Sur le continent, les investisseurs internationaux s’intéressent tous aux mêmes titres boursiers, parfois sans que les chiffres-clés des entreprises ne justifient cet enthousiasme. Ce qui gonfle parfois leur valeur de manière artificielle…
Sur certaines Places africaines, les analystes ne cachent pas leur anxiété. La profusion de capitaux en recherche d’investissements à fort rendement se heurte – pour les entreprises cotées en Bourse au moins – à la faiblesse de l’offre. L’argent se concentrant sur quelques valeurs, le risque est grand que celles-ci soient surévaluées – un mécanisme bien connu de bulle financière vouée au mieux à dégonfler, au pire à éclater.
Déconnectés
L’Afrique du Sud exceptée, le continent offre aux investisseurs un millier de titres sur lesquels miser. “Mais les investisseurs internationaux recherchent des valeurs liquides, avec 500 000 dollars (370 000 euros) au minimum échangés par jour, et un bon historique de performances. Ce qui limite fortement les champs d’investissement. Il n’y a pas plus de vingt entreprises dans ce cas en Afrique”, estime Andy Gboka, analyste pour la banque d’investissement Exotix LLP. Les capitaux se dirigent donc massivement vers ces titres, sans que les fondamentaux (les chiffres clés des entreprises) ne suivent toujours.
À en croire l’analyste, la bulle financière est déjà une réalité pour les brasseurs Nigerian Breweries et Guinness Nigeria, dont les multiples de valorisation (ratio cours/bénéfices) ont atteint une moyenne de 30 en 2013, contre 25 en 2012 et 16 entre 2007 et 2011. “Si l’on regarde les fondamentaux, cela n’a pas de sens. Les résultats baissent depuis deux ans et l’avenir n’est pas si positif. Mais la valeur boursière continue de progresser”, s’alarme Andy Gboka.
Consommation
Le problème reste toutefois cantonné à quelques valeurs. “Le brasseur Solibra commence à être surévalué pour notre marché, même si la moyenne dans l’industrie est autour de 24 fois le bénéfice, quand Solibra est à 15 environ. Pour les autres valeurs de la BRVM [Bourse régionale des valeurs mobilières], les cours sont bien valorisés, la plupart continuent à présenter du potentiel, avec la poursuite de la croissance ivoirienne”, estime ainsi Hermann Boua, responsable de la recherche pour le courtier Hudson & Cie.
Pourquoi les brasseurs sont-ils particulièrement inquiétants pour les analystes ? Simplement parce que les investisseurs, très attentifs aux discours sur le décollage de la consommation sur un continent jeune et dynamique, s’intéressent bien plus aux entreprises de biens de consommation qu’à celles des secteurs bancaire, énergétique ou cimentier.
Liquidité
En outre, seules certaines Places comme le Nigeria ou la Tanzanie sont concernées. L’Afrique du Sud, elle, est préservée par son exceptionnelle liquidité. Les Bourses plus petites n’attirent pas encore l’attention des grands investisseurs et peuvent même, au contraire, être sous-valorisées. “Lors de l’annonce des résultats, un effet de rattrapage réel s’opère très souvent sur les multiples de valorisation. Ainsi, Safaricom au Kenya a annoncé au 30 septembre une progression de 45 % de son résultat net, et Ecobank une hausse de 40 % de son résultat net par action”, fait valoir Marc Kamgaing, le gérant du fonds Fcom Africa.
Source : Jeune AFrique