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Découpage: le procès

Les conférences régionales convoquées sur les avant-projets de texte relatifs à cette réorganisation pour prendre en compte les avis et les suggestions des populations en vue de d’aboutir à un projet fondé sur les réalités socio-culturelles et économiques de chaque région et permettant de faire face aux défis sécuritaires et de promotion d’un développement local équilibré se tiendront sans l’opposition. Celle-ci à travers plusieurs de ses composantes a déclaré son intention de ne y prendre part.

A l’organe de ce boycott, l’opposition et plusieurs communautés reproches au gouvernement de vouloir appliquer un saucissonnage territorial au caractère injuste, inéquitable et unilatéral. Toutes choses qui seraient attentatoire à la cohésion sociale, à la paix et à la légalité républicaine. Selon les opposants de la réforme, il s’agit d’une «fuite en avant », d’une reforme « injustifiée et injustifiable », d’une « boucherie territoriale », « une bombe à retardement », (qui pousserait d’autres zones géographiques à réclamer un découpage et la création de circonscriptions administratives et territoriales) qui comporterait les germes d’une partition programmée du pays; en tout cas, un danger pour la cohésion nationale !

LA REFORME
Processus d’aménagement du territoire, le découpage territorial qui renvoie à la décentralisation et à la régionalisation inscrite comme finalité dans toutes les Constitutions maliennes, permet de transférer des compétences administratives de l’État vers les collectivités locales : « les collectivités territoriales sont créées et administrés dans les conditions définies par la loi » et qu’elles « s’administrent librement par des conseils élus ».
Nul ne (saurant) contester la nécessité d’une réorganisation administrative », ne serait-il pas une erreur d’aborder la reforme envisagée comme une simple politique de développement territorial ou de territorialisation des politiques publiques, mais plutôt comme un des axes de refondation de l’Etat malien. Pour cause, le Mali d’aujourd’hui n’est plus celui de grand-père dans un contexte hyperconnecté, bien qu’agité par la crise sécuritaire et territorial. L’émergence des nouveaux acteurs dans ce contexte décentralisé et démocratisé exige une réformation de l’Etat, donc une réorganisation territorial en conséquence. Objectif : mieux intégrer les approches et choix politiques, économiques, sociaux et culturels des territoires.
Selon le gouvernement, «les exigences liées au développement local en mode décentralisé et la crise multidimensionnelle de 2012 ont montré les limites de l’organisation actuelle du territoire notamment :
– l’étendue de certaines régions ;
– la non-effectivité de la création et de l’organisation des services publics suivant les trois niveaux de déconcentration ;
– les difficultés pour les représentants de l’Etat d’assurer leur mission de contrôle dans leur ressort territorial ;
– l’augmentation et la complexité des questions politiques, économiques et sociales ;
– les difficultés de conception de schémas opérationnels d’aménagement du territoire.
Dans ce contexte, il est proposé de soumettre les avant-projets de texte relatifs à la réorganisation du territoire à l’examen de conférences régionales ».
L’argumentaire emporte-t-il l’adhésion commune ?

L’accusation
Si on peut difficilement contester son bien fondé et le choix de la régionalisation qui découle de la volonté du gouvernement d’approfondir le processus de décentralisation, beaucoup font grief au régime du président IBK que sa mise à l’ordre du jour soit étroitement lié à la volonté de prendre en compte les revendications identitaires, ethniques et régionalistes à travers l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. Accord qui scelle une longue suite d’irrédentisme qui reste comme une écharde dans la blessure d’une nation qui se veut une et indivisible.
Le «statut particulier » des régions du nord ériges des collectivités territoriales, depuis l’accord de Tamanrasset et le Pacte national, repris par l’Accord d’Alger du 04 Juillet 2006 et l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger a toujours du mal à passer dans la chapelle hyper-nationaliste. Pour faire passer la pilule, on a généralisé les bénéfices des accord pour étendre la décentralisation et la régionalisation à toutes les régions du Mali. Mais cela suffit-ils dès lors qu’on sait que la régionalisation est censée apporter la solution aux revendications autonomistes ?
Beaucoup de Maliens doutent que les réformes préconisées (décentralisation poussée et régionalisation)par l’Accord puissent être les solutions aux velléités autonomistes.
Beaucoup de Maliens, tout en adhérant à la régionalisation la considèrent juste comme un choix opéré lors des pourparlers de paix et de réconciliation d’Alger ou un choix imposé de l’extérieur, pour résoudre la crise du Nord, alors que d’autres pensent carrément qu’elle ne conduise à une partition du pays. Dans certains propos, on retrouve les deux considérations.
Pour ce groupe de Maliens «la régionalisation est un dispositif nécessaire pour le développement du pays, à condition qu’elle soit bien réfléchie et bien menée. Malheureusement, la régionalisation qui nous est proposée, est motivée par la pression des groupes armés Touaregs et Arabes séparatistes soutenues par des puissances extérieures. La décentralisation qui l’a précédée à partir des années 1990 a été aussi impulsée par les mêmes communautés. C’est ce qui nous met dans un état de questionnement : est-ce que la régionalisation en cours est une véritable demande des populations ? Est-elle le fruit d’une réflexion raisonnée des autorités du Mali ?
La réponse est aisée : il s’agit pour cette opinion d’une régionalisation imposée par les velléités indépendantistes de certains groupes Touareg et Arabes, qui acceptent mal l’autorité de l’Etat à Bamako. Ils estiment donc que la mise en avant des spécificités géographiques, socio-économiques, culturelles et historiques des régions du Nord que certains appellent Azawad, cachent à peine le Régionalisme ou Fédéralisme que l’on veut dissimuler sous le vocable Régionalisation.
les plus modérés estiment que si la régionalisation est appliquée dans un Etat fort (bien structuré, bien organisé, qui fonctionne bien), c’est une bonne chose, mais c’est une mauvaise chose quand l’Etat est faible, comme c’est notre cas aujourd’hui. Un Etat déliquescent ne peut pas conduire une bonne régionalisation. Il y a des risques que la nation éclate. D’où toutes les critiques de l’opposition qui estime qu’elle est une menace de partition du pays.
Pour le citoyen lambda, chat échaudée craignant l’eau froide, la régionalisation envisagée ne peut susciter inspire méfiance parce qu’elle peut donner lieu à une fracture sociale. Dans la rue, on n’hésite pas à dire que ceux qui ont réclamé l’autonomie avec des armes, l’ont obtenue avec la régionalisation. Or, estime-t-on, il y a des secteurs qui doivent être uniquement réservés à l’Etat : sécurité, éducation, santé, exploitation des ressources minières…
Dans cette trompette soufflent beaucoup d’intellectuels qui disent sous cape que la régionalisation va favoriser les tendances centrifuges ; les populations vont revendiquer les terres et les ressources naturelles. Les gouvernements régionaux ne vont pas développer les communes. La question de la représentativité se posera, car certains groupes ne seront pas représentés. Il y a un risque de conflits au niveau des régions. Ceci n’est pas conforme à la Constitution. Avant d’accuser certaines puissances d’encourager cet désordre pour leurs intérêts, pour exploiter les ressources. Bref pour eux, la régionalisation actuelle menaçant les acquis de notre peuple, à savoir l’intégrité territoriale, l’unité nationale, ils proposent de revenir à ce que nous avons depuis longtemps : la décentralisation au niveau de la commune.
Pour les critiques émises, la régionalisation telle que préconisée n’a pas été mûrie par le peuple malien, conçue par le peuple malien, mais imposée par un accord. Or tout ce qui est imposé a des conséquences désastreuses, parce qu’il n’a pas été bien préparé. Ensuite, le Mali est dans un processus de décentralisation qui couvre une vingtaine d’années. Il aurait fallu d’abord faire l’évaluation de ce processus de décentralisation, voir ses forces et ses faiblesses et décider si on pouvait passer à la régionalisation. La régionalisation proposée a tendance à être du régionalisme.
Oubliant que plusieurs consultations ont été faite depuis la crise multidimensionnelle de 2012, certains tranchent : aller à un accord qui demande la régionalisation, alors que le peuple malien n’est pas outillé, risque de provoquer l’émiettement total de l’Etat.
En conclusion, l’opposition et plusieurs Maliens qui rejettent la reforment estiment que si la régionalisation était une étape de renforcement du processus de décentralisation où l’Etat serait toujours présent pour jouer son rôle a priori et non a posteriori, l’expérience pouvait être tenté. Or, tel est loin d’être le cas. D’où la conclusion qu’ils prêtent à Tiébilé Dramé : «les «concertations régionales» annoncées par le Gouvernement sont une fuite en avant. Les délais trop courts, l’effervescence dans tout le pays ne sont pas propices à la tenue d’assises fécondes. Le projet doit être retiré. C’est une provocation ».
En d’autres termes, les réformes sont bien nécessaires, mais la priorité aujourd’hui est de régler les problèmes sécuritaires, ramener la paix et la stabilité. Après, on fait une évaluation pour savoir si on doit y aller. Mais, un Etat qui s’engage dans une réforme qui risque de lui faire perdre certaines fonctions régaliennes, ceci n’est pas acceptable.

La défense
Contre ses réserves véhémentes qui frisent souvent le déni, les responsables tentent par la pédagogie de tempérer les passions en vue d’obtenir une large convergence autour du projet.
Pour un ministre de la République, dans le processus de décentralisation, il y a deux portes d’entrée : la première étant la communalisation qui aboutit à la création des communes qui sont les échelons les plus proches et qui s’occupent des services de proximité les plus élémentaires ; la seconde étant la régionalisation qui se distingue de la première à cause essentiellement de son enjeu économique. La politique d’organisation territoriale du Mali ne date d’aujourd’hui.
La conférence nationale de 1991, la décentralisation initié depuis 1992, les états généraux de la décentralisation et la rencontre organisée par l’Association des Municipalités du Mali, tous les forums, état-généraux et rencontres organisés depuis la crise ont demandé la mise en œuvre effective de la décentralisation à travers la régionalisation.

Les défenseurs de la réforme, martèlent que la régionalisation est une réforme incontournable contrairement à ceux qui écartent la régionalisation parce qu’elle serait imposée par l’accord de paix et de réconciliation. Pour donner raison à l’ancien Premier ministre Moussa Mara, ils disent que le concept de régionalisation n’est pas utilisé une seule fois dans l’accord. Le mot a été évoqué lors des états généraux de la décentralisation comme réponse à la crise institutionnelle. Donc le régime n’invente rien. En écoutant les critiques, on a l’impression que la réforme est rêvée et imposé de manière unilatérale arrive de manière précipitée. Or, elle est la résultante de l’évolution normale des structures administratives
Rassemblés par la Rédaction

Source: info-matin

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