• 48 filles ont eu des complications médicales liées aux MGF le mois dernier
• Plus de la moitié des filles se marient avant 18 ans
La situation des 48 filles qui ont eu des complications médicales à la suite de mutilations génitales féminines (MGF) au Burkina Faso soulève l’urgence d’une meilleure protection du droit à la santé sexuelle et reproductive dans le pays, a déclaré Amnesty International aujourd’hui.
Alors que la communauté internationale célèbre ce 11 octobre la Journée internationale de la fille, l’organisation demande aux autorités de prendre des mesures concrètes pour la protection des filles contre les conséquences désastreuses des mutilations génitales féminines, et de s’engager à mettre un terme aux mariages forcés.
“Bien que la mutilation génitale féminine soit interdite au Burkina Faso, la pratique demeure répandue, et a souvent lieu dans des conditions sanitaires déplorables,” a déclaré Yves Boukari Traoré, directeur exécutif d’Amnesty International au Burkina Faso.
“Le récent cas de 48 filles qui ont eu des complications montre que les autorités doivent agir plus fermement contre les MGF, y compris en disséminant l’information sur le droit à la santé sexuelle et reproductive, tout en s’assurant que les auteurs de MFG soient traduits en justice. »
Le mois dernier, 48 filles dont 10 à Kaya (Centre Nord) et 38 à Ouagadougou la capitale ont eu des complications à la suite d’une mutilation génitale. Cela a occasionné une vague d’indignation dans le pays, obligeant le gouvernement, à travers la ministre de la Femme, de la Solidarité Nationale et de la Famille à se prononcer sur cette situation.
La ministre de la Femme avait déclaré : « les récents cas ont été référés au niveau des ministères en charge de la Sécurité et de la Justice pour que les droits des victimes soient assurés.» Elle a aussi annoncé l’arrestation des auteurs présumés.
La pratique des mutilations génitales féminines est illégale au Burkina Faso depuis 1996. Les peines prévues par le Code pénal peuvent aller d’un à 21 ans de prison à l’encontre des personnes coupables de MGF; cette peine pouvant être cumulée avec une amende de 500.000 (750 euros) à 3 millions de francs CFA (4500 euros).
Cette pratique est également reconnue comme une forme de violence contre les filles et les femmes par le droit international, et est explicitement interdite par le Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (Protocole de Maputo) ratifié par le Burkina Faso en 2006.
Malgré l’interdiction, l’emprise de la tradition et de la coutume est telle que les mutilations génitales féminines continuent d’être pratiquées clandestinement, dans des conditions sanitaires déplorables et constituent une cause majeure de mortalité et de handicap chez les femmes et les jeunes filles. En 2015, 67,6% des femmes burkinabè âgées de 15 à 49 ans déclaraient avoir subi l’excision selon l’Enquête Multisectorielle Continue (EMC).
Aussi, au Burkina Faso, 51 filles sur 100 sont mariées avant 18 ans. Cela fait du pays le 5ème au monde qui enregistre les taux les plus élevés de mariages précoces et forcés.
Cette pratique a des répercussions sur divers droits humains et peut entraîner des grossesses précoces et des complications liées à la grossesse, au détriment de la santé et de l’accès à l’éducation des filles et des jeunes femmes concernées.
Le Burkina Faso – grâce au travail de la société civile- a adopté en novembre 2015, au travers du ministère de l’Action Sociale et de la Solidarité nationale, une stratégie nationale pour la prévention et l’élimination du mariage des enfants (2016-2025). Il s’agit d’une mesure importante et encourageante car le gouvernement a commencé à réformer la loi, à fournir davantage d’aide aux victimes, à mener une étude nationale sur le mariage des enfants et à élaborer un plan de communication pour accroître la sensibilisation.
Néanmoins, l’objectif de la Stratégie nationale ne vise qu’une diminution de 20 % du mariage des enfants entre 2016 et 2025 plutôt qu’une élimination totale. Ceci n’est pas compatible avec les obligations du gouvernement en vertu du droit international, notamment le Protocole de Maputo qui fixe l’âge minimum de mariage pour les filles à 18 ans ainsi que les Objectifs de développement durable qui exigent des actions immédiates et soutenues pour l’élimination du mariage des enfants d’ici 2030.
« Nous demandons aux autorités de revoir leur objectif en le mettant en conformité avec le droit international, et de s’assurer que les filles sont libres de décider si, quand et avec qui elles veulent se marier,» a déclaré Yves Boukari Traoré.
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