Une conférence internationale sur la prévention et la gestion des conflits liés à la gouvernance des ressources naturelles en Afrique de l’Ouest a ouvert ses travaux, hier matin 12 novembre 2019, à Noom Hôtel de Niamey, à l’initiative de la coopération allemande avec l’appui de l’Union Européenne et la collaboration de la Haute autorité à la consolidation de la paix (HACP) du Niger. Les travaux, qui durent trois jours, réunissent une centaine de participants de plusieurs pays de la région, parmi lesquels des magistrats, des chercheurs, des responsables des forces de sécurité, des acteurs de la société civile, des responsables politiques et des leaders coutumiers. L’occasion est mise à profit pour faire un état des lieux des pratiques de gestion des conflits communautaires en lien avec la gouvernance des ressources naturelles et d’échanger sur les expériences en vue d’une meilleure collaboration, pour la réadaptation des approches dans le contexte actuel caractérisé particulièrement par des menaces terroristes.
La croissance démographique, le changement climatique, la fragilisation des écosystèmes, l’urbanisation et l’évolution des enjeux fonciers rendent non seulement plus difficile la gestion des ressources naturelles, mais changent également en profondeur la nature même des conflits, lesquels apparaissent de plus en plus diffus et dynamiques. Ce qui profite aux groupes terroristes, aujourd’hui, qui instrumentalisent et aiguisent ces conflits en leur faveur. « Ce terrorisme, en ciblant pour ses recrutements les communautés nomades, est en train de se transformer en véritable insurrection contre les Etats. Il y a donc péril en la demeure et il est temps de prendre le taureau par les cornes, pour s’attaquer aux racines du mal », a déclaré le président de la Haute autorité à la consolidation de la paix (HACP), le Général Mahamadou Abou Tarka.
Œuvrant pour le dialogue permanent entre l’Etat et les communautés et le développement de l’esprit de paix entre les différentes composantes de la nation, afin d’entretenir la confiance mutuelle, la tolérance et le respect dans une commune volonté de vivre ensemble, la HACP ne peut que s’en réjouir de l’organisation de la présente conférence qui rappelle des problématiques si pertinentes. «Il le fallait, cet espace de dialogue entre juriste, chercheurs, acteurs de la société civile, gestionnaires d’aires protégées, responsables politiques, chefs traditionnels, agriculteurs et éleveurs et membres des FDS », estime le Général Mahamadou Tarka. Puisque, soutient-il, «en matière de conflit, peut être encore plus qu’ailleurs, c’est seulement en échangeant en profondeur sur nos expériences respectives et en surmontant nos déformations professionnelles que nous serons à même d’esquisser les traits d’une gouvernance des ressources naturelles efficace et adaptée aux enjeux de notre époque». « Plusieurs régions d’Afrique de l’Ouest sont, nous le savons, impactées par des conflits, trop souvent meurtriers. En dépit d’origines et de dynamiques diverses, multiples et fluides, une grande partie de ces conflits est directement ou indirectement liée à la gouvernance des ressources naturelles », a ajouté le président de la HACP.
A travers le programme GIZ/ZFD (service civile pour la paix), la coopération allemande œuvre depuis 2011 dans la prévention et la transformation de conflits liés à la transhumance transfrontalière au Niger, au Bénin et Burkina Faso. Selon l’ambassadeur d’Allemagne au Niger, SE. Hermann Nicolai, la GIZ/ZFD appuie des organisations locales, en matière de renforcement de dialogue entre différents groupes d’intérêt que constituent les agriculteurs et les agropasteurs. « Bien que le projet Frexus, soutenu par l’Union européenne et la coopération allemande essaye d’apporter des réponses adaptées aux contextes locaux bien déterminés, dans le renforcement de la sécurité et la résilience des communautés face à l’évolution des dynamiques foncières, climatiques et sécuritaires dans la région, la coopération estime nécessaire de réévaluer et adapter sa stratégie d’action à la réalité du terrain », a expliqué le diplomate allemand. Ainsi, cette conférence représente, dit-il, une opportunité pour tous les acteurs impliqués dans les questions des conflits liés à la gestion des ressources naturelles, d’échanger et d’explorer des nouvelles pistes de travail et de collaboration.
Le soutien de l’Union européenne à cette initiative n’est pas fortuit. Dans son intervention, l’Ambassadeur Chef de la Délégation de l’UE au Niger, Dr. Denisa Elena IONET a d’abord souligné tout l’intérêt qu’attache l’Union Européenne aux défis de prévention et gestion des conflits ainsi que de résilience communautaire dans le cadre de ses interventions dans la région. « Ce sont deux priorités, parmi les cinq priorités majeures de la stratégie globale. Elles renforcent les efforts que nous sommes en train de faire dans la promotion de la démocratie, du droit, du développement durable et de la paix », a-t-elle précisé. L’ambassadrice de l’Union européenne au Niger salue, à cette occasion la bonne coopération tripartite : Haute autorité à la consolidation de la paix du Niger-GIZ-Union européenne, dans le cadre notamment du projet Frexus. « Au Niger, je ne manquerai pas de mentionner l’importance cruciale du travail qui se fait par les autorités nationales, à travers la politique foncière rurale, ainsi que l’élaboration et l’adoption du schéma foncier régional », a dit l’Ambassadeur chef de la Délégation de l’Union européenne au Niger, Dr. Denisa Elena.
Mahamane Chékaré Ismaël
Source : lesahel