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Corruption et enrichissement illicite au Mali : La Justice sur les traces de trois fonctionnaires milliardaires qui légué des maisons à leurs propres enfants mineurs

Mis en veilleuse depuis le mois de janvier dernier, sous le régime d’IBK, le dossier de corruption des 3 fonctionnaires maliens devenus tous milliardaires en 6 ans de service sera bientôt, remis au goût du jour.

Élaboré par l’OCLEI (Office central de lutte contre la corruption et l’enrichissement illicite), ce dossier a trait à l’évaluation des activités liées à la prévention et à la répression de l’enrichissement illicite couvrant la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2018. Avec un montant indûment perçu qui se chiffre à 4 milliards de nos francs, ce dossier épingle 3 fonctionnaires maliens, dont deux Inspecteurs des Finances et un Inspecteur des Services de Sécurité Sociale.  

À l’issue de ses investigations, l’OCLEI est tombé, à son corps défendant, sur des zones d’ombre dans le processus de perception de ces milliards de francs CFA par nos trois fonctionnaires maliens. Relégué aux oubliettes, ce dossier risque de sonner le glas de la carrière professionnel de ces trois individus au sein de la fonction publique malienne.

C’est le samedi 4 janvier 2020 que l’OCLEIL a rendu public son rapport sur l’enrichissement illicite couvrant la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2018. Dans ce chef-d’œuvre,  le Président de l’OCLEI, M. Moumouni Guindo, a  révélé que le dossier de trois fonctionnaires maliens, qui se seraient enrichis illicitement, avait été déjà transmis à la Justice. Et depuis, c’est un silence radio autour du dossier.

Mais avec ce début de transition, la donne semble changer. Du coup, ces bandits à col blancs ne dorment plus que d’un demi-œil.

Sauve-qui-peut, général

Nos sources sont formelles : une grande vague d’arrestation est déjà lancée au Mali sous cette période transitoire pour tenter de soigner l’image du pays après la démission du président IBK.

En préparation de cette campagne de lutte contre la corruption,  une réunion a eu lieu, il y a quelques semaines, entre le président du CNSP, le colonel Hassimi Goïta et le Procureur du Pôle Économique, Mahamadou Kassogué, ainsi qu’avec le Président de l’OCLEI, Moumouni Guindo.

Un choix des dossiers à traiter avant la fin des 18 mois de transition a été fait et parmi les dénonciations de faits déjà remises à la justice, tous les dossiers sensibles au niveau du Pôle économique et financier seront ouverts. Il s’agit entre autres, de l’affaire de corruption et d’enrichissement des 3 fonctionnaires milliardaires ; des dossiers de détournement et des marchés d’équipements militaires, de l’achat de l’avion présidentiel.

Selon l’OCLEI, les principales méthodes et pratiques d’enrichissement illicite couramment utilisées par les agents publics sont : la perception de pot-de-vin avec une concurrence de 39,24% ; le détournement des deniers publics avec 25,60% et l’abus d’autorités avec 11,95%.

Selon l’indice de perception de la corruption établi par l’ONG Transparency International, le Mali est classé à la 29ème  place parmi les 54 pays africains les plus corrompus et à la 122ème  place sur les 180 pays au niveau mondial.

Au total, l’OCLEI a mené des enquêtes sur 35 personnalités (1er janvier 2017 au 31 décembre 2018) et a remis à la justice des dossiers de corruption de trois fonctionnaires qui portent sur  4 milliards FCFA environ.

À en croire le président de l’OCLEI, M. Moumouni Dembélé, le premier concerne un Inspecteur des services de sécurité sociale : «Nous avons identifié 17 maisons d’habitation dont trois maisons ont déjà été vendues ; 4 véhicules particuliers. La valeur des biens est de 969,31 millions à titre d’expertise (fait par des experts évaluateurs immobiliers) alors qu’en 6 ans (2014-2019) son revenu est estimé à 63,3 millions et la somme à justifier est de 906,02 millions FCFA », explique-t-il.

Il ajoute : « Le deuxième dossier concerne un Inspecteur des finances. Il possède 18 maisons d’habitation dont une résidence, un bâtiment de trois étages avec une piscine, qui a coûté 400 millions de FCFA. Pendant que l’enquête était en cours, il a vendu trois maisons, plutôt à brader (une villa à l’ACI à 10 millions de FCFA) à ses propres enfants mineurs. Nous avons trouvés 18 maisons non encore bâties. Le total des biens s’élève à 1 milliard 751 millions de FCFA  alors que le total de ces revenus légitimes en 6 ans (2014-2019) est de 27 millions. Et le montant total à justifier  pour cet individu est de 1 milliard 720 millions».

Avant de conclure : « Le troisième concerne aussi un inspecteur des Finances. Nous avons identifié 20 bâtiments dont 17 maisons d’habitation, deux écoles privées, une ferme agricole mise en valeur, 46 parcelles dont l’essentiel est en titre foncier, deux maisons d’habitation déjà vendues, un bâtiment commercial vendu aussi. Cette personne a beaucoup utilisé des prête-noms. Il y a ses enfants de 2 ans, de 4 ans et de 6 ans qui possèdent des maisons de 300 millions, 100 millions, 200 millions etc. La valeur présumée de ses biens a été estimée à 1 milliard 562 millions de FCFA à titre d’expertise alors que son revenu légitime en 6 ans est de 29,47 millions FCFAEt la somme totale à justifier pour cet homme est de 1 milliard 591 millions».

Aujourd’hui, la question que l’on se pose, est de savoir si cette chasse aux « voleurs » de la République pendant cette transition touchera tout le monde. Jusqu’où s’étendra la nasse ? Bien malin celui qui saurait y répondre par l’affirmative. Toujours est-il que cette initiative devrait restaurer l’image écornée du Mali, qui, comme on le sait, est coutumier des scandales financiers.

Cela dit, ce réveil de la justice, pourra-t-il arrêter l’hémorragie ? Rien n’est moins sûr. Car, force est de constater que la corruption passe pour être une marque déposée au Mali.

Pourvu que cette opération ne soit pas une tempête dans un verre d’eau

En tous les cas, souhaitons que le coup de pied que la Justice malienne veut donner dans la fourmilière, sous cette transition, révèle d’autres scandales, car, ceux qui ont été révélés peuvent n’être que la partie visible de l’iceberg. En bloc, la corruption a fait beaucoup de tort aux Maliens. Surtout dans le domaine de la gestion des deniers publics. On se rappelle en effet, que plusieurs milliards de francs CFA ont été détournés au Mali, pendant les 7 ans de pouvoir du président IBK. Et les scandales de l’exécution de la Loi d’Orientation et de Programmation Militaire (LOPM) est l’illustration parfaite de cette gabegie financière érigée en mode au sein de l’administration publique malienne. Ces scandales avaient même poussé la société civile à donner de la voix pour dénoncer la mal gouvernance sous le régime défunt d’IBK.

Si aujourd’hui, derrière cette initiative de lutte contre la corruption et l’impunité, c’est le président de la transition, le colonel à la retraite Bah N’Daw, qui est à la manœuvre, l’on peut croire que le président de la transition au Mali, veut terminer ses 18 mois de mandat en prouvant aux Maliens ce dont il est capable. Il a donc les mains libres pour traquer tous les ripoux de la République. Du reste, l’on se rappelle que lors de sa prestation de serment il a promis d’éradiquer le mal.  Est-ce cette promesse qu’il essaie de tenir en lançant cette opération ‘’main propre’’ ? En tout cas, les autorités de la transition au Mali doivent montrer patte blanche en faisant de la lutte contre la corruption, leur priorité. Et le coup semble déjà parti pour cela avec l’arrestation de l’ex DG de l’ORTM, Sidiki N’Fah Konaté. Aussi, elles se doivent de faciliter la tâche au procureur anti-corruption afin que ce dernier ratisse large. En tout état de cause, toutes les sombres affaires de détournement de fonds publics doivent être élucidées pour ne pas hypothéquer l’avenir des enfants du Mali. Pourvu que cette opération ne soit pas une tempête dans un verre d’eau.

Jean Pierre James

Source: Nouveau Réveil

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