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DECADENCE CULTURELLE AU MALI D’AUJOURD’HUI : Les hommes de culture, de véritables bourreaux de la société

La décadence des sociétés maliennes reste tributaire de plusieurs paramètres et la culture à une grande responsabilité à jouer dedans. Les hommes de culture censés être les véritables garants des valeurs de la société et notamment de l’éducation des jeunes générations, portent eux-mêmes un coup dur à cette mission qui leur est confiée. La culture ne remplit dès lors plus sa mission de véhicule de messages instructifs, elle devient de plus en plus nocive pour l’avenir de toute la nation. Il est alors temps de tirer la sonnette d’alarme afin de sauver ce qui pourrait l’être pendant qu’il est encore temps.

La dégénérescence au Mali ne se limite nullement à un seul domaine de la vie de la nation. Nous avons l’impression que tous les secteurs perdent de plus en plus leur quintessence dans ce pays. Les domaines sur lesquels nous ne pouvions que compter deviennent de plus en plus méconnaissables à travers les hommes censés faire sa promotion pour assurer tout son épanouissement. On dirait qu’au lieu d’aller de l’avant, le Mali se trouve désormais dans une posture de reculade dans l’âge de la pierre polie.

La culture, cette représentation des valeurs de nos sociétés, est divertie de sa vocation première qui n’est autre que d’instaurer un changement positif au sein de nos communautés, à travers ses membres. Les hommes de culture, ceux-là qui sont censés sauvegarder les valeurs de nos sociétés, constituent ainsi ses véritables ennemis, pour être encore plus dur, ses bourreaux. Si jadis le Mali a rayonné au-dessus de maintes civilisations, sollicité parmi tant d’autres pays pour sa richesse culturelle, de nos jours, ce pays serait mis à l’écart pour sa médiocrité culturelle. Comme le changement est consommé négativement ! Les universités maliennes fleurissaient dans les années d’indépendance par-dessus toutes celles de la sous-région. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les étudiants burkinabè ne connaissaient que le Mali comme pays de grande culture.

Les intellectuels maliens étaient sollicités dans tous les pays de la sous-région pour leur grande culture. S’il est vrai en général que l’Afrique est héritière de la tradition orale, il faudrait quand même reconnaitre, qu’au Mali, les écrivains ont su s’imposer grâce à des maisons d’édition de qualité. Ces écrits véhiculaient le vécu des sociétés maliennes au jour le jour. Dans le même ordre d’idées, on se trouvait du plaisir à visionner les théâtres maliens pour leur qualité, ainsi que leur présence dans la vie quotidienne. Tout comme les romans, ils étaient le « miroir de la société » dont ils dépeignaient les maux. À travers les écrits et les dramaturgies, la nation malienne avait su s’imposer à travers le monde. Les œuvres issues de ce pays étaient sollicitées de part et d’autre le monde parce qu’elles nous permettaient de découvrir ce pays.

Ce n’est pas fortuit si Le devoir de Violence de Yambo Ouologuem a été lauréat en 1968 du prix Renaudot. Cela témoigne de sa grande qualité. Qui douterait de la valeur de Sous de l’Orage de Seydou Badian Kouyaté si nous savons qu’il s’agit d’un roman qui dépeint la problématique du mariage forcé dans nos communautés. Qu’en est-il également des œuvres de ces dramaturges comme Balla Moussa Kéita, Habib Dembélé dit Guimba national, etc. à travers des pièces de théâtre comme « Député », « Fiyen », Ferekegnamibougou, etc. Des œuvres teintées d’une véritable valeur éducative pour les jeunes générations, mais aussi pour les adultes.

N’oublions pas les artistes. À travers leur chanson, ceux-ci contribuaient à la construction d’une société plus solide en essayant nuit et jour de renouer le tissu social. Ils se savaient être en mission de la nation. C’est la raison pour laquelle, cette corporation n’était pas étendue à toutes les couches sociales. Le Mali, de nos jours, n’est plus à ce stade, la culture devenant une acculturation parce que ne servant qu’à désapprendre. Les dramaturges maliens ont transformé le théâtre en comédie n’ayant ni tête ni queue. Les enfants sont emportés dans leur divertissement. Les langages sont teintés de galimatias.

Le transformationnisme est en œuvre. L’enfance étant généralement considérée comme l’âge de la déraison, les enfants ne s’adonnent qu’à des imitations folles, parce que considérant le contenu des messages de ces comédiens comme des réalités palpables. Ces comédiens sont en grande partie responsables de la détérioration du niveau scolaire de nos élèves, à travers l’usage détériorant qu’ils font du français, langue administrative du Mali.

Aux comédiens, il faudrait ajouter également les artistes ou plutôt les rappeurs. À cause de ceux-ci, nos jeunes se plaisent nus dans les rues. On a l’impression de voir la naissance d’une forme de « naturalisme » au Mali. Partant, la consommation des excitants devient une attitude d’élégance.

En ce qui concerne le domaine de l’écriture, que de désespoir ! Les cages des librairies sont pleines de romans entachés de fautes, avec des thématiques sens dessus-dessous et pourtant provenant de maisons d’édition de la place. L’étude par les enfants de ces livres provenant d’étudiants dans un pays où le niveau éducatif laisse à désirer, ne peut que contribuer à son tour à sacrifier leur niveau lorsqu’ils prendront ces billevesées pour de l’argent comptant. Les hommes de la culture deviennent les véritables bourreaux de leur métier. Ce faisant, rares sont les étrangers qui sollicitent les œuvres maliennes. On dirait d’ailleurs qu’en matière de dramaturgie, c’est le Nigéria qui supplante le Mali, tellement tombé bas que si des solutions sereines ne sont pas trouvées, la récupération sera difficile.

Néanmoins, il convient de comprendre qu’en matière de littérature, il y a les œuvres de certains de ces jeunes qui méritent toutes les attentions, parce que restant toujours sur la vraie voie. Nous pensons notamment à Boubacar Sangaré à travers son livre Être étudiant au Mali : chronique d’une vie d’étudiant. Un tapuscrit qui dépeint les tares de l’espace universitaire malien. Une œuvre comme celle-ci ne peut que nous apprendre de belles choses sur les coulisses de certains lieux du Mali.

Que les hommes de culture comprennent qu’ils sont au service de toute la nation et du monde entier ! Cela est nécessaire pour le développement du Mali.

Fousseni TOGOLA

Source: Le Pays

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