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Bras de fer CEDEAO-Mali : qui a concédé quoi ?

Après avoir maintenu notre pays pendant 175 jours sous embargo, la CEDEAO a décidé lors de son 61e sommet ordinaire tenu ce dimanche 3 juillet 2022 à Accra de lever ses sanctions diplomatiques, économiques et financières prises depuis le 9 janvier dernier contre le Mali. En acceptant le délai de 24 mois de Transition décrété le 6 juin à compter du 26 mars qu’elle avait dit regretter la prise par les autorités de la Transition, la CEDEAO donne l’impression apparente d’avoir capitulé. Contre quoi dans le bras de fer qu’elle a engagé et entretenu 6 mois durant avec notre pays, contre tous les bons sens ? Les autorités maliennes, de leur côté, ont-elles lâché du lest en acceptant que la nouvelle phase de la Transition soit sous surveillance et desiderata de l’organisation sous régionale ?    

 

Une partie de la divergence entre la CEDEAO et le Mali, qui constituait jusque ce 3 juillet la pomme de discorde entre les deux parties, a été résolue par la décision de la conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’organisation sous régionale de lever les sanctions diplomatiques, financières et économiques contre le Mali. Mais, les sanctions individuelles demeurent et la suspension du Mali dans les organes de la CEDEAO, dont la levée, est conditionnée au retour à l’ordre constitutionnel.

La levée des sanctions qui était très attendue, puisque soulagerait le peuple de certaines conséquences de l’embargo, peut être considérée comme une reculade de la CEDEAO qui avait pourtant fixé une ligne rouge sur la durée de la Transition.

Car, pour les chefs d’État de la CEDEAO, il n’était pas question de prolonger la transition au-delà des 18 mois actés par d’une part la conférence des chefs d’État et gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et une réunion entre huit Chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO et les membres du Comité national pour le Salut du Peuple (CNSP), qui s’étaient tenues le 15 septembre 2020, au Peduase Lodge, à Aburi, au Ghana, et d’autre part la première Charte de la transition dont l’échéance était fixée en mars dernier.

Suite à la publication du décret prolongeant la durée de la transition de 24 mois conformément aux recommandations des Assises nationales de la transition, la CEDEAO avait dit dans un communiqué en date du prendre acte, mais regretter « que cette décision ait été prise à un moment où les négociations se déroulent encore, en vue de parvenir à un consensus». Ce qui laisse entrevoir qu’elle n’était pas en totale phase avec cette décision. Toutefois, elle mettait un bémol : «le Médiateur de la CEDEAO poursuivra les échanges avec les Autorités du Mali, en vue de parvenir à un chronogramme mutuellement acceptable de transition, permettant d’assurer un soutien de la CEDEAO ». En fait de chronogramme la CEDEAO excluait-elle la durée ?

En se braquant ainsi contre cette décision, les chefs d’État de la CEDEAO, dans l’impossibilité d’empêcher la prolongation, s’étaient montrés divisés sur la question d’une nouvelle phase pour elle qui ne devrait pas excéder 12-18 mois. « Une transition de 12 mois serait acceptable au Mali », déclarait président du Ghana, Nana Akufo-Addo alors président en exercice de la CEDEAO. Même son de cloche pour le président Macky SALL, dont le pays a été fortement affecté par les mesures, qui par principe de solidarité s’est allié aux autres chefs d’État en plaidant pour une année. Pour eux, ce délai était tenable pour la transition malienne si réellement, elle a envie d’aller aux élections.   

Ce dimanche, en levant toutes les sanctions significatives et en actant la durée de 24 mois fixés par décret du président de la Transition, la CEDEAO, de l’avis de plusieurs observateurs, capitule et fait une reculade par rapport à son sommet de 2 juin. On serait même tenté de dire ‘’Tout çà pour çà’’. Parce que fondamentalement, les sanctions n’ont pas empêché les autorités maliennes de prolonger le délai imparti et de se donner une nouvelle échéance qui court jusqu’en mars 2024.

Si l’organisation sous régionale a mis un peu d’eau dans son ‘’Niamakou dji’’, brandie par des défenseurs des Colonels comme un trophée de guerre, force est de reconnaître que la Transition a aussi lâché du lest.

Ainsi, pour obtenir la levée de l’embargo et être dans le giron de la communauté internationale, après avoir sollicité les bons offices du président togolais, les autorités de la transition ont aussi multiplié les actions de bonne volonté pour montrer leur engagement et leur bonne foi aux autorités de la CEDEAO.

Il y a eu d’abord l’adoption de la nouvelle loi électorale avec l’innovation de la création de l’Autorité indépendante de la gestion des élections (AIGE).

Ensuite, la publication du projet de chronogramme détaillé pour les prochaines élections (collectivités, législatives, présidentielles et référendaires). En somme, les autorités ont été contraintes de rendre public au moins le projet de chronogramme des élections et des réformes avant le sommet du 3 juillet. Des efforts ayant pesé aussi en faveur la levée de l’embargo.

Le gouvernement est-il allé plus loin en acceptant comme le préconise la version anglaise du communiqué la mise en place du «un mécanisme conjoint de surveillance et de suivi de la mise en œuvre du calendrier de transition avec des repères convenus et dont les rapports sur les progrès accomplis orienteront les décisions ultérieures de l’Autorité sur la levée des sanctions restantes».    

Au terme de ce bras de fer qui, visiblement n’en valait pas la peine, ni le Mali ni les autres États de la CEDEAO ne pouvaient pas tenir longtemps avec ces sanctions dont les conséquences commençaient à affecter non seulement les populations, mais aussi de l’économie de l’espace régional. Surtout que la prise de ces sanctions a été très mal réfléchie dans un contexte de crise sécuritaire, sanitaire qui a ébranché l’économie mondiale.

L’autre bémol des sanctions est qu’elles ont été prises en dehors de tout texte réglementaire, d’où le caractère illégal, injuste de cette de cette décision que le gouvernement de la Transition n’a cessé de dénoncer. Comme, tout est bien qui finit à point nommé.

PAR SIKOU BAH

Source : Info-Matin

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