« Si le coup d’Etat de 2012 était à refaire, c’est sûr qu’on ne le referait pas ». Ces propos sont de l’ancien directeur de cabinet de l’ex chef de la junte militaire de Kati et auteur du putsch du 22 mars, le Général Moussa Sinko Coulibaly. Cette déclaration de l’ex officier supérieur de l’armée, qui serait radié des rangs de la « Grande muette », lequel fait depuis feu de tout bois sur le régime en place, l’a affirmé toute honte bue, le dimanche 14 janvier, sur le plateau de la chaine de télévision Africable où il était l’invité de l’émission « Invité Polítik » de notre confrère Sékou Tangara. Mea-culpa ou nouvelle tentative de berner les Maliens qui ont de la mémoire ?
En tout cas, ce regret très tardif, et pour le moins peu sincère, de la part de cet officier déserteur, pardon démissionnaire de l’armée, à la fleur de l’âge, ayant choisi de troquer le métier des armes et le treillis contre le manteau politique, vient malheureusement un peu trop tard pour celui qui aspire, sinon qui prétend conduire les destinées du pays. Parce que quoi qu’il pourrait faire croire aux Maliens, cet examen de conscience ne saurait prospérer, à cause de l’attitude immature dont lui et ses compagnons (dont la plupart méditent leur sort dans la prison en entendant l’heure de rendre compte au peuple malien) se sont rendus coupables, en plongeant notre pays dans l’une des plus graves crises qu’il ait connues, en renversant par les armes un régime démocratiquement élu, un 22 mars 2012, un acte qualifié par certains comme le « coup d’Etat militaire le plus stupide au monde ».
Le Général Moussa Sinko Coulibaly, non moins ancien directeur de cabinet de l’ex-chef de la junte de Kati, ayant contribué a plongé le Mali dans le chaos, par leur incompétence à gérer la rébellion au nord du pays a-t-il oublié sa responsabilité pénale (le coup d’Etat étant un crime imprescriptible) dans la mise à terre des Institutions de la République avec toutes ses conséquences désastreuses pour les Maliens ?
En tout état de cause, si sous la transition dirigée par Dioncounda Traoré, Moussa Sinko et ses camarades ont bénéficié d’une complaisante amnistie pour ce qui est du coup d’Etat militaire le plus absurde de l’histoire de notre pays, les Maliens eux, se souviennent encore des horreurs de la bande à Amadou Haya Sanogo sans expérience, mais plutôt soucieuse de leur propre confort que du bien-être de leurs concitoyens et de leurs camarades, au front, dont plusieurs ont payé de leurs vies.
En tentant de se donner bonne conscience, en affirmant que « Si le coup d’Etat de 2012 était à refaire, c’est sûr qu’on ne le referait pas », le Général Sinko oublie que ce peuple a encore de la mémoire, parce que lui et ses anciens compagnons, au lieu d’aider le pays à faire face à une attaque venue de l’extérieur en allant combattre au front, ont choisi de se dresser contre la mère patrie, en renversant un pouvoir démocratiquement élu à quelques encablures des élections auxquelles le Président n’était pas candidat à sa propre succession, contribuant ainsi à déstabiliser le pays tout en livrant, en espace de cinq jours, les 2/3 de son territoire à des narcotrafiquants et bandits de tout genre. Qualifiant l’ex-président déchu, Amadou Toumani Touré, d’incompétent face à la rébellion des indépendantistes du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), ils n’ont cependant pas daigné, ironie du sort, affronter les rebelles du Nord avec leurs alliés islamistes touareg d’Ansar Dine préférant battre en retraite optant de poursuivre le « repli stratégique » entamé par le régime déchu.
Mieux, en déclarant que « Si le coup d’Etat de 2012 était à refaire, c’est sûr qu’on ne le referait pas », le Général Sinko entend-t-il faire amende honorable en faisant croire aux Maliens qu’ils se sont trompés et qu’ils n’ont pas mesuré la gravité de leur acte que le pays tout entier a souffert et continu encore à gérer les conséquences. L’a-t-il fait-il intitu personae ou au nom de la junte ? Parce que de tout ce que Moussa Sinko peut amener à dire aujourd’hui et demain, c’est que le 22 Mars 2012 restera encore longtemps le jour le plus sombre de l’histoire récent du Mali. Ainsi, on a eu à constater des militaires indisciplinés, gagnés par une folie subite se munirent d’armes et semèrent le trouble et perpétrant un coup d’Etat qui fut consommé avec une facilité déconcertante. S’en est suivie des exactions et crimes contre des éléments de la Garde présidentielle qui auraient été arrêtés et exécutés de sang-froid. La folie meurtrière se poursuivit plus tard dans les rangs des putschistes eux-mêmes. Craignant pour sa propre sécurité, ou peut-être cherchant à régner par la terreur, le chef de la junte, non moins mentor de Sinko, aurait fait exécuter ses propres compagnons. La suite on la connaît…
Accusé de meurtre, notre putschiste fut arrêté au même titre que certains de ses compagnons. Voici le tristement passif des ex-compagnons du Général Moussa qui, au-delà de sa carrière discrète, depuis la fin de la transition, a une étiquette indissociable de sa personne : celle d’appartenir à la junte de Kati et auteur de la chute d’ATT.
Quel crédit accordé à cette affirmation à l’ex-directeur de cabinet du capitaine Amadou Haya Sanogo ?
Ce, d’autant plus qu’il le dit ou pas, lui qui se présente actuellement comme le plus grand pourfendeur du régime en place et qui chante à tout bout de chant sa volonté de sauver le pays de ses maux, est celui qui a le plus, parmi ses ex-compères, profité du coup d’Etat du 22 mars.
Illustre officier inconnu des Maliens, avant le 22 mars 2012, à la différence d’un Didier Dacko, d’un Gamou ou d’un Ould Meidou qui se sont battus au front contre la coalition de la rébellion, le Général Moussa Sinko s’est subitement retrouvé sous les feux des projecteurs d’abord en sa qualité de directeur de cabinet du capitaine Amadou Haya Sanogo, avant d’être bombardé, au nom et pour le compte de la junte, au sein du Gouvernement de la transition pour occuper les rênes du département de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de l’Aménagement du Territoire. Il fut régulièrement reconduit à la tête de ce département jusqu’au deuxième gouvernement du régime IBK. Mieux, Moussa Sinko est le seul parmi ses compagnons militaires ayant siégé dans les Gouvernements successifs. Puisque juste après sa sortie dans les rouages de l’Etat il a été promu au poste de DG de l’Ecole de maintien de la paix (EMP/ABB) où il a pris tout le monde de court tout le monde en annonçant sa démission de l’armée.
De tout ce qui précède, nous pensons que si le Général Sinko a la moindre estime pour le peuple malien, il se doit de prendre son courage dans ses deux mains pour venir présenter publiquement ses excuses pour cette page peu glorieuse que lui et ses compagnons ont fait vivre à notre pays.
Va-t-il franchir ce pas ?
Par Mohamed D. DIAWARA
Source: info-matin