Entre un Président de la République otage de son soutien indéfectible à son Premier ministre, une opposition alliée de circonstance de Mollahs qui ont su cantonner la convergence des fureurs, un Parti présidentiel qui pour les mêmes raisons est déterminé à en découdre avec le Chef du Gouvernement, l’issue honorable pour tous réside dans la seule démission du premier des ministres. Et pour cause…
La fronde populaire contre le Premier ministre met indubitablement le Président de la République dans en embarras indicible. Écartelé entre sa loyauté envers son PM et une exigence populaire de se défaire de son chef du Gouvernement, et la légalité constitutionnelle, le Président IBK est face à un choix cornélien. En effet, l’article 38 de la Constitution dispose : ‘’le président de la République nomme le Premier ministre.
Il met fin à ses fonctions sur présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement.
Sur proposition du Premier ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions’’. Au regard de cette disposition, l’initiative de la révocation du Premier ministre relève d’un pouvoir discrétionnaire du seul Président de la République. Mais l’application rigoureuse de cette disposition est en butte à deux impératifs.
Il y a, d’une part, la confiance du Président de la République à l’égard du Premier ministre qui a vaincu tous les scepticismes en organisant l’élection présidentielle de 2018 à l’issue de laquelle il a rempilé pour un second et dernier mandat. Il l’a fait savoir en répondant à une question du confrère Deutsche Welle : « il fait son travail et il le fait correctement, alors qu’il a été confronté à des défis énormes qu’il a su gérer de façon remarquable, notamment l’élection présidentielle.
J’ai les meilleures relations avec mon Premier ministre ».
De même, tous les observateurs de la scène politique nationale ont constaté que, pour des raisons qui lui sont propres, c’est le Premier ministre que le Président IBK avait, jusqu’en ce début d’année, envoyé au charbon à la rencontre des opposants. Il est devenu son lieu-tenant.
Selon des indiscrétions, il y a juste quelques jours qu’il renouvelait cette confiance, même si une mystérieuse rencontre entre les deux responsables politiques pourrait ébranler certaines certitudes.
Au milieu d’un paysage sombre, c’est le seul point lumineux du soutien du Président IBK qui devrait permettre au Chef du Gouvernement garder l’espoir de résister à la bourraque.
Le second impératif auquel fait face le Président de la République, est la pression populaire. Les démonstrations de force du Président du Haut conseil islamique, avec la bénédiction du Chérif de Nioro, le dimanche 10 février, au Stade du 26 Mars, et du vendredi 5 avril dernier sont un baromètre fiable de la température sociale. Le Président IBK ne peut pas rester sourd à une forte revendication de sa population portant sur le départ du Premier ministre.
Dans ce contexte, en démissionnant, le Premier ministre ôterait une grosse épine du pied du Président ; il sauverait la face à IBK qui n’aurait pas à donner l’impression d’avoir capitulé face à la rue.
De même, le PM épargnerait au PR d’avoir à transgresser ses sacro-saints principes d’attachement aux valeurs de loyauté et de respect de la légalité. Ce faisant, il permettrait au Chef de l’État de sortir de cette crise par la grande porte. Cela, il le doit bien à celui qui l’é défendu contre vents et marées.
La démission du Premier ministre n’arrangerait pas que les affaires du Président de la République. En effet, elle éviterait au RPM d’aller à la défiance et, probablement, à la rupture avec le Président fondateur du Parti, à travers le dépôt d’une motion de censure contre le Gouvernement. Cela, il le doit, peut-être pas aux députés du RPM, mais certainement au peuple qui dans sa forte expression réclame son départ.
Enfin, l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même. En jetant l’éponge, Soumeylou Boubèye MAIGA, se sauverait lui-même la face, en étant pas, dans l’histoire du Mali démocratique, le Premier ministre renversé sous l’impulsion de la rue pour incapacité notoire. Aucune honte à cela, puisque bien d’autres illustres prédécesseurs à la tête du Gouvernement ont dû emprunter la même voie.
Permettre à tout le monde de sortir grandi de cette crise, par une démission, c’est seulement cela qui grandirait le Chef du Gouvernement actuel. Cela, il se le doit à lui-même. Martin Luther KING disait : ‘’la véritable grandeur d’un homme ne se mesure pas à des moments où il est à son aise, mais lorsqu’il traverse une période de controverses et de défis’’.
Mais, il reste néanmoins les options les moins glorieuses pour l’homme providentiel du Président IBK : être renversé par une motion de censure des députés de la Majorité à laquelle il appartient ; être limogé par le Président de la République sous la pression de la rue. SBM s’abaissera-t-il à se couvrir d’une telle infamie ?
PAR BERTIN DAKOUO
Source: info-matin