Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui rencontrait jeudi les soldats français basés à Bangui, a écarté le risque d’un enlisement pour la France, près d’un mois après le lancement de l’opération Sangaris qui peine pour le moment à mettre fin aux violences.
“En février, des experts disaient +au Mali, la France commence son enlisement+. Heureusement que nous n’avons pas écouté les experts. Je le dis pour le Mali, et je le dis aussi pour la Centrafrique”, a déclaré le ministre aux soldats de la force Sangaris, nom de code de l’opération militaire française entamée le 5 décembre en Centrafrique.
“Je suis venu en Afrique pour saluer toutes les forces impliquées dans les opérations de lutte contre le terrorisme”, a dit M. Le Drian en visite au camp Boali, où est stationnée la force française.
1.600 soldats français ont été déployés en Centrafrique pour tenter d’enrayer l’engrenage de violences communautaires et interreligieuses à l’oeuvre dans le pays depuis le renversement en mars du président François Bozizé par une coalition hétéroclite à dominante musulmane, la Séléka.
Début décembre, deux soldats français ont été tués, quelques jours après le début de l’opération, lors d’un accrochage à proximité de l’aéroport. “Ma première pensée est pour eux”, a affirmé le ministre, qui s’est dit “solidaire de leurs familles et de leurs camarades”.
Insistant sur la nécessité d’intervenir militairement sur le continent africain, le ministre a affirmé qu'”assurer la sécurité en Afrique, c’est aussi assurer la sécurité en France”.
“Quand il y a un vide sécuritaire c’est le creuset à tous les trafics et la porte ouverte à tous les terrorismes”, a-t-il déclaré.
Les difficultés s’accumulent
Le ministre de la Défense a aussi évoqué le “rôle historique” de la France en Afrique. “La France aurait été sourde à l’appel des Etats africains? La France aurait fui ses responsabilités historiques? Nous sommes là et il ne faut pas qu’il y ait de doute sur notre détermination à mener cette mission”, a-t-il ajouté.
Les difficultés s’accumulent pourtant pour l’armée française en Centrafrique, pays qui semble au bord de la guerre civile, plongé dans un cycle de représailles sans fin entre chrétiens et musulmans presque un mois après le début de l’opération Sangaris, et incitant plusieurs experts à prôner un renforcement militaire français pour éviter l’enlisement.
“Nos soldats se trouvent seuls, face à une situation locale nettement plus dure que prévue. Il n’y aura pas de succès rapide et nos troupes devront probablement être renforcées”, estimait François Heisbourg, de la Fondation pour la recherche stratégique, dans une tribune publiée par le quotidien Le Monde du 27 décembre.
La tâche des Français est rendue plus compliquée encore par les ambiguïtés de son allié tchadien, considéré comme la puissance régionale qui a mis en place l’ex-chef rebelle et président Michel Djotodia. Le Tchad fait aussi partie de la force africaine (Misca), censée être neutre, mais ses soldat sont accusés par la population de complicité avec les ex-Séléka.
M. Le Drian devait s’entretenir avec des responsables de la Misca, chargée de sécuriser Bangui aux côtés des Français, avant de s’envoler cet après-midi pour le Gabon puis le Congo, où il rencontrera les présidents Ali Bongo et Denis Sassou Nguesso, médiateur de la crise centrafricaine.
Les deux pays ont déployé des contingents militaires dans le cadre de la Misca, commandée par le général congolais Jean-Marie Michel Mokoko, qui doit compter à terme 6.000 hommes.
AFP