Depuis l’arrestation des anciens ministres, Soumeylou Boubeye Maiga et Fily Sissoko, par la cour suprême du Mali, le 26 août dernier, les magistrats n’arrivent pas à s’entendre. Alors que d’autres tentent d’approuver la véracité de la procédure de l’auto saisine enclenchée par la cour pour le jugement du dossier « d’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires », l’AMPP et la REFSYMA répliquent avec force en défiant les soutiens de la cour.
Après avoir assisté à des constatations liées au premier communiqué, l’association malienne des procureurs et poursuivants (AMPP) et la référence syndicale des magistrats (REFSYMA) répliquent avec force. Elles disent être désolées de voir le pays sombrer dans un chaos juridique par « la faute des premiers responsables de la cour suprême ».Dans cette déclaration où elles disent répliquer en soutien à la celle du 26 août, l’AMPP et la REFSYMA manifestent leur refus de cautionner « une quelconque entreprise anticonstitutionnelle portée par les premiers responsables de la cour ».Les deux syndicats annoncent, via cette déclaration publiée le 30 août, vouloir répliquer « aux contrevérités et incongruités » portées sur les réseaux sociaux par des « pseudos doctrinaires » pour semer la confusion au sein de l’opinion publique. Pour les syndicalistes, l’auto saisine du dossier dit « achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires » par la plus haute juridiction est une cause perdue. Parce que les arguments avancés pour justifier la démarche ne tiennent pas juridiquement, selon eux. Aux soutiens de la cour suprême, l’AMPP et la REFSYMA mettent tout le monde au défi : « Qu’au dépourvu de trouver une seule disposition justifiant l’intervention musclée d’un organe constitutionnel (cour suprême), dans le domaine d’un autre de même rang (Haute cour de justice), au mépris de la constitution et de la loi organique ». Sur la base des arguments juridiques, elles rétorquent que l’auto saisine de la cour est « irrégulière et non prévue dans un aucun texte, y compris ceux auxquels les soutiens de la cour font allusion, à savoir : l’article 1 du protocole additionnel de la CEDEAO ; l’article 206 de la loi organique de la cour suprême ; les articles 613 et 616 du code de procédure pénale ». Dans cette déclaration, les syndicalistes ont, de façon claire, expliqué chacun de ces textes pour dire qu’ils ne peuvent aucunement être mis en avant pour justifier cette auto saisine.
Suivant leurs mots, les dispositions de l’alinéa 2 du paragraphe h de l’article 1er du protocole additionnel A/SP1/12/01 de la CEDEAO, portant sur la démocratie et la bonne gouvernance auxquelles certains se fondent pour défendre la cour suprême « n’ont rien à voir avec les digressions qu’on leur prête ».Ainsi, l’article 206 de la loi organique de la cour suprême, applicable au seul cas de renvoi d’une juridiction à une autre, toutes relevant de l’autorité de ladite cour, ne saurait être mis à profit pour, arguent-ils, justifier des « atteintes(auto saisine) aussi graves à la constitution de 1992 ». En clair, l’AMPP et la REFSYMA signent et persistent que la cour suprême « viole sans équivoque la constitution du Mali, quand elle se fonde sur des considérations à des fins populistes et partisanes portées par la rue et les réseaux sociaux, en se servant de l’article 206 de sa propre loi organique, pour passer le rôle de l’Assemblée nationale dans le fonctionnement de la Haute cour de justice, à savoir : la mise en accusation qui est le seul point de départ de toute son intervention dans ce domaine ». En l’absence de toute résolution de mise en accusation de l’hémicycle composée des élus nationaux, aucune considération ne saurait justifier cette intervention de la cour suprême, dans le dossier dit « achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires », pour l’arrestation des deux ministres du pays, soulignent ces connaisseurs de droit. Aussi, les articles 613 et 616 du code de la procédure pénale ne peuvent nullement être mis en avant pour justifier « la substitution de la cour suprême à la Haute cour de justice », confient ces syndicalistes qui précisent : « Cette démarche procède de la méconnaissance totale de la hiérarchie des normes juridiques et les dispositions d’une loi ordinaire telles que celles du code de procédure pénales ». « L’AMPP et la REFSYMA se donnent le droit de ne pas consommer des démarches traduisant une tendance au Gouvernement des juges ». En tout état de cause, les deux corporations dénoncent «l’irrégularité de la procédure de la cour suprême », et maintiennent leurs positions en défiant quiconque d’apporter des arguments juridiques pour justifier l’arrestation des deux ministres sans passer par l’Assemblée nationale.
Mamadou Diarra
Source: LE PAYS