Le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra a estimé mercredi que parler de génocide en Centrafrique, terme employé fin août par le secrétaire général adjoint de l’ONU pour les Affaires humanitaires de l’époque, n’est pas « justifié ».
« Génocide, nous pensons que ce n’est pas très justifié », a déclaré M. Touadéra lors d’une conférence de presse à Genève, en marge de la 36e session du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies.
« Parler dans cette étape de génocide, nous pensons que c’était trop avancé », a-t-il dit, en réponse à une question sur les propos tenus en août par celui qui était alors secrétaire général adjoint de l’ONU pour les Affaires humanitaires, Stephen O’Brien. Il a depuis été remplacé.
« Les signes avant-coureurs de génocide sont là », avait déclaré ce responsable en rendant compte de récents voyages en Centrafrique et en République démocratique du Congo.
M. Touadéra a expliqué que ces propos avaient été tenus par M. O’Brien après une visite en Centrafrique, lors de laquelle il avait visité la ville de Bangassou (sud-est), « où il y avait effectivement des violences, surtout intercommunautaires ».
« Génocide pour nous c’est un mot très fort », a jugé le président centrafricain.
« Des gens de même ethnie se trouvent de part et d’autre dans les communautés qui se battent », a-t-il ajouté.
Le conflit en Centrafrique a commencé avec le renversement en 2013 de l’ex-président François Bozizé par les milices Séléka prétendant défendre la minorité musulmane, entraînant une contre-offensive des antibalaka majoritairement chrétiens.
La quinzaine de groupes armés recensés en Centrafrique se battent aujourd’hui pour le contrôle des ressources naturelles (diamants, or, bétail…).
« Il y a des tentatives d’occupation du terrain pour des actes de prédation parce que c’est une grande zone où il y a des ressources naturelles », a-t-il dit. « Il y a aussi (…) les trafics de tout genre. C’est la lutte pour l’occupation de ces zones, associée à des considérations d’ordre communautaire qui se sont développées », a-t-il poursuivi, jugeant aussi qu’il y a « beaucoup de manipulations politiques derrière ces violences ».
Devant le Conseil, il a souligné que « la situation sécuritaire et humanitaire demeurait fragile » en Centrafrique et a affirmé sa volonté de mettre fin à l’impunité.
Il a également assuré, devant les médias, que la Cour pénale spéciale, créée en 2015 et qui doit instruire et juger les multiples crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis en Centrafrique depuis 2003, serait « très bientôt opérationnelle », « d’ici à la fin de l’année ».
M. Touadéra a aussi demandé, devant les médias, la « levée partielle » de l’embargo sur les armes qui frappe son pays, afin que les forces armées « qui sont formées puissent être équipées » et « être à côté de la Minusca (Mission des Nations Unies en Centrafrique) pour protéger la population ».
Il a aussi annoncé que la RCA et le Tchad étaient « en train de faire revivre la commission mixte qui traite de toutes questions » de « voisinage », comme les problèmes de transhumance et de circulation.