180 de nos compatriotes sur les 720 actuellement basés à Douala ont été accueillis dimanche à l’aube à l’aéroport de Bamako-Sénou
Le conflit intercommunautaire enclenché en décembre 2013 en République centrafricaine entre les milices de la Seleka à majorité musulmane et fidèles au président Michel Djotodia, à des groupes d’auto-défense chrétiens, probablement soutenus par d’anciens militaires des Forces armées centrafricaines proches du président renversé François Bozizé continuent à faire son lot de déplacés et de réfugiés. Notamment dans les pays proches de la République Centrafricaine (Tchad, République du Congo et Cameroun).
Au nombre de ces réfugiés, figurent de milliers de nos compatriotes. Sur les approximativement 3000 Maliens vivant sur le sol centrafricain, un millier ayant eu la chance d’échapper aux exactions, viols, pillages et tueries contre les civils, musulmans et chrétiens ont été déjà rapatriés sur Bamako (voir l’Essor des 8, 9 et 16 janvier 2014). Ils sont encore nombreux, ceux qui ont trouvé refuge dans certains pays voisins comme le Cameroun et le Tchad. C’est ainsi 720 de nos compatriotes ayant trouvé refuge à Douala, ont exprimé volontairement le besoin de rentrer au bercail. Le gouvernement en partenariat avec l’Organisation internationale des migrations (OIM) a mis en place, un pont aérien (4 vols charters) pour rapatrier ces compatriotes réfugiés au Cameroun.
Le premier convoi de ce rapatriement (180 passagers) est arrivé dimanche à Bamako. Annoncé pour 2h 45, ensuite 3h30 du matin, ce n’est finalement qu’à 5h20 que le vol, un Boeing, d’une compagnie italienne transportant nos compatriotes s’est posé sur le tarmac de Bamako-Sénou. Le retard pris par le vol serait dû à des pluies diluviennes qui tombaient sur Douala, selon une source.
Une fillette dans les bras, le Dr Moussa Balla Diakité, notre consul général au Cameroun est le premier à descendre de l’appareil. C’est lui qui conduisait la délégation. « Cette opération a été rendue possible grâce à notre gouvernement qui a été aidé par son partenaire, OIM. Je dois saluer aussi l’appui que les autorités camerounaises nous ont apporté », s’est réjoui notre consul général au Cameroun.
« Nos compatriotes sont arrivés sur le sol camerounais par la frontière à 900 kilomètres de Douala. Après nous les avons convoyés jusqu’à Douala, hébergés pour enfin les acheminer aujourd’hui à Bamako », témoigne le Dr Moussa Balla Diakité. Il a salué la grande implication, la grande solidarité de nos compatriotes du Cameroun ainsi que ceux vivant en Guinée Equatoriale en faveur de nos concitoyens.
« Ils sont encore plusieurs milliers de Maliens vivant en Centrafrique, mais ceux là étaient dans les villes plus proches des frontières camerounaises entre 100 et 150 kilomètres, c’est ce qui a rendu possible leur rapatriement. D’autres sont dans des localités situées surtout du côté de la frontière soudanaise. Tous les jours nous recevons leurs cris de détresse. Les autorités de Bamako sont informées. Je crois que des efforts sont en cours pour faire revenir l’ensemble de nos compatriotes qui sont dans des situations difficiles en Centrafrique », a expliqué Dr Moussa Balla Diakité. Ce contingent est pour la majorité constitué des femmes, quelques jeunes et des enfants.
Modibo Yattassaye, 28 ans, né en Centrafrique figure parmi ceux-ci. « C’est ma première fois de venir au Mali. Je viens de la Centrafrique de la province Brouda. Ils ne voulaient pas nous voir, nous les musulmans. Nous avons trop vécu la mort. Quand on voyait la manière dont ils tuaient les gens, ça fait très mal mon frère. Nous, nous avons eu la chance de fuir jusqu’à la frontière et l’ambassadeur nous a évacués jusqu’à Douala », explique Modibo Yattassaye qui jure de ne plus vouloir retourner en Centrafrique.
« Je veux rester ici au Mali pour pratiquer le commerce », souhaite le jeune qui partage la même douleur que beaucoup d’entre nos compatriotes ayant vécu une situation désespérée, traversé beaucoup de difficultés et même sacrifié le fruit de plusieurs années de labeurs pour sauver leur vie et rejoindre le bercail.
Que peut faire le gouvernement pour ces gens ? La réponse a été donnée par le secrétaire général du ministère des Maliens de l’extérieur, Mamady Traoré venu à l’accueil. « Dans des cas comme ça il n’y a pas question de dédommagement, parce que ce sont des gens qui ont perdu leurs biens en dehors du territoire malien. Même en RCA, c’est une situation exceptionnelle, mais ce que le gouvernement peut faire, dès qu’ils seront installés ici, c’est de les accompagner pour les réinsérer dans les activités économiques. Ceux qui ont un métier pourront être appuyés. Ceux qui ont des initiatives d’investissements, pourront aussi être accompagnés. Mais dans des situations de crise généralisée comme ça, on ne peut pas parler de dédommagement uniquement pour les Maliens. Ce sont des milliers de gens qui ont été victimes. Je pense que les gens comprendront », a expliqué Mamady Traoré. Il a rendu hommage à notre ambassadeur à Libreville et notre consul à Douala, les deux principaux artisans de ce rapatriement.
Le coordinateur régional de l’OIM, Stefano Pes, certains éléments de la protection civile, de la police et de la gendarmerie étaient également à l’arrivée de nos compatriotes. Ces derniers ont été transportés par bus vers le site d’hébergement de la protection civile avant que des dispositions pratiques soient prises pour leur acheminement vers leurs ultimes destinations.
S. TANGARA