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De vous à moi : Les questions orales face à la question morale

BOCARI TRETA SUR L’AGRICULTURE, SADA SAMAKE SUR LA SECURITE !

oumar mariko depute assemblee nationale sadi

On ne peut pas dire que les séances de questions orales hier étaient décalées de l’actualité et loin des préoccupations citoyennes du moment. Surtout que l’interpellateur du jour n’était autre que le bombardier Oumar Mariko, député élu à Kolondiéba. Ce cercle est situé dans le Sud cotonnier grand consommateur d’intrants agricoles -le buzz du moment à cause de l’affaire dite de l’engrais frelaté-. D’ailleurs quarante-huit heures avant la séance d’hier, le Parena  avait publié un mémorandum fouillé sur le sujet. Concernant la sécurité, Fakola, une localité de Kolondiéba vient de subir après Nara et Misseni  une attaque jihadiste revendiquée depuis par Ansardine d’Iyad Ag Ali. Sans compter les braquages dans la capitale et les récents événements dans les régions de Mopti et de Ségou. Et sans compter ce qu’on apprendra le jeudi même concernant Douentza et Goundam, pour ne pas aller plus loin dans l’évocation de ce qui devient une routine du sang et de la peur.

SUR L’AGRICULTURE, LES DEBATS ONT-ILS EU UNE VALEUR AJOUTEE ?  A vrai dire non. Les questions du député sur l’affaire de l’engrais ont été très générales. Or, elles auraient pu être plus pointues et plus précises afin d’amener le ministre à y répondre de manière plus concise. Tréta n’a pas été en grande difficulté en tout cas sur la question de l’engrais. Sauf qu’ayant épuisé son temps de parole, il n’a pu relever des points soulevés par le député et qui sont d’une grave importance. Le ministre n’a pas eu le temps de nous dire si l’engrais comporte des substances nuisibles à la santé comme le plomb et le chrome ainsi que Mariko le lui a demandé. Il n’a pas eu non plus le temps de nous édifier sur ce que son interpellateur qualifie de fractionnement du marché. C’est donc un Mariko faisant un usage rationnel de son temps de parole qui a enfoncé le clou en concluant que le marché des intrants est géré par une association de malfaiteurs à travers des Gie dont au moins un devrait être dissous ! Même sur ce qui nous paraissait être un acquis grâce à la communication du Pdg de la Cmdt à savoir que l’engrais frelaté n’existe pas, le ministre n’a pas cru devoir percuter. Au contraire, il a dit que le Mali n’importe pas d’engrais frelaté…

SUR LA SECURITE AUSSI, UN SENTIMENT DE DEJA ENTENDU. Pas de crise de pièce d’identité, le gouvernement fait des choses contre l’insécurité mais le serviteur loyal qu’il est lui Sada Samaké ne peut pas violer le secret –défense ! La ligne de défense classique pour celui qui est devenu et l’a rappelé un abonné des questions orales. De la part du même Oumar Mariko à chaque fois. C’est en souriant que Sada Samaké a décoché ses flèches mortelles, en traitant le député de spécialiste « de l’amalgame et de l’agitation stérile », de putschiste impénitent qui est dans des manœuvres subversives y compris au sein des forces de la police nationale. « Vous êtes à l’hémicycle aujourd’hui » mais quant aux policiers que le ministre accuse le député de manipuler « ils sont eux en prison ». L’ancien leader de l’Aeem ne s’est pas fait prier pour répondre. « Je suis avec mon peuple et Dieu » pour ceux qui pourraient lui reprocher de « trahir » la majorité présidentielle dont il est membre. Il s’est insurgé contre ce qui lui paraît être une privatisation rampante de l’Etat et ne s’est pas gêné de dire qu’en 1991 Sada Samaké n’était pas du côté du mouvement démocratique.

ET LA MORALE DE TOUT CA ? Les peuples n’ont que les institutions et les dirigeants qu’ils méritent, dit-on souvent. Mais même sachant cela, le spectacle d’hier avait de quoi heurter. Mariko a publiquement révélé que le jour de la Dpg du Premier ministre –le lendemain de l’attaque de Misséni- il a alerté le chef du gouvernement sur les manœuvres des assaillants qui se « dirigeaient sur Kolondiéba ». Et il y a eu une attaque dans ce Cercle. En outre, Sada Samaké donne l’impression que la sécurité est l’affaire du seul gouvernement. Non, la sécurité est l’affaire de tous les citoyens. A fortiori quand il s’agit de jihadisme. Voyons ce qui se passe ailleurs. En France, il est impensable que le ministre en charge ne s’adresse pas aux citoyens en cas d’attaque terroristes. En Tunisie, à plusieurs reprises, le ministre de l’intérieur a pris la parole pour édifier ses compatriotes sur les derniers événements de Sousse. La communication pour rassurer n’est pas une violation du secret-défense. C’est, au contraire, une exigence en démocratie. Et elle peut se faire sans indiquer le nombre de roquettes ou la localisation des caches d’armes.  Deux mots pour terminer. Sada Samaké a la bonne excuse que la sécurité ne dépend pas que de son seul département. La preuve est qu’il a par deux fois salué le
travail des soldats maliens. Au nom se son homologue de la Défense sans doute. Celui-ci était dans  la salle pourtant. Morale? Les temps graves que nous traversons impliquent peut être une autre architecture institutionnelle. Enfin pour la nième fois se pose la question, non du  langage mais de la langue. Combien de nos compatriotes peuvent-ils suivre ces débats en français? Pourquoi le bamanan doit-il être traduit en français? En Turquie c’est le turc  En Éthiopie l’amharic et le swahili en Tanzanie. Il est urgent de questionner certains de nos choix.

Adam Thiam

Source: Autre presse

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