A la veille de son départ de la tête de la MINUSMA, annoncé pour le 31 mars prochain, Mahamat Saleh Annadif a tenu à rencontrer la presse autour d’un déjeuner d’adieu, le mardi 16 mars dernier. Une occasion pour lui de faire un bilan des cinq années passées au Mali à la tête de la mission onusienne. Même s’il a relevé quelques motifs de satisfaction, il n’a tout de même pas manqué d’exprimer quelques regrets.
Il faut dire que ce contact avec la presse est devenu quelque peu traditionnel depuis que Mahamat Saleh Annadif a pris la tête de la MINUSMA, en décembre 2015. C’est sous sa direction que la mission onusienne a fourni plus d’appui à la presse, notamment celle évoluant au niveau local. Sans compter la couverture de tous les grands événements auxquels la MINUSMA est partie prenante. S’y ajoutent les points de presse hebdomadaires et les différentes missions à l’intérieur du pays, singulièrement dans les zones de conflit.
C’est donc en chevronné de ces rencontres qu’il a offert un déjeuner d’adieu à la presse. Parmi les points qu’il a regrettés durant le temps passé au Mali figure l’absence de consensus de la classe politique. A ses yeux, c’est cette situation qui a conduit au coup d’Etat du 18 août dernier, ouvrant la voie à la période de transition que nous connaissons aujourd’hui. Selon lui, il est impossible de réussir à relever les défis durant cette période en excluant la classe politique. Raison pour laquelle il s’est félicité de la mise en place du Comité d’orientation stratégique sur les réformes politiques et institutionnelles, le 15 mars 2021, sous l’autorité du Premier ministre, Moctar Ouane.
Toutefois, il a insisté sur le fait qu’il fallait rester réaliste, en indiquant que, même si elles sont très ambitieuses, comme en témoigne le Programme d’Action Gouvernementale (PAG), les autorités de la transition ne peuvent tout faire. D’où son appel à » s’entendre sur le minimum pour sortir de la transition « . Pour lui, cette période n’est pas propice à la mise en œuvre de toutes les réformes. D’ailleurs, il n’a pas manqué de rappeler que, sur le fond, le Mali dispose des meilleurs textes, seulement c’est sur la forme (mise en œuvre) que les divergences apparaissent. Mahamat Saleh Annadif a surtout regretté le fait que le Mali, malgré sa richesse culturelle et historique, ne dispose toujours pas de personnalité ou d’un cadre de consensus pour éviter que le pire arrive.
Il a ainsi cité le cas du Sénégal, où des dignitaires religieux et des acteurs de la Société civile s’impliquent à chaque crise pour éviter que le pays ne bascule dans le chaos. Il a aussi pris l’exemple du Burkina Faso, avec le Moro Naba, faisant office d’une autorité traditionnelle encore très influente. Il a souhaité que ce genre de rôle soit joué par les familles fondatrices de Bamako ou d’autres cadres pour faire entendre raison, en restant à égale distance entre toutes les parties.
Cependant, pour lui, il n’est pas encore trop tard pour bien faire et il était encore possible de redresser la barre. C’est ainsi qu’il a émis le souhait que la Transition connaisse son épilogue au premier semestre 2022. En tout cas, il a promis que la MINUSMA aidera davantage les autorités de la Transition pour l’atteinte de cet objectif, visant à favoriser la venue d’autorités plus légitimes pour mettre en place les réformes tant espérées par le peuple Malien, pour une véritable refondation.
Il est à préciser que Mahamat Saleh Annadif, dont c’est la première fois dans sa longue carrière de diplomate de rester cinq ans d’affilée dans un même pays, ne part pas loin du Mali. Il sera basé à Dakar, où il assumera la fonction de Chef du Bureau des Nations Unies en Afrique de l’Ouest et au Sahel, en remplacement du Ghanéen Mohamed Ibn Chambass. Cependant, il entend mettre toute son énergie pour aider son successeur à la tête de la MINUSMA, le diplomate mauritanien, El-Ghassim Wane, à réussir sa mission au service du retour de la paix et de la stabilité au Mali.
Massiré DIOP
Source: l’Indépendant