La Banque mondiale prévoit une chute à 4% de la croissance des économies africaines cette année
L’économiste en chef de la Banque mondiale, Francisco Ferreira, et l’économiste principale pour la région Afrique, Mme Punan Chuchan, ont animé lundi après-midi une conférence de presse par vidéoconférence à l’intention des journalistes africains depuis le siège de l’institution à Washington. L’institution financière internationale désirait expliquer au public africain, le contenu de son rapport 2015, dénommé « Africa’s Pulse 2015 » et consacré à la situation économique et financière du continent.
Dans son exposé liminaire, Francisco Ferreira, a annoncé un repli d’un demi-point du taux de croissance en Afrique subsaharienne qui va se situer, cette année, autour de 4% contre 4,5% en 2014. Cette baisse est imputable, de son point de vue, à la chute des cours du pétrole et d’autres matières premières. Selon les projections, en 2015, la croissance sera inférieure à la moyenne de 4,4 % enregistrée en Afrique subsaharienne au cours des deux dernières décennies. Ces chiffres, note l’expert, sont bien loin du pic de croissance de 6,4 % enregistré au cours des années 2002 à 2008.
En effet, développera-t-il, la baisse des cours du pétrole a dégradé les termes de l’échange de la plupart des pays africains notamment ceux qui produisent l’or noir et s’étend à d’autres matières premières. « L’Afrique subsaharienne reste un exportateur net de matières premières. Le pétrole est la matière première la plus commercialisée de la région, suivi par l’or et du gaz naturel », confirme le rapport.
Pour l’économiste principale pour la région Afrique, Mme Punan Chuchan, du fait de la grande diversité économique du continent, l’impact de la baisse des cours des matières premières sera variable selon les pays, même parmi les Etats producteurs de pétrole. « Au Nigéria, par exemple, si l’économie sera affectée cette année, la croissance devrait repartir en 2016 et au-delà », assure-t-elle, ajoutant que la diversification de l’économie, en particulier le secteur des services, devrait, en effet, tirer la croissance. En revanche, les pays exportateurs de pétrole à l’économie moins diversifiée, comme l’Angola ou la Guinée équatoriale, devraient souffrir plus durablement de la faiblesse des cours de l’or noir. Plusieurs pays importateurs de pétrole, comme la Côte d’Ivoire, le Kenya et le Sénégal, vont, pour leur part, conserver une croissance forte.
Les experts de la Banque mondiale ont également évalué l’impact de l’épidémie d’Ébola dans les pays touchés et des menaces sur la sécurité liés à Boko Haram, Shebab, Mujao, Aqmi et d’autres groupes terroristes. « Ces derniers constituent un risque sécuritaire qui pourrait remettre en cause les acquis de développement. En outre, l’épidémie de virus Ebola a souligné les faiblesses structurelles des systèmes de santé de la Guinée, du Libéria et de la Sierra Leone qui ont été les plus affectés, mais également d’autres pays. Bien que des progrès importants aient été réalisés pour contenir l’épidémie d’Ebola, on ne pourra pas crier victoire tant qu’il n’y aura de nouvelles personnes contaminées », avertissent-ils en ajoutant qu’une étude de Banque mondiale de janvier dernier, estimait que les pertes économiques devraient s’élever à au moins 1,6 milliard de dollars pour les trois pays les plus durement frappés (Guinée, Sierra Leone et Libéria).
Selon l’économiste en chef de l’institution financière internationale, les pays africains qui connaissent la croissance la plus rapide au monde sont la Sierra Leone, le Niger, la Côte d’Ivoire, le Libéria, l’Ethiopie, le Burkina Faso et le Rwanda. Ces pays, selon le rapport « Africa’s Pulse », ont enregistré une croissance économique supérieure à celle de la Chine, du Mozambique, de la Zambie et du Ghana et meilleure que la croissance que connaît l’Inde. Ce nouveau rapport prédit également que les perspectives de croissance à moyen terme resteront robustes et seront soutenues par une économie mondiale en constante amélioration.
Pour Mme Punan Chuchan, les évolutions structurelles n’ont pas été au rendez-vous des progrès économiques des 20 dernières années en Afrique. Ainsi, la majorité des emplois sur le continent restent agricoles avec un faible développement du secteur industriel et manufacturier.
Elle rappelle que l’extraction de ressources naturelles et le secteur des services soutiennent la croissance africaine. Mais la contribution de la production industrielle et agricole à la croissance baisse. La plupart des travailleurs et 80% des populations les plus démunies tirent l’essentiel de leurs revenus de l’agriculture vivrière. D’où la nécessité d’investir davantage dans le développement des économies locales et les emplois en zone rurale afin d’améliorer l’offre de biens et services dans les secteurs de l’éducation, la santé, le transport, l’énergie et les technologies de l’information et de la communication.
D. DJIRE
source : L Essor