistes.
Pour sa part, Dionkè Coulibaly divise la poire en deux. Il reconnaît que des efforts ont été fournis dans certains domaines par le gouvernement, malgré l’environnement international défavorable à notre pays. Mais il désespère quant à la volonté des autorités de la transition à organiser les élections à la date prévue. Selon Harouna Kanouté, la transition divertit les Maliens.
Au-delà des déclarations des pros et anti-transition, nous estimons que deux (02) ans après la fin du régime d’IBK, les attentes demeurent encore. Sur plusieurs plans, la satisfaction est loin d’être au rendez- vous. L’administration marche comme sous IBK. Elle est caractérisée par l’absentéisme, le retard chronique, l’abandon de poste, la perte des dossiers, la corruption, le népotisme, le laisser-aller, etc. La circulation est abandonnée à elle, donnant lieu à des accidents liés au nom respect du code de la route. Le racket des agents de la circulation, des postes de contrôle, de sécurité continue de plus belle.
L’insalubrité est à son plus haut niveau: les caniveaux et collecteurs sont devenus des dépotoirs des déchets ménagers, les ordures de toutes sortes sont jetées sur les voies publiques, bloquant souvent la circulation par endroits dans la ville de Bamako, les eaux usées côtoient les familles. Les trottoirs, les rues principales, les grandes voies continuent d’être occupés par des ‘‘commerçants’’. Les places publiques et espaces verts sont morcelés sans la moindre réaction des hommes du changement. La lutte contre la corruption est au point mort. La justice servit toujours à la tête du client. Les paysans sont dépossédés de leurs terres. Bref, l’anarchie s’est installée partout.
Si ces attentes ne sont pas vite comblées, la transition marche à reculons. Il est du devoir des autorités de prendre le taureau par les cornes pour réaliser le changement souhaité depuis la chute du régime de Moussa Traoré, en mars 1991. Sinon, avec la flambée des prix des produits de première nécessité, le gouvernement risque de perdre un gros lot de son soutien, constitué de Maliens à revenu faible.
Il est aussi important de mettre l’accent sur la montée en puissance de notre armée avec l’acquisition de nouveaux matériels mieux adaptés au combat contre le terrorisme imposé à notre pays par des puissances jalouses de nos ressources naturelles. Malgré l’insécurité due aux terroristes financés par l’Occident, l’armée malienne est en train d’engranger des succès. Les terrorismes sont délogés de leurs repaires et en débandade, ils se sèment le chaos sur leur passage.
Aussi, faut-il noter que le Mali, dans le cadre de ses relations avec les autres pays, a défini trois principes à savoir: le respect de la souveraineté du Mali; le respect des choix stratégiques opérés par le Mali; la défense des intérêts du peuple malien dans les décisions prises. Ces principes ont aujourd’hui imposé le respect de notre pays sur la scène internationale. Beaucoup de pays ont appris à leurs dépens que le Mali n’est plus cette passoire où tout était permis en violation de notre souveraineté.
Yoro SOW
Source: Inter De Bamako