Trois jours après la mise en œuvre de l’opération dite « circulation alternée » à Bamako, le Département en charge des Transports et de la Mobilité Urbaine a fait hier un premier point. Pour le constat officiel, si « globalement les retours sont satisfaisants », le ministre Ly et ses hommes se disent néanmoins ouverts et sensibles aux observations faites par des usagers. En attendant « les correctifs nécessaires pour le bonheur des usagers » que se propose d’apporter le ministère des Transports et de la Mobilité Urbaine en partenariat avec la Marie di District, les usagers sont partagés sur l’initiative. Tandis que les uns l’apprécient, d’autres le dénoncent et protestent avec véhémence.
La mesure, qui fait suite aux journées de réflexion sur la mobilité dans le District de Bamako et environs, tenues les 11 et 25 juillet 2019, sous la présidence du ministre des Transports et de la Mobilité Urbaine, est une initiative du Ministère des Transports et de la Mobilité Urbaine en partenariat avec la Mairie du District de Bamako. Elle s’inscrit donc en droite ligne de la nouvelle mission (Mobilité Urbaine) dévolue au département des transports par les plus hautes autorités. Elle vise à rendre plus fluide la circulation dans le District de Bamako, notamment aux heures de pointe.
La circulation alternée ne concerne en réalité quelques artères : l’avenue AL QOODS sur la Route de Koulikoro, l’Avenue de l’OUA, l’Avenue de la CEDEAO, l’Avenue Cheick Zayed et l’Avenue Martin Luther KING. La voie « Tour de l’Afrique-Niamana » n’est pas concernée par la mesure.
Pour les initiateurs de la mesure, le ministre des Transports et de la Mobilité Urbaine et le Maire du District de Bamako, le but est uniquement de rendre plus fluide le trafic dans notre capitale, des trajets de retour les plus convenables possible étant, dit-on, identifiés pour les usagers affectés par ces mesures.
Les problèmes posés
Il s’agit donc d’une mesure provisoire, pour ne dire du replâtrage, « en attendant la mise en place de système performant de transports publics ». C’est pourquoi beaucoup d’usagers, dont certains confrères, se refusent à y adhérer estimant qu’il ne s’agit que d’une « foutaise ». Pour certains, cette mesure ne résout aucunement la question de la mobilité urbaine sur le long terme. Du coup, on déplace un autre problème sans le résoudre. Gouverner c’est prévoir, c’est avoir la capacité à résoudre durablement les problèmes. On doit arrêter de solutionner de la sorte.
La circulation alternée pose-t-elle des problèmes ? Les initiateurs ont-ils pris toutes les mesures d’accompagnement afin d’éviter les désagréments ? Par exemple, dégager et ériger certaines voies en sens unique (vers Badialan et Hamdallaye) pour ceux qui vont vers Lafiabougou ou à Djélibougou ? Faut-il construire davantage de ponts à Bamako pour fluidifier la circulation ?
En fait, suivant son domicile et son lieu de travail, la mesure n’arrange pas tout le monde. Particulièrement ceux qui quittent le côté ouest de la rive droite. Raison : la route de Koulikoro est une voie deux X deux voies. Les routes de retour et aller qui sont les rues de Missira, Médina-Coura, Hyppdrome, Banconi, Korofina ou celle de Nglonina, Sans fil, Zone Industrielle, Sotuba sont très étroites. Pire, elles sont utilisées dans les deux sens. Toutes choses qui créent encore d’autres embouteillages et rendent encore les trajets plus longs.
Un vrai calvaire pour certains
Si ces voies étroites étaient aussi des sens uniques pour pallier la mise en sens unique de la route de Koulikoro, il y aurait, selon certains usagers, justice et équité entre les usagers. Aussi, en plus de la dégradation des routes à tout niveau, la circulation alternée devient un vrai calvaire pour certains.
Pour cet usager que nous avons rencontré hier, la situation a considérablement prolongé son temps de trajet. Avant la circulation alternée, il faisait 20 minutes, maintenant il dit faire 45 minutes pour rallier son lieu de travail.
Pour d’autres usagers par contre, c’est une aubaine et un satisfecit total. Un syndicaliste qui travaille au centre-ville dit avoir eu avec la circulation alternée un gain de plus d’une heure : « de Moribabougou où j’habite à l’hôpital Gabriel Toure (mon lieu de travail), je mettais 1 heure à 1 h 30 min pour parcourir les 17 km… Hier comme aujourd’hui, j’ai économisé du temps, 25 minutes au lieu de 90 souvent et du carburant. Ce qui m’a surtout impressionné, c’est le dispositif policier mis en place pour minimiser les désagréments pouvant résulter d’un changement en ces débuts », explique Djimé Kanté.
En attendant les correctifs, le ministère de la mobilité urbaine gagnerait à repenser les positions des centres d’activités pour que le matin et le soir, il y ait un certain équilibre dans le flux de déplacement des populations.
À Bamako, toute l’activité administrative (services), et économique (marché et industries) étant concentrée dans le même alignement avec les mêmes voies d’accès. Dans ces conditions, même si le gouvernement fait trois ponts supplémentaires, les usagers se retrouveront embouteillés aux points d’accès des zones d’activités.
Par Sikou BAH