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Au Nord du pays, on reparle déjà de guerre

Dans le bastion des rebelles touaregs, les déceptions vis-à-vis de Bamako, de la France et de la communauté internationale sont immenses. Bien loin du discours optimiste de François Hollande. Une guerre contre les terroristes « gagnée », une élection organisée sans heurts et un processus de réconciliation nationale sur les rails : pendant que François Hollande se félicitait de « sa très grande victoire », jeudi 19 septembre à Bamako lors de la cérémonie d’investiture du nouveau président malien, à 1.500 km de là, au Nord du pays, la fameuse victoire avait un goût amer. Car alors qu’au Sud on parle désormais de paix, au Nord, on reparle déjà de guerre .

mnla rebelle kidal azawad

Dans le bastion des rebelles touaregs, les déceptions vis-à-vis de Bamako, de la France et de la communauté internationale sont immenses. Bien loin du discours optimiste de François Hollande. Une guerre contre les terroristes « gagnée », une élection organisée sans heurts et un processus de réconciliation nationale sur les rails : pendant que François Hollande se félicitait de « sa très grande victoire », jeudi 19 septembre à Bamako lors de la cérémonie d’investiture du nouveau président malien, à 1.500 km de là, au Nord du pays, la fameuse victoire avait un goût amer. Car alors qu’au Sud on parle désormais de paix, au Nord, on reparle déjà de guerre .

 

 

Certains ressortissants issus de Kidal commencent à parler des promesses non tenues .

A Kidal, le bastion des rebelles touaregs à l’extrême Nord du Mali, « la population est terriblement déçue par Bamako, la communauté internationale et la France qui ne tiennent pas leurs promesses », assure Moussa ag Acharatouman, l’un des fondateurs du MNLA, (Mouvement national pour la libération de l’Azawad), le mouvement indépendantiste touareg qui s’était emparé du Nord du Mali en avril 2012 avant de se voir déloger par ses alliés islamistes. « Nous avons le sentiment d’être les seuls, dit-il, à avoir tenu nos engagements » prévus dans le pré-accord signé en juin, à Ouagadougou, entre Bamako et les groupes armés rebelles du Nord, sous l’égide de la communauté internationale.

Les griefs sont nombreux. Le cantonnement des insurgés qui devait être pris en charge par l’Onu « ne l’a pas été », la force onusienne (la Minusma) est jugée « incompétente », les prisonniers touaregs n’ont pas été libérés, la commission d’enquête de la communauté internationale n’a toujours pas été mise sur pieds… Et pour couronner le tout, les rebelles touaregs accusent l’armée malienne de les avoir attaqués la semaine d’avant le 19 septembre dernier sur l’un de leur lieu de cantonnement, à la frontière mauritanienne, violant ainsi selon eux les accords de Ouagadougou.

Les jets de pierres qui ont accueilli, le week-end dernier, trois ministres du nouveau gouvernement malien à Kidal, leur ont donné une idée de la température ambiante.


La France au banc des accusés

La France, en particulier, est accusée d’avoir trahi ses anciens alliés touaregs qui l’ont pourtant aidée à traquer les groupes terroristes quand elle a lancé l’opération Serval en janvier dernier. « A Kidal, les gens disent qu’elle a pris parti pour Bamako », raconte Moussa ag Acharatouman, interviewé jeudi dernier à Paris alors qu’il venait tout juste de revenir d’un séjour de quatre mois au Nord-Mali. « On a maintenant la certitude que la communauté internationale est là pour le Mali et qu’elle se fout de nous. Ce n’est pas un processus de paix que l’on est en train de construire, mais un processus de guerre bâti sur le mensonge et la frustration », fulmine-t-il.

 

Ce jeune indépendantiste fait partie de ceux, nombreux assure-t-il, qui font désormais pression sur le chef de file du MNLA, Bilal ag Acherif, pour qu’il dénonce les accords de juin – « écrits », selon lui, « par la France, signés dans la précipitation et sous la pression internationale » -, qu’il se retire totalement du processus de négociation « qui ne mène nulle-part », et « reprenne les armes » contre le pouvoir central de Bamako. La récente déclaration d’Ibrahim Boubacar Keita, le nouveau président malien, a encore jeté de l’huile sur le feu : « Tout est négociable, sauf la séparation, l’indépendance et l’autonomie des régions du nord », a-t-il lancé mardi. Or, les rebelles estiment avoir déjà fait un pas gigantesque en renonçant à réclamer l’indépendance. « Il faut un minimum d’autonomie mais Bamako fait la sourde oreille », dénonce Moussa ag Acharatouman.
Résultat, dans les cantonnements, où les rebelles ont toujours leurs armes faute d’avoir trouvé un accord pour les désarmer, la colère gronde. Une frange du MNLA, les plus jeunes et les anciens chefs des rébellions précédentes, est prête de nouveau à en découdre, affirme le co-fondateur du mouvement indépendantiste. « Les vieux nous disent : « On vous avait prévenus, vous n’avez d’autres amis que vos armes ». » Comment comprendre, alors, la déclaration commune signée mardi, à Bamako, par des représentants de plusieurs groupes armés touaregs, arabe et noir du Nord, qui s’engagent à renoncer à la guerre ? « On a désavoué l’émissaire du MNLA », répond-il.

 

Le scénario catastrophique serait que les indépendantistes touaregs lancent une offensive sur les garnisons maliennes et nigériennes à Menaka (qui, historiquement, a toujours été la première ville du Nord à être attaquée par toutes les rébellions depuis 50 ans), que les groupes djihadistes – toujours en embuscade dans le Sahel  se saisissent de l’occasion pour repartir au combat et que l’Algérie, qui a perdu dans cette crise le contrôle sur son arrière-cour malienne et sur les négociations tombées dans l’escarcelle du Burkina Faso, soutienne cette nouvelle déstabilisation pour reprendre la main sur la zone.

 

 

IBK désormais face à ses défis

Le Mali a été l’épicentre de l’actualité de l’Afrique de l’Ouest, ce jeudi 19 septembre 2013, en raison des festivités marquant le début du quinquennat du président fraîchement élu, Ibrahim Boubacar Kéïta. En effet, un gotha de personnalités politiques ont pris part à cette cérémonie qui signe l’entrée du Mali dans le concert des nations démocratiques. Parmi les nombreux convives à l’évènement qui s’est tenu au stade du 26 Mars, figurent des invités d’honneur. L’on peut citer le président ivoirien, Alassane Dramane Ouattara, président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), Idriss Deby Itno du Tchad, le « grand chef des Blancs », François Hollande pour reprendre l’expression du Vieux Nègre et la médaille de Ferdinand Oyono et enfin le roi du Maroc, Mohamed VI. Chacune de ces personnalités aura été un des maillons forts de la chaîne de solidarité qui a entendu le cri de détresse du Mali et qui a volé à son secours d’une manière ou d’une autre. Toutefois, l’on peut s’arrêter sur l’une d’elles : le roi du Maroc, Mohamed VI. En effet, l’insigne honneur fait au souverain chérifien traduit certes la gratitude du Mali à ce dirigeant qui a été la première personnalité arabe à adhérer à l’idée d’une intervention militaire internationale au Mali, mais offre surtout au Maroc une opportunité de tirer des dividendes politiques des évènements du Nord-Mali.

 

Le tapis rouge déroulé au roi du Maroc par le Mali peut être perçu comme un désaveu de la posture de l’Algérie dans la résolution de la crise du Nord-Mali

 

L’on peut, tout de suite, relever que la fermeté dont a fait preuve Ibrahim Boubacar Kéïta face aux velléités indépendantistes du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) n’est pas pour déplaire au successeur de Hassan II qui gère la question du Sahara occidental avec la même vision. Il y a donc une convergence de vues parfaite entre les deux hommes. La sollicitude du Maroc à l’endroit du Mali peut aussi se lire comme une volonté du royaume chérifien de s’implanter dans un pays considéré comme le parrain de la République Arabe Saharaouie démocratique (RASD). Nous sommes donc dans une situation d’offensive diplomatique dont le royaume chérifien est coutumier depuis le règne d’Hassan II. Enfin, le tapis rouge déroulé au roi du Maroc par le Mali peut être perçu comme un désaveu de la posture de l’Algérie dans la résolution de la crise du Nord-Mali. En effet, le Mali pourrait reprocher au voisin algérien, dont la puissance de feu est reconnue de tous, d’avoir adopté vis-à-vis du MNLA et des djihadistes une attitude de mollesse et de bienveillance.
Cela dit, le Mali qui a célébré légitimement la démocratie en campagnie de ses illustres hôtes, ne doit pas perdre de vue que les jours à venir ne seront pas de tout repos tant les défis à relever sont nombreux et immenses. Le pays doit d’abord éviter de replonger dans ce qu’il convient d’appeler la démocratie consensuelle.

 

Il s’agit donc, pour IBK, de tenir compte de ce passé politique récent pour tirer toujours le Mali vers le haut

 

Cette trouvaille politique avait permis à Amadou Toumani Touré, en l’absence du moindre contre-pouvoir, de mettre le Mali sous coupe réglée, toute chose qui a contribué à la mise en place d’une gouvernance éhontée et vermoulue que le capitaine Sanogo a vite fait de brandir pour justifier son putsch. C’est d’ailleurs pour avoir posé cet acte que Sanogo a pris place dans l’histoire politique du Mali. Des Maliens lui sont redevables d’avoir permis au monde de découvrir le visage hideux d’une pseudo-démocratie pourtant citée par la communauté internationale comme un exemple de démocratie. Il s’agit donc, pour IBK, de tenir compte de ce passé politique récent pour tirer toujours le Mali vers le haut, guidé en cela par cet enseignement de Senghor : « Le génie de l’homme consiste à transformer l’inconvénient en avantage ».
Les autres défis que IBK doit relever dans l’urgence sont la réconciliation nationale, le chômage des jeunes, le développement économique et social. En tous cas, après les libations, IBK est désormais face à ses défis.

YATTARA

SOURCE: L’Informateur

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