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Concours direct de recrutement à la police Nationale: vocation ou opportunisme ?

Concours direct de recrutement à la police Nationale: vocation ou opportunisme ?

Des fils des Généraux, des Colonels, des Officiers Supérieurs, les candidats les plus offrant, parfois sans Diplôme de Baccalauréat. Voilà l’image des admis de notre Police Nationale à la suite du concours de recrutement de cette année 2018. A quand la fin de l’atavisme?

Depuis une dizaine de jours, les lieux de dépôt des dossiers en vue du concours d’entrée dans la Police malienne ne désemplissent pas. Des milliers de jeunes filles et garçons prennent d’assaut les centres de réception des dossiers de candidature et ce depuis 04 heures du matin pour certains, s’ils ne passent pas tout simplement la nuit dehors pour être sûrs d’être parmi les premiers arrivants.

Les candidats viennent d’horizons divers et sont constitués de maîtrisards, de licenciés, de bacheliers ou de détenteurs du DEF suivant les postes proposés. La rareté des offres d’emploi font que chaque recrutement à la Police, la Gendarmerie, dans l’Armée ou la Garde nationale est une occasion pour les jeunes maliens de tenter leur chance pour espérer trouver un emploi. Dès lors, on ne peut s’empêcher de se demander si tant d’engouement relève de l’opportunisme ou de la véritable vocation.

Il y a quelques décennies, la Police, la Gendarmerie, l’Armée et la Garde nationale étaient des corps auxquels se vouaient ceux qui n’avaient pu entreprendre d’études ou qui avaient échoué dans leurs examens. Ceux-ci étaient considérés comme des fonctionnaires au rabais d’autant plus qu’ils étaient mal payés et avaient la réputation d’être des brutes sans état d’âme.

Mais depuis quelques années, depuis que ces corps ont été revalorisés, et surtout depuis l’explosion du chômage, les jeunes filles et garçons guettent les recrutements dans ces différents corps en espérant faire partie des rares élus et sortir ainsi de la précarité où les plonge l’absence de perspective d’emploi. Le spectacle de jeunes filles « en tenue » qui était rarissime, fait maintenant partie du quotidien des Maliens. Et cette tendance devrait s’accentuer car il serait question de recruter cette fois les jeunes filles à hauteur de 30% pour être conforme aux textes en vigueur en faveur du genre. En plus de l’opportunité d’emploi, la Police nationale et les autres corps de porteurs d’uniforme bénéficient du respect et de la crainte de la population.

La Police, particulièrement, à cause de la corruption qui gangrène ce corps, permet aux agents, qu’ils soient affectés à la circulation ou dans les Commissariats, de se constituer, à la longue, un joli pactole pour se payer une voiture et même se construire une ou plusieurs maisons pour certains. Il est rare qu’un policier rentre bredouille à la maison le soir car il a quotidiennement l’occasion de se faire des sous à cause de la tendance de la population à « arranger » leurs problèmes moyennent quelques billets de banque.

Tout cela pose la question de la vocation. Certes il est des jeunes gens qui adorent la Police pour des raisons nobles. Mais ceux-là sont sans doute minoritaires dans un Mali où la quête effrénée de l’argent vaille que vaille est la préoccupation de tous. Combien de jeunes gens aspirent à entrer dans le corps des porteurs d’uniforme juste pour les considérations mercantiles ? Beaucoup sans doute. Et ce sera toujours le cas si des décisions politiques courageuses ne sont pas prises pour moraliser le corps des porteurs d’uniforme. Et les politiques et les responsables de la Police particulièrement (mais aussi de la Gendarmerie) sont conscients des diverse formes de déviance qui font de ce corps l’un des plus corrompus du Mali.

Mais des mesures pour inverser cette tendance tardent à venir. C’est pourquoi il est primordial de prendre des mesures pour remettre la Police sur les rails. Il est par exemple possible de mettre des « quittanciers » à la disposition des agents de police (et des gendarmes) pour verbaliser les contrevenants dans la circulation routière. On pourrait par exemple consentir en leur faveur 20% des sommes récoltées au cours des verbalisations.

 

Cela pourrait substantiellement augmenter leurs ressources quand on sait que les agents de police se contente parfois de 1000 FCFA voire parfois 250 et que les cas d’indiscipline sont constants sur nos routes et très peu d’usagers de la route sont en règle vis-à-vis du fisc, du contrôle technique et des assurances. Après une telle mesure, il sera possible de sanctionner les agents de police qui, malgré tout, s’adonneraient à des pratiques mafieuses. Si cette mesure était strictement observée, et les policiers et l’État seraient gagnants.

 

Les premiers gagneraient légalement de l’argent et le second renflouerait ses caisses. Il faudra sans doute veiller à limiter les abus de pouvoir inévitablement inhérents à ce genre d’opération. Au-delà des considérations pécuniaires, l’affluence des jeunes gens pour s’inscrire au concours de recrutement de la Police pose le problème crucial de l’emploi des jeunes. 2200 recrutements sont loin de pouvoir infléchir la courbe du chômage mais cela a le mérite d’exister. Cependant, comme toujours, ce ne seront pas les plus méritants qui seront toujours reçus. Certains aspirants qui ne sont pas à leur premier essai, dénoncent des pratiques frauduleuses dans le recrutement.

 

Des candidats parents de hauts gradés de la Police ou de hauts cadres politiques seraient reçus sans passer toutes les formalités de recrutement. Il est évident que de tels policiers auront comme dernier souci de se conformer aux principes d’équité, de justice, d’honneur et de patriotisme attachés à ce corps. Certes le programme présidentiel de résorption du chômage des jeunes se prévaut de la création de plus de 200 mille emplois durant les cinq ans de présidence d’IBK.

 

Mais il est évident que tous les jeunes maliens ne trouveront pas de place dans la Fonction publique. C’est pourquoi des initiatives tendant à insérer les jeunes gens dans le domaine agricole, technique ou autres secteurs où ils pourront travailler à leur propre compte doivent être encouragées. La Fonction publique n’est pas le moteur du développement. Les domaines porteurs sont l’agriculture, l’élevage, la pêche, l’électricité, la maçonnerie, le bâtiment etc. là où les jeunes peuvent être leurs propres patrons et où ils pourront employer d’autres jeunes ou surtout s’associer avec eux.

 

Pour cela il faudrait rompre le mythe de la bureaucratie et convaincre les jeunes à entreprendre en les accompagnant par des mesures adéquates. Si dans les années 60 à 80 la Fonction publique était le seul débouché pour les jeunes sortant des écoles maliennes, tel n’est pas le cas aujourd’hui où malgré les énormes difficultés, des opportunités d’entreprendre existent.

 

C’est pourquoi il convient de stopper la fabrique des chômeurs dans des filières scolaires et universitaires sans issue et de donner la priorité aux écoles professionnelles dont les perspectives sont beaucoup plus grandes parce que plus conformes aux besoins du moment. Il est indispensable de procéder à une reconversion des mentalités qui engagerait les jeunes dans les filières de production où ils ont plus de chance de se réaliser et de s’épanouir.

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