Les acteurs culturels, à travers leurs associations faîtières, notamment, la Fédération nationale des artistes du Mali (FEDAMA), l’Union des associations d’artistes, de producteur et d’éditeur du Mali (UAAPPREM) et le Réseau des opérateurs culturels Kya, ont décidé de se coaliser pour contribuer, à la prévention et à la lutte contre la pandémie du Coronavirus.
Dans ce cadre, ils ont mis en place cette plateforme « Culture Contre Coronavirus » ou CCC pour présenter toutes les actions qui seront menées dans cette campagne, sans particulariser telle ou telle structure.
Vive la synergie des acteurs culturels ! Abou Guiteye de Bama’Art a mis gratuitement un camion équipé pour une caravane qui va sillonner Bamako. Barou Diallo a mis son studio aussi à disposition ; Djelimady Sissoko travaille à l’arrangement de quelques chansons, Fousseyne Diakité a créé le logo ; certains artistes ont prêté leur image dans le cadre de la production de petites vidéos ; notamment Master Soumy, Diamy Sacko, Alima Togola, Vieux Farka, Calibre 27, ATT Junior, entre autres.
Une autre initiative a permis, à travers le Fonds Maaya, de lancer le Fonds d’urgence de solidarité (FUSA) destiné à soutenir 100 artistes pendant la gestion de la pandémie.
Ainsi ce sont presque tous les artistes qui évoluent dans le domaine des arts vivants qui se sont lancés dans la production de vidéos. Qu’ils soient marionnettistes ou danseurs, ils redoublent de créativité pour faire passer le message. La compagnie bamakoise Don Sen Folo a ainsi inventé une chorégraphie silencieuse des mains et des corps plus forte que les mots.
Depuis Paris, le célèbre claviériste et arrangeur malien, Cheick Tidiane Seck, dont le concert était prévu en ouverture du Cully Jazz Festival 2020, affirme occuper son temps entre prières et musique : «Si ce virus s’étend chez nous, on sait que cela va être l’hécatombe. C’est pourquoi nous nous sommes immédiatement impliqués».
Quant à Alioune Ifra Ndiaye, le directeur du complexe culturel BlonBa, et président de la Fedama, il explique que dans une société de tradition orale, où l’écriture n’a que très peu d’impact, la sensibilisation doit passer par des morceaux de musiques, et des saynettes».
Pourtant, poursuit-il, les artistes sont touchés de plein fouet par la crise : « il n’y a plus ni tournée internationale, ni spectacle dans les centres artistiques, ni maquis, ni mariages ni baptêmes, autrement dit le chômage immédiat à 100%». La Fedama a envoyé une lettre ouverte au président de la République, par l’intermédiaire du ministère de la Culture pour alerter sur l’urgence de trouver une solution. Même si Alioune Ifra Ndiaye est très conscient que les membres de sa profession ne sont pas prioritaires pour l’Etat malien, il estime qu’il faut tirer la sonnette d’alarme pour trouver une solution ensemble à cette crise.
Ce qui n’empêche pas la Fedama de coordonner gratuitement l’autre front de la lutte à travers le label Culture Contre Corona Virus (CCC).
«Les artistes prennent de plus en plus le relais du griot traditionnel dans ses fonctions de messager et de facteur de cohésion sociale. Ils articulent des informations complexes dans des messages plus simples, plus compréhensibles», poursuit Alioune Ifra Ndiaye. Et comme le Mali est un pays où l’usage de Facebook et whatsapp est très répandu, c’est sur la page Facebook de la fédération que les vidéos des artistes s’exprimant sur les dangers de la pandémie sont centralisées.
Comme partout dans le monde, les plus jeunes préfèrent Youtube et Instagram. A côté des chanteurs populaires, ce sont les rappeurs et les youtubeurs qui sont le plus visibles. En plus des conseils de prévention sanitaire, plusieurs d’entre eux luttent contre les fausses croyances, transmises de bouche à oreille et les fake news virales.
Le « journal rappé » de Xuman et Keti propose aux 165 mille abonnés de leur chaîne deux séquences Corona. Dans la première on peut les entendre rapper «Mais bien pire que le corona, il y a la connerie virus / Faisons gaffe aux fake news que certains réseaux diffusent / Bien réelle est la pandémie / Même s’il y en a qui la nient.»
Source : L’ESSOR