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Démocratie et gouvernance en Afrique francophone

Après le premier et le second tour, les rideaux viennent de tomber sur l’élection présidentielle 2018 du Mali. Elle a été riche d’enseignements à plusieurs titres et sur presque tous les aspects. Il nous a donc paru nécessaire et parfaitement indiqué de mener une réflexion sur l’évolution démocratique de l’Afrique francophone en générale et de celle de notre pays plus particulièrement, en analysant de près les arcanes du système, sa perception par les populations et les acteurs politiques, la conception du pouvoir « démocratique », et subséquemment la gouvernance qui en résulte.

 

En ces temps la……

Depuis l’aube des indépendances, la vie politique des Etats francophones africains a été régulièrement ponctuée par l’annonce des coups d’Etat militaires, l’éclatement de guerres « intra ou extra muros », de génocides perpétrés çà et là, les cortèges de populations errant sur le chemin de l’exode, leurs pauvres baluchons sur la tête.

Presque partout règne l’ordre « kaki » !

Et un jour, il se mit à souffler un grand vent ; il venait de l’est !

Lorsque, en 1989, tombe le mur de Berlin et que s’ouvre une nouvelle période historique, marquée par le besoin de liberté qui soufflait sur le monde, les stratèges occidentaux, sentant le danger pour leurs zones d’influence, notamment en Afrique, avec leur art consommé de l’anticipation, ont vite fait de dépoussiérer le vieux concept de « la décolonisation » .

Un nouveau concept, celui de « la démocratisation », lui a été substitué.

Comme dans une symphonie, les Gouvernements occidentaux, les Organismes d’Aide au Développement, les Institutions Financières Internationales, après avoir pendant plus d’un quart de siècle, suscité, encouragé et soutenu les régimes autocratiques militaires et civils, ont fait de l’ouverture démocratique la condition de leurs interventions.

Mal préparée à la décolonisation, voilà qu’à nouveau, l’Afrique se trouve brusquement, confrontée avec ce nouveau concept.

Jacques CHIRAC, longtemps Maire de Paris, devenu, en 1995 Président de la République Française, déclarait « que la démocratie est un luxe pour l’Afrique» .

Cette boutade a créé, comme on pouvait s’y attendre, beaucoup de polémiques et nombreux l’ont considéré comme condescendante et méprisante. Pourtant au vu de l’évolution démocratique des pays francophones d’Afrique, n’apparait-elle pas aujourd’hui moins saugrenue qu’à l’époque ?

Lors du Sommet France/Afrique de la Baule en 1990, le Président François MITTERRAND donne le ton de la démocratisation dans les pays africains d’expression française, en déclarant, entre autres, que « son pays liera tout son effort de contribution aux efforts qui seront accomplis pour aller vers plus de liberté ».

La fameuse prime à la démocratie !

En quelques mois, tel un virus aux effets fulgurants et dévastateurs, la fièvre démocratique s’empare des africains qui, frénétiquement, d’un pays à un autre, s’engagent dans des contestations violentes et autres formes de luttes politiques au travers d’associations à caractère politique.

Des Conférences Nationales, hâtivement convoquées, adoptent de nouvelles Constitutions. Les Partis politiques, la Presse dans ses différentes composantes, les associations à caractères politiques ou non, sont créés et prolifèrent en très peu de temps, De même, de nouvelles Institutions sont créées et le discours politique prend un ton nouveau.

Parallèlement, des élections sont rapidement organisées. Dans quelques rares pays, des hommes nouveaux apparaissent sur la scène politique. Ailleurs, on développe toutes sortes d’artifices, de malices, de compromis, pour faire passer pour neuf ce qui existait depuis fort longtemps. En très peu de temps, un environnement nouveau se créé : la démocratie africaine est en route.

Alors, vive la Démocratie ! Oui, mais…….laquelle ?

Avec le recul du temps, on comprend mieux, maintenant, les grandes lignes du plan de démocratisation de l’Afrique noire d’expression francophone. Dans son essence, il est d’une extrême simplicité. Comme dans toute planification, il y a un objectif clairement établi, une stratégie appropriée et des moyens d’action parfaitement définis.

D’abord, l’objectif vise, en un mot comme en mille, à maintenir l’influence française. Comme du temps de « la décolonisation » , cette Afrique, se divise en deux : d’un côté les inconditionnels de la France, et de l’autre part, ceux qui n’offrent pas toutes les garanties de fidélité.

Pour les premiers, les intérêts sont tellement importants qu’il vaut mieux assurer la continuité des pouvoirs en place dont certains le sont depuis plus d’un quart de siècle. Habilement conseillés, matériellement soutenus, ils sont les plus sûrs garants de ces intérêts et doivent être maintenus coûte que coûte. Les opposants éventuels, puisqu’il en faudrait tout de même pour conférer à ces régimes une apparence démocratique, pourront toujours être contenus, canalisés ou au besoin, corrompus ou emprisonnés pour les motifs les plus divers.

Il y a, en toute chose, des verrous qui ne doivent en aucune façon sauter, l’ensemble de l’édifice ne tenant que par eux !

Pour les seconds, les intérêts sont d’une autre nature. A défaut de receler, dans l’immédiat, des ressources matérielles, ces pays restent des éléments indispensables à la politique africaine de l’hexagone. Elle peut donc se permettre d’être peu regardante sur la manière, pourvu que les changements aboutissent au maintien dans le giron, d’autant qu’en raison de leur pauvreté, ils auront toujours besoin de rallonges budgétaires, d’aide au développement et d’appuis divers auprès des sources bilatérales ou multilatérales de financement.

Ensuite une stratégie de mise en œuvre consistant à créer, dans ces pays, un monumental désordre.

Connue sous l’appellation « du vent d’est ou l’effet Gorby », selon le Journal satirique, le Canard Enchaîné, une véritable bourrasque, soulevant une poussière rouge de sang et de cendre, s’abat sur nombre de villes africaines.

Les évènements de fin 1990 début 1991 au Mali en furent une parfaite illustration. Le traumatisme qui en résultat fut extrêmement important. Et tant pis pour les dommages collatéraux.

Enfin, toute la panoplie des moyens d’intervention est mise en œuvre : le support médiatique, les moyens diplomatiques dont la réactivation des cellules, dormantes ou non, si chères à Jacques Foccart, la création des structures d’action directe etc…
Les spécialistes de l’action psychologique, en raison de leur connaissance profonde de l’Afrique, disposaient de tous les ingrédients pour faire naître « des révolutions », les contrôler et les orienter.

Parmi les nombreux ingrédients on relèvera en tout premier lieu la quête des africains d’un mieux-être auquel ils aspiraient depuis l’accession de leur pays à l’indépendance. Période euphorique, ces premières années de l’indépendance ont été marquées par toutes sortes de rêves pour un monde nouveau qui s’ouvrait devant eux.

Parmi ces rêves on retiendra l’affirmation de leur identité nationale et la conviction qu’elle leur permettra de trouver des solutions concrètes aux problèmes qu’ils vivent au quotidien. qu’il s’agisse de ceux relatifs à la formation de leurs enfants, à l’éradication des maladies souvent endémiques, ou de l’amélioration de leurs conditions de production, de commercialisation de leurs produits, de la satisfaction de leurs besoins en eau, en nourriture, en logement, en transport etc.
Mais au fil du temps, ces africains découvrent l’envers du décors, la pauvreté qui s’installe chaque jour un peu plus sur fonds de famine et de mévente de leurs produits de base, l’accaparement par une minorité des richesses du pays, l’incapacité de leurs dirigeants à apporter des réponses concrètes à leurs besoins fondamentaux, les crises politiques sur fonds de coups d’Etat, de révolution de palais, de revendications autonomistes souvent accompagnées de rébellions écrasées dans le sang,

Ces attentes, continuellement déçues et les frustrations qui en découlent constituent des terreaux extrêmement favorables à des bouleversements profonds.

Un autre de ces ingrédients réside dans le rôle de l’élite africaine.

Cette élite, formée à grands frais dans les Universités occidentales ou dans les pays de l’ex bloc socialiste, est aux affaires depuis toujours et, de ce fait, porte, incontestablement, une très grande part de responsabilité historique de la situation actuelle d’une bonne partie de l’Afrique francophone.

Vivant principalement dans l’Afrique des villes, villes de plus en plus tentaculaires où se côtoient les résidences cossues et les taudis des bidonvilles, elle a appris, depuis longtemps, l’art du camouflage, des vestes aux multiples doublures que l’on retourne selon les circonstances. Elle a appris depuis longtemps, les vertus des visites à domicile pour faire bonne mesure, les relations parentales ou amicales que l’on cultive à la perfection, les alliances politiques si éphémères, le bakchich au besoin pour balayer ce reste de scrupule qui est en chaque homme,

Cette technocratie politico – administrative, qu’elle soit du secteur public ou des professions libérales, et les hommes d’affaires, (commerçants ou entrepreneurs), avec leur art consommé de humer le vent, ont trouvé un nouvel âge d’or et un filon précieux. Pour elles, toutes les conditions sont réunies pour que « ce vent d’Est » se transforme en une véritable tornade dont l’Afrique est si coutumière.

Peu leur importe que les vieilles querelles ethniques se ravivent, que l’idée de Nation se fissure de toutes parts, que les vieux démons et les vieilles haines se réveillent. Peu leur importe que les valeurs morales et culturelles qui confèrent à l’Afrique, dans ce monde si bassement matérialiste, à la fois son humanisme, son équilibre et sa stabilité, s’effritent par pan. Peu leur importe enfin que le chômage, le désordre, la corruption, ce cancer qui mine l’Afrique, la hantise du lendemain, traduisent le mal vivre des africains et attestent de l’échec des politiques de développement.

Elles, en apparence, demeurent, froides, imperturbables, sourdes et aveugles. En apparence seulement, car, au fond, elles sont tiraillées par la peur et se demandent comment rester aux affaires.

Survivre c’est aussi pour elles se prémunir contre les incertitudes du lendemain.
S’installe ainsi de plus en plus un extraordinaire esprit d’accaparement de cette élite.
Dans cette Afrique qui bouge, qui s’interroge, ballottée entre différents courants de pensée qu’elle digère mal, l’avenir, pour beaucoup, se ramène au quotidien. Telles des fourmis, elle engrange, qui en thésaurisant, qui en devenant rentier, qui en plaçant sa fortune dans des paradis fiscaux.

D’où viennent ces ressources peut-on s’interroger !

Des fonds publics, des dessous de tables provenant des marchés douteux, du racket des populations au coin de la rue, du trafic de tous genres, de la drogue etc. ?

Et pour s’en procurer, toutes les compromissions, surtout au niveau politique, sont commises, sans le moindre état d’âme : l’argent n’a vraiment pas d’odeur en Afrique !
Et comme le dit J.T POUEMIE :

« Et l’Africain déchante. Il n’a plus confiance en lui-même. Il a peur du présent, de l’avenir et à mesure qu’il gravit la colline des promotions administratives et politiques, plutôt, précisément pour cela, son problème premier redevient celui de la survie, quitte à mentir, à médire et à trahir…. » .

Un autre de ces ingrédients, et non des moindres, réside dans l’état de délabrement moral de la jeunesse africaine. Comme toute jeunesse, elle est prête à refaire le monde et se jette, sans état d’âme, dans toutes les « révolutions » .

En Afrique où l’espérance de vie est l’une des plus faibles au monde, les moins de trente ans, tous sexes confondus, représentent entre soixante et soixante-dix pour-cent de la population. Elle se caractérise donc par l’extraordinaire jeunesse de sa population dont l’accroissement se fait de façon exponentielle. Le taux de scolarité, variable d’un pays à un autre, se situe en moyenne autour de trente-cinq pour cent.
La frange constituée par la jeunesse estudiantine prend de plus en plus, conscience de la précarité de sa situation et s’interroge sur son avenir immédiat.

Cette jeunesse qui arrive en âge de travailler, découvre les dures réalités du chômage et de la précarité.

Les Gouvernements de leurs pays, pris dans un engrenage infernal, assaillis de revendications de tous genres, cultivant, sans cesse, la politique de la main tendue, préoccupés par leurs appétits personnels, n’ont, en définitive, que peu de moyens pour les engager vers des projets porteurs, à même de leur permettre de s’investir, de croire et d’espérer en un avenir meilleur.

A côté de cette jeunesse estudiantine, de plus en plus nombreuse, prolifère une autre catégorie, venue des campagnes et qui a déferlé sur les villes, grandes ou moyennes, complètement désorientée, vivant d’expédients et tombant plus facilement dans les travers.

Et nul ne semble percevoir cette immense détresse, ce cancer qui mine les villes africaines et leur prépare des lendemains douloureux.

Quant à l’Afrique traditionnelle, ébahie, interloquée par ce nouveau choc qu’elle n’avait même pas pressentie encore moins voulue, elle se demande ce qui lui arrive et ne comprend pas. Dans cette course effrénée vers le pouvoir, l’onde de choc produite par l’ouverture démocratique, provoque un véritable traumatisme social dans le pays profond.

Désorientées, ces populations le sont par toutes sortes d’agressions : celles des gens de la ville venus solliciter leurs suffrages en promettant monts et merveilles; celles de l’argent pour acheter leur conscience ; celles de l’image et du son qui leur font découvrir des mondes si différents des leurs.

Désorientées, ces populations le sont par leurs enfants qu’elles ne reconnaissent même plus, ni dans leur façon de s’habiller ou de se coiffer, ni dans leur langage ésotérique, ni dans leur comportement situés aux antipodes de ce qu’elles-mêmes avaient hérité de la génération précédente.

Amers, ils s’interrogent sans fin et scrutent, en vain, l’horizon pour tenter de découvrir les contours de la société africaine de demain. Devant toutes les questions auxquelles ils n’arrivent pas à trouver de réponses satisfaisantes, ils s’en remettent à Dieu ou à l’esprit des ancêtres dans les bois sacrés.

En Afrique, il n’y a pas que la faim, la soif, la guerre, le SIDA qui tuent : on y meurt aussi d’amertume et d’inquiétude !

NOUS AVONS VOTE MAIS ……… ! »

Le décor une fois planté, il convient, au-delà des aspects évènementiels, de tenter de dresser un bilan de ce « vent d’Est » , plus d’un quart de siècle après qu’il ait déferlé sur l’Afrique Noire francophone.

Dans tous les Etats de l’Afrique francophone, le vent d’Est a eu comme conséquences de bouleverser leur environnement socio-politique. Des Conférences Nationales ont été tenues, de nouvelles Institutions ont été créées, les Partis Politiques ont proliféré, la Presse a été libérée, une multitude d’associations a vu le jour, le discours et les mœurs politiques ont changé.

Un vent de liberté, depuis, souffle sur ces pays.

Cependant, loin de se satisfaire de ces acquis, la classe dirigeante et l’élite politique africaine, doivent, constamment, se soumettre à critique pour que le processus démocratique puisse s’améliorer et apporter ses vertus aux populations qui ont tant besoin de voir changer leurs conditions de vie. Aussi, doivent-elles s’interroger sur la façon dont s’exerce cette démocratie.

  • Que peut-on en retenir ?
  • A-t-il permis de créer les conditions pour une meilleure implication des populations dans le processus décisionnel ?
  • Dans le cas où subsisteraient des insuffisances, que faut-il faire pour les corriger ?

Pour contribuer à ce débat qu’il ne faut, absolument, pas occulté, il est nécessaire, de relever quelques constats majeurs sur deux des piliers fondamentaux de la démocratie : les Institutions Républicaines et démocratiques, et les Partis Politiques.

 des Institutions républicaines et démocratiques

En premier lieu, on relève que les Etats africains francophones ont, tout simplement, choisi de copier le modèle de démocratie de l’ancienne puissance coloniale.

A quelques différences près, ils ont créé les mêmes Institutions Républicaines qui doivent être sous tendues par le même principe de séparation des pouvoirs. L’Etat de Droit qui devrait résulter du fonctionnement équilibré et harmonieux de ces Institutions et conférer au citoyen la plénitude de ses libertés, devient le credo de la classe politique. Le discours, dont on est si friand en Afrique, s’en réfère constamment.

Cependant, en Afrique, à la différence du modèle de l’hexagone, l’équilibre des pouvoirs, ne tient pas de la séparation et du bon fonctionnement des Institutions qui fondent la République, mais de cette sorte d’unanimisme qui résulte du fait que toutes ces Institutions et tous les acteurs politiques ont la même valeur de référence: la fidélité absolue, sincère ou de façade, au Chef du moment. 
Celui-ci, généralement, est issu, soit d’une ethnie majoritaire, soit de l’Armée, la seule force véritablement organisée, en Afrique. Il tient tous les leviers du pouvoir politique. Tel un Monarque, il distribue postes et privilèges et s’assure de la fidélité des uns et des autres. Il est à la fois, le centre d’impulsion et l’aboutissement de tout ce qui concerne la vie du pays. Aussi devient- il le « petit père du peuple », la référence absolue. Tous, d’une façon ou d’une autre, cherchent à faire partie du sérail : autour de sa personne, s’installe une féodalité politique, administrative, militaire et commerçante.

Comme dans toutes les Cours, depuis l’aube des temps, la flagornerie, la délation, la traîtrise, le trafic d’influence, les délits d’initiés et la corruption politique et financière s’installent. Dès lors la vie politique et le discours qui en résulte se résument à le citer à propos de tout, à magnifier le moindre acte qu’il pose, en un mot à justifier le fait du Prince.

Aussi, ces élites se gardent bien de la moindre critique de l’action gouvernementale, d’évoquer et de débattre de toutes questions susceptibles de porter ombrage à sa ligne politique. L’allégeance, quitte à mentir, à tromper le peuple auquel on appartient, devient ainsi, la règle et un mode d’exercice du pouvoir.

La pérennité du système devint le credo de cette nomenklatura et l’unanimisme, en dépit de l’éclosion d’une multitude de Partis Politiques, devient la règle d’or.
Naît, ainsi, un nouveau concept, « la gestion consensuelle du pouvoir » , accord tacite entre tous les acteurs de la vie publique de se partager les avantages, licites et illicites, qui naissent de l’exercice du pouvoir.

On doit reconnaître à la classe politique, le fait de se souvenir d’une vertu fondamentale de l’Afrique traditionnelle : celle qui, en toute chose, privilégie le dialogue et la concertation en vue d’aboutir à un consensus. Il est, tout simplement, à regretter que les autres concepts fondateurs de la démocratie occidentale, ne fassent pas l’objet d’une telle adaptation !

Naît, également, l’émergence d’une force politique appelée, selon le cas, « la mouvance présidentielle » ou « la majorité présidentielle », dans laquelle se retrouve aussi bien les grandes et les petites formations politiques représentées au sein des Institutions Nationales, les anciens caciques désireux de faire leur « come-back » , les faiseurs d’opinion, si nombreux en Afrique, la nomenklatura administrative, militaire et commerçante, les émanations de la Société Civile.

Cette majorité, pour le moins hétéroclite, occupe tout le terrain politique et investie toutes les Institutions du pays. Il en résulte une absence notoire des contre-pouvoirs sans lesquels la gestion des affaires publiques devient patrimoniale.

La notion de contre-pouvoir n’a pas encore pénétré la démocratie africaine ! Seule prévaut la volonté du maître des lieux.

Aussi, on assiste, dans de nombreux pays africains, à la dérive, absolument phénoménale, des régimes démocratiques vers la monarchie, n’en déplaisent aux néo-démocrates dont certains n’hésitent même pas, à présenter, de façon péremptoire et démagogique, leur pays comme un modèle de démocratie achevée.

En définitive, les Institutions Républicaines et Démocratiques, instaurées à grands frais à la suite « du vent d’Est », deviennent, à maints égards, des caisses de résonance ou des bureaux d’enregistrement des décisions prises au sommet de l’Etat.

Par rapport aux régimes à Parti Unique que tous les Etats africains ont connu, à un moment ou à un autre, on ne peut s’empêcher de relever que seule l’apparence démocratique et le langage approprié qui l’accompagne, ont changé.

Assurément, en Afrique, les survivances des vieux réflexes du Parti-Etat, caractérisés par l’expression de la pensée unique et par le culte de la personnalité, restent, plus que jamais, vivaces.

 des Partis Politiques

Que peut-on relever sur les Partis Politiques, rouages essentiels dans l’expression des suffrages et la mise en place des Institutions Républicaines ?

En premier lieu , on relève le fait que la vie politique est éclatée entre une multitude de Partis, Dans certains pays, on en dénombre plus d’une centaine. On retrouve là, le côté mesquin de l’esprit latin si différent du pragmatisme anglo-saxon.

Généralement, les Partis Politiques se créent autour de différents courants de pensée et d’action visant à mettre en œuvre des politiques s’appuyant sur une vision commune de la société.

Cependant, en Afrique, il en va autrement. La création et l’existence de ces Partis obéissent à d’autres critères que sont le plus souvent, le critère ethnique, le critère clanique ou, tout simplement, l’ambition personnelle.

En ce qui concerne le critère ethnique, en dépit de toutes sortes d’efforts pour édifier des Etats/Nations, et créer le sentiment d’appartenir à une seule et même entité, la plupart des Etats africains, en plus de cinquante ans d’indépendance, n’ont jamais pu, véritablement, réduire le phénomène ethnique. Celui-ci reste vivace et conditionne la stabilité de la plupart des pays. Dans certains pays on peut en dénombrer plus d’une cinquantaine.

Ces ethnies africaines, souvent irréductibles dans l’adversité, ne vivent et ne perçoivent les pouvoirs en place qu’en fonction exclusivement de leur appartenance à leur clan.

Ce critère devient une sorte de fonds de commerce pour de nombreux dirigeants qui s’en servent, soit pour accéder ou conserver le pouvoir, soit pour se positionner sur l’échiquier politique du pays. Alors, tous les démembrements de l’Etat (Forces armées et de Police, Administrations publiques, Représentations Extérieures etc…) sont distribués en fonction de celui-ci. Il devient, potentiellement, source de rébellion et de conflits armés.

Même dans les rares pays africains qui semblent avoir réussi à juguler ce phénomène ethnique, on assiste, çà et là, à des tentatives de renaissance, sous couvert de la promotion culturelle. Il rend quasiment impossible, l’émergence de courants politiques nationaux et entraîne la fragilisation de l’Etat.

Les élections africaines ont comme conséquences d’ouvrir cette boîte de Pandore.
En ce qui concerne le critère clanique, on observe que dans les pays africains où le facteur ethnique n’est pas prépondérant ou est résiduel, prévalent des associations claniques, dont le credo est de faire allégeance au Chef du moment.

En ce qui concerne l’ambition personnelle, ce critère n’est pas propre à l’Afrique. Elle est un sentiment qui guide et les Hommes et les Nations. Ses voies sont insondables et ses trajectoires le sont tout autant, surtout en Afrique où la politique devient un moyen d‘ascension sociale fulgurante. Se trouver dans le bon wagon au bon moment est un exercice dont raffolent les intellectuels africains.

L’élite africaine a très vite compris que pour elle, s’ouvre une période bénie, lui donnant le moyen le plus rapide de gravir les échelons et d’accéder au sommet de la hiérarchie sociale, grâce aux tortueux arcanes de la vie politique.

Il est vrai que ceci n’est pas une particularité de la démocratie africaine, la politique étant un moyen de sortir, très rapidement, de l’ombre et d’avoir accès à la richesse, par les moyens les plus divers. Les africains ont très rapidement appris que tous pouvoirs politiques comportent des domaines réservés, des zones d’ombre, qui, en aucun cas, ne peuvent être portés sur la place publique. Démocratie ou pas, ils ont, très vite, appris de Machiavel, que « la fin justifie les moyens » !

En second lieu , on relève que, de cet émiettement, émergent quelques grandes formations dirigées, souvent, par les tenants du pouvoir ou, parfois, par des caciques jouissant d’une certaine notoriété. Ces Partis politiques deviennent, de formidables machines électorales et contrôlent l’ensemble des rouages politiques, administratifs, économiques et sociaux. Ils sont incontournables dans tout le processus décisionnel.

Quant aux autres Partis de  « seconde zone », ils se heurtent, à un grand nombre de difficultés qui limitent leur possibilité d’action, réduisent leurs influences sur la vie publique et restreignent leur représentation sur le plan national. Ils demeurent, malgré tout, dans le paysage politique espérant monnayer leur voix, un jour, en cas de besoin.

A cet égard, il est amusant de relever le florilège des sigles des formations politiques, grandes ou petites : toute la gamme d’orientation politique sur tous les aspects de la démocratie y est passée en revue. Cependant, comme une barrique vide, ces sigles sonnent creux, du fait que dans la pratique, ces formations ne développent la moindre activité qui traduise concrètement les messages que ces sigles comportent.

Peu importe, pourvu que cela sonne bien et soit un identifiant pour les promoteurs !
Grandes ou petites, ces formations politiques se retrouvent très souvent dans la Mouvance Présidentielle et s’activent pour obtenir, de temps à autre quelques strapontins politico – administratifs suffisants à leur bonheur.

En troisième lieu, on relève le fait que les activités qui confèrent à un Parti sa vitalité, (meetings, manifestations culturelles, conférences/débats etc…) ne se font, dans le meilleur des cas, que de façon sporadique, généralement à la veille des élections. La formation et la sensibilisation des populations sur les grands problèmes du pays, les débats sur les orientations et les décisions que prennent les pouvoirs en place et qui engagent l’avenir du pays, sont quasiment occultés.

Cette absence de débat
s est l’expression même de la pauvreté de la pensée et de l’action politiques des Partis. Elle résulte de l’absence d’un ancrage idéologique.
Aujourd’hui, grandes ou petites, on relève qu’à la différence des formations politiques d’avant l’indépendance, celles qui animent aujourd’hui la vie politique en Afrique sont, dans l’ensemble, incapables d’offrir aux populations un modèle de société suffisamment porteur pour les amener à s’investir dans l’action politique.
Et ce n’est pas faute de matières , de sujets porteurs tant les populations africaines sont sous-informées, mal ou pas du tout informées sur les raisons réelles de leur infortune ; tant elles ont besoin d’être conscientisées et orientées vers le changement des mentalités et des comportements, qu’il s’agisse du choix de ses leaders, de ses droits de réclamer des comptes à ses élus, de l’usage par le pouvoir des fonds publics, de l’orientation et des modèles économique, des rapports avec les Institutions Financières Internationales, de la préservation de leur environnement, de la formation , de l’emploi et de la santé de ses enfants etc. La liste est sans fin.

Il y a tant d’interrogations dont les réponses conditionneront l’avenir du continent, que la classe dirigeante africaine n’a pas le droit de les occulter.
Ce faisant, elle ne peut que trahir leur peuple !

A l’évidence, la pauvreté africaine n’est pas seulement matérielle ; elle est aussi et surtout dans les têtes et dans les comportements !

Comment peut-on expliquer cette pauvreté de débats dans les démocraties africaines ?

D’abord, beaucoup d’intellectuels, aux commandes des affaires de leurs pays respectifs, par réalisme, par nécessité ou tout simplement par démagogie, ont abandonné ce goût de la confrontation des idées et des opinions et donc de la lutte politique . Les formations politiques qu’ils créent, préfèrent s’engager dans « la préparation des prochaines échéances électorales », en espérant, qu’un jour, ils pourront bénéficier de la mansuétude du Chef du moment, par l’obtention de quelques postes de premiers rangs.

Ensuite, on relève l’absence de véritables Partis d’opposition. Ceux qui, d’aventure, s’inscrivent dans cette logique, sont dans la plupart des cas, sinon brimés sous différentes formes, du moins marginalisés ou réduits à la portion congrue. De guerre lasse, sans moyens financiers conséquents, ils finissent par s’étioler et mourir de leur belle mort, à moins que par calcul politique, ils ne soient maintenus par les tenants du pouvoir. Pour faire bonne mesure, un régime démocratique doit comporter, au moins, une majorité et une opposition !

Dès lors, sans ancrage idéologique, la transhumance politique devient un exercice dont raffole la classe politique qui bascule toujours du côté de ceux qui détiennent les rênes du pouvoir ou qui, sait-on jamais, ceux qui pourraient être amenés à le détenir lors des prochaines élections.

Pour assurer son ascension sociale, que ne ferait-on pas ?

Enfin, on relève, que la plupart de ceux qui s’engagent dans les Partis politiques, s’inscrivent dans des logiques personnelles et non sur la base de convictions. Rares sont, en Afrique, ceux qui entrent en politique avec la volonté de se battre pour des idéaux. On peut, du reste, se demander si ces nombreux Partis Politiques ont des projets de société autres que celui qui consiste à accéder au pouvoir dans ces différents échelons. Au cas où ces projets existeraient, on ne peut que déplorer l’opacité qui les entoure !

En quatrième lieu, on relève que les adhérents à ces Partis ne participent pratiquement pas aux financements de leurs activités. Dès lors se pose la question de savoir d’où viennent les fonds nécessaires à leur fonctionnement ?

De leurs promoteurs ? Dans ce cas, ils ressemblent à des fonds de commerce dont on attend le retour sur investissement !

Des fonds publics ? Les mécanismes légaux sont-ils suffisants pour couvrir l’ensemble des charges ? Si non, d’où viennent les ressources additionnelles ?
De l’Extérieur ? Si oui, quelles en sont les contreparties ?

Les Partis Politiques et tous les démocrates réellement convaincus ont de quoi nourrir leurs débats!

En cinquième lieu , on relève l’usage de mauvaises pratiques.
La mise en œuvre de la démocratie révèle un grand nombre de mauvaises pratiques qui ont comme conséquences d’amener les populations à en avoir une perception rédhibitoire.

Le premier est relatif à la corruption politique.

Dans les pays africains, nombreux sont ceux qui entrent en politique comme on entre dans les affaires. L’adhésion à des Partis et les élections en Afrique apparaissent comme des entreprises dans lesquelles on investit avec l’espoir de réaliser de fabuleux retours sur investissement. En Afrique, où tout se vend, s’achète, se négocie à peu de frais – tradition oblige – cette irruption de l’argent se manifeste de plusieurs façons, allant de l’achat des votes et des consciences, à l’attribution des marchés de l’Etat, de la nomination à divers postes de l’Etat, à la redistribution du revenu social. Le tissu social s’en trouve complètement corrompu et les élections totalement dévoyées. !

Le système mis en place, presque de façon consensuelle, dans maints pays, consiste à permettre à chaque détenteur de la moindre parcelle du pouvoir de s’en servir, non pas dans l’intérêt général, mais dans son intérêt particulier. La corruption politique qui en résulte est absolument phénoménale. Les tenants du pouvoir, les hommes politiques, avec l’appui de leurs Partis, s’y adonnent à corps perdu.
Ces Partis, ainsi, deviennent, soit des ascenseurs pour la promotion sociale, soit des niches de protection pour ceux qui, et ils sont nombreux, savent que leurs activités se situent en marge de toute légalité

En Afrique il faut savoir partager pour s’assurer, en retour, de la reconnaissance du Parti !

Progressivement, aux féodalités politiques des Partis Uniques, se substitue, autant à l’échelon national qu’au niveau régional et local, une autre féodalité, celle de la mouvance présidentielle.

Ce que Modibo KEITA a appelé « le festival des brigands » , à tous égards, comparable à un repas des fauves, peut commencer, allègrement et se poursuivre indéfiniment.

Cela s’apparente à une cartellisation de la vie politique !
Lentement mais sûrement, au lieu « du gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple » , les Etats africains tendent vers la ploutocratie, système dans lequel le pouvoir appartient aux riches.

Le second est relatif à l’absence de neutralité de la puissance publique.

On relève, d’abord, comme au temps des Partis Uniques qui ont longtemps existé en Afrique, que la puissance publique est entièrement contrôlée par les Partis Politiques qui détiennent le pouvoir. L’appartenance au Parti dominant, devient, généralement, le critère essentiel dans les nominations des hauts fonctionnaires. Instrumentalisée de différentes manières, cette Administration Publique devient le substrat sur lequel repose le pouvoir politique. Elle reste, cependant, d’inspiration coloniale en dépit des changements apportés, soit dans les appellations des circonscriptions administratives, soit dans ses démembrements structurels.
Il y a d’un côté les administrés, de l’autre les administrateurs repartis entre plusieurs secteurs. Les premiers subissent bien plus qu’ils ne participent aux prises des décisions qui engage la vie de la communauté. Les seconds, dans l’anonymat et l’absence d’état d’âme qui caractérisent les fonctionnaires sans légitimité populaire, administrent leurs structures dans la plus pure tradition coloniale en pressurisant les populations dans toutes leurs quêtes de service public.

Dans les pays africains qui ont tenté de mettre en place une administration décentralisée, les pratiques qu’on n’y observe lors de élections municipales, de même que dans la gestion des affaires communales, traduisent combien est encore longue la route qui conduit à une démocratie de qualité.

Le troisième est relatif au non-respect des valeurs démocratiques.

Parmi celles- ci on relèvera, en premier lieu, que dans presque tous les Etats d’Afrique francophones, démocratie et impunité vont de pair.
Les scandales, les détournements des biens publics, l’enrichissement sans cause, les délits d’initié, l’abus de biens sociaux etc… sont toujours à la une de la presse libre, sans que des sanctions ne soient prises contre ces délinquances financières.
Dans maints pays, l’indépendance de la Justice est mise sous le boisseau dès lors qu’elle cherche à mettre en cause les tenants, au sens large, du pouvoir. Au fil du temps, ces mises en cause finissent par s’étioler et céder le pas à d’autres scandales.

Il est vrai que cette tendance de l’Etat à s’immiscer dans la distribution de la Justice n’est pas une particularité africaine. Il se trouve, tout simplement, qu’elle est aggravée par la nature des pouvoirs africains, combien compréhensifs pour toute sorte de délinquance financière.

Cette pratique s’explique aussi par l’irruption de l’argent dans la distribution de la Justice, dans le fonctionnement de tous les rouages de l’Etat, y compris l’Ecole, la Santé etc…Elle devient un fléau même dans les relations parentales et autres rapports sociaux.

On relèvera en second lieu, que la notion « du rendre compte » , ne se pratique pas en Afrique. Ceux qui briguent les suffrages et les obtiennent au cours d’élections contestées (toutes les élections en Afrique sont contestées et frappées d’infamie), ne rendent jamais compte des engagements qu’ils prennent pour se faire élire, de l’usage des biens publics, des résultats qu’ils obtiennent ou non dans la gestion des affaires de la Cité.

Parce qu’ils ne veulent pas ou ne peuvent pas couper les branches sur lesquelles ils sont assis, ces élus et autres gouvernants, avec en arrière-pensée, les prochaines élections, préfèrent laisser faire, assurer le renvoi de l’ascenseur. Alors, la puissance publique, dans toutes ses déclinaisons, progressivement, s’étiole et finit par s’effacer.

La dérive s’installe, le pays, irrémédiablement, va à vau-l’eau !

Le quatrième est relatif à la mauvaise tenue des élections africaines.

Depuis trente ans, en Afrique, les pays africains vivent au rythme du renouvellement des mandats présidentiels, législatifs et communaux. L’exercice de la démocratie se réduit, presque exclusivement, à la préparation et à la tenue d’élections « libres, crédibles et transparentes ». .

Une fois tombée la fièvre de la course vers le pouvoir, elles retombent, tristement dans leur léthargie en attendant les prochaines échéances.
Ces élections donnent lieu à toutes sortes de pratiques, y compris les plus irrationnelles et sont ponctuées de toutes sortes de réclamations, de contestations allant jusqu’à des conflits armés. Les élections africaines ne sont ni crédibles, ni transparentes et, ceci, en raison de beaucoup d’insuffisances liées à la fois à leur mauvaise organisation et à la mentalité des acteurs.
La création, à grands frais, des Commissions Nationales Indépendantes le plus souvent inopérantes, la participation d’Observateurs nationaux, régionaux et internationaux, dont les observations ne valent que pour autant qu’elles ne soient pas de nature à mettre en cause les choix faits ailleurs, sont autant de facteurs qui n’apportent pas aux élections africaines leur crédibilité et leur légitimité.

Le cinquième est relatif à l’apparition de nouveaux acteurs , notamment ce qui est appelé pudiquement la Communauté Internationale, mais qui en réalité se résume aux principaux pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU.
Les petits pays africains savent, maintenant, qu’un acteur majeur et plein de ressources, vient de faire irruption sur l’échiquier des élections africaines. Il ne reste plus, aux nombreux candidats aux élections présidentielles, que de rechercher ses bonnes grâces afin d’avoir avoir son appui et remporter les suffrages de leurs populations.

Une autre boîte de Pandore vient, à nouveau, de s’ouvrir en Afrique !
Mais, ces candidats ne devront jamais oublier les leçons que donne l’histoire politique de l’Afrique, depuis cinquante ans. L’impérialisme, n’a qu’un credo, la préservation de ses intérêts, et une méthode, des dirigeants africains à sa dévotion dont il se débarrassera dès lors que ceux-là n’entreront plus dans ses schémas. Les exemples, de la Côte d’Ivoire et de la Libye, pour ne citer que ceux-là, sont nombreux, en Afrique.

L’Afrique francophone devra-t-elle continuer à vivre avec cette démocratie importée, au prix d’atrocités de tous genres ?

Les armes de toutes sortes, les sanctions politiques, économiques, financières, le refus du respect du plus élémentaire des droits humains, le droit à la vie, le rejet des Lois, le mépris affiché à l’endroit des africains, doivent-ils être les moyens par lesquels se fera la promotion de la démocratie en Afrique ?

Globalement, le manque de crédibilité des hommes politiques dans lesquels les populations ne se reconnaissent pas, l’irruption de l’argent qui corrompt les mœurs, la fausseté du discours politique, le sentiment d’impuissance du plus grand nombre face aux gabegies de toutes sortes et l’absence de sanctions, expliquent la désaffection des populations vis-à-vis du fait politique et le refus d’accomplir leurs obligations civiques.

Il n’est pas étonnant que dans de nombreux pays africains , le taux de participation aux élections se situe bien en dessous de la barre de 30% et pose, de ce fait, la légitimité des pouvoirs en place, alors que dans d’autres, par contre, comme du temps des Partis uniques, il oscille entre 70 et 80%, fraude oblige !
Peu importe la légitimité des pouvoirs issus des urnes, pourvu que toutes les apparences de la légalité et le langage approprié soient observés. La classe politique africaine ne s’en émeut guère, préoccupée qu’elle est, par le partage du pouvoir et la grande curée. Et les démocraties occidentales s’en accommodent parfaitement pourvu que soient sauves l’apparence démocratique et la préservation de leurs intérêts.

En définitive, dans les pays africains francophones, le bilan du « vent d’Est » , est sans appel : en dehors de quelques changements dans l’environnement politique des pays africains, il faut reconnaître que l’exercice de la démocratie, se traduit, aussi, par toutes sortes de déviances et de dysfonctionnements.

On y observe la dérive monarchique des Républiques Africaines du fait de l’émergence de véritables dynasties, l’irruption de l’argent qui corrompt à tout va, le mauvais exercice des libertés publiques et individuelles résultant de l’absence d’une justice saine, de l’impunité la plus totale, de la violation des droits du citoyen, de l’immixtion directe des Gouvernements dans tous les domaines de la vie publique.

Cette démocratie s’exerce sur fond de contestations, de crises politiques profondes, allant jusqu’à des guerres civiles permanentes et meurtrières.
Globalement, elle se traduit par la non satisfaction des besoins des populations qui subissent bien plus qu’elles ne participent à l’expression des suffrages et des Institutions qui en résultent.

Si la classe politique n’arrive pas à mettre un terme définitif à ces insuffisances, la démocratie africaine restera un vain mot !

Assurément, ces pays francophones d’Afrique ont encore beaucoup de chemin à parcourir pour asseoir une gouvernance qui implique toutes les composantes sociales du pays, qui soit conforme à sa culture et qui réponde aux aspirations des populations.

La route vers la démocratie, dans ces pays, reste, encore, très longue !

On retiendra que, depuis cinquante ans, l‘élite politique des Etats francophones d’Afrique n’a jamais été capable de réadapter le combat politique. Celles qui s’y sont essayées peu ou prou, ont été, d’une façon ou d’une autre, liquidées.

Les autres, ont choisi l’allégeance et la politique de la main tendue.

En choisissant, également, de mimer servilement ce qui se pratique dans des sociétés si différentes de la leur, elle a montré, son incapacité à se défaire de sa colonisation mentale.

Ainsi elle n’a jamais été capable de répondre aux attentes des populations pour une amélioration de leurs conditions vie.

Aussi, doit-elle se soumettre à une véritable introspection et reconnaître que le mal de l’Afrique est endogène , qu’il est de son fait, dans sa façon d’être et de penser, dans les actes qu’elle pose au quotidien, dans son incapacité à se projeter dans le temps, à voir grand et à amener les populations africaines à trouver en elles- mêmes les ressources et la force de s’arc-bouter et de tendre vers l’objectif de résoudre la multitude de problèmes qui les assaillent.

Mais la vie est ainsi faite que tout a une fin. Le temps est-il encore loin où les africains se décideront à s’engager dans la voie de la rédemption de l’Afrique ?
Si cela n’était pas, il faudrait, alors, se demander de quoi demain sera fait pour les générations futures africaines ?

Malijet

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