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Au Mali comme en Ukraine, les responsables de crimes de guerre doivent être jugés

L’armée malienne et des miliciens russes sont accusés d’avoir tués des centaines d’habitants de Moura, fin mars. Comme en Ukraine, des forces aux ordres de Vladimir Poutine sont impliquées. La Cour pénale internationale se doit d’enquêter et de traduire en justice les dirigeants incriminés.

Editorial du « Monde ». Certaines concomitances renforcent le caractère tragique de l’actualité. Au moment même où, dimanche 3 avril, à Boutcha, en Ukraine, étaient découverts des centaines de cadavres de civils après le départ de l’armée russe, un autre massacre était révélé : celui dont ont été victimes, entre le 27 et le 31 mars, des centaines d’habitants de Moura, un village situé au centre du Mali. Dans cette zone contrôlée par des djihadistes affiliés à Al-Qaida, les forces armées maliennes et des paramilitaires blancs identifiés comme appartenant au groupe russe Wagner ont, lors d’une opération antiterroriste, tué des centaines d’habitants.

 

Des soldats maliens et des miliciens russes ont rassemblé des hommes et procédé à des exécutions sommaires. Des fosses communes auraient été creusées par les villageois eux-mêmes. Ce scénario de l’horreur, recoupé par plusieurs sources, s’est soldé par la mort de « 203 combattants », selon le communiqué triomphant de l’armée malienne, qui se félicite d’avoir « procédé aux nettoyages systématiques de toute la zone ». Un bilan que l’ONG Human Rights Watch porte à « environ 300 hommes civils, dont certains soupçonnés d’être des combattants islamistes ».

La résonance entre le massacre de Boutcha et celui de Moura ne se limite pas à leur simultanéité et à une logique comparable, qui évoque clairement des crimes de guerre. Elle tient à l’implication, dans les deux cas, de forces aux ordres de Vladimir Poutine, puisque sont avérés les liens de la milice Wagner avec le président russe. Seule différence notable : alors que les événements d’Ukraine sont amplement médiatisés, images et témoignages de journalistes à l’appui, ceux du Mali se sont déroulés sans aucun témoin extérieur. La présence du millier de mercenaires russes continue même d’être niée par les militaires putschistes au pouvoir à Bamako.

Logique de « nettoyage »

Tout se passe comme si le départ programmé des troupes françaises de l’opération « Barkhane » précipitait la fuite en avant autoritaire des militaires maliens et leur collaboration avec le régime russe. Le Mali, où des médias sont bâillonnés et les voix discordantes menacées, est en proie à un inquiétant déchaînement de violence. Recrudescence de la violence djihadiste d’un côté, massacres de civils perpétrés par l’armée malienne épaulée par Wagner de l’autre, avec un niveau de brutalité jamais atteint.

 

L’arrivée des mercenaires russes, connus pour leurs exactions en Libye et en Centrafrique, accélère une dérive marquée par une logique de « nettoyage ». Particulièrement alarmant apparaît le déferlement de ferveur patriotique que la junte malienne parvient à susciter à chaque « succès éclatant » des forces armées, dans un pays secoué depuis plus d’une décennie par le djihadisme et menacé d’éclatement.

En Afrique comme en Ukraine, les responsables de crimes de guerre doivent être jugés. La justice internationale doit être dotée de tous les moyens pour enquêter sur les massacres qui, en suscitant haine et désir de vengeance, ne font qu’alimenter une spirale de violence destructrice. Les exemples de l’ancien président du Liberia Charles Taylor, condamné à cinquante ans de prison en 2012 pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre, ou celui de l’ancien président yougoslave Slobodan Milosevic, poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide, mort en 2006 en prison, montrent que des dirigeants impliqués dans de telles atteintes à la vie humaine peuvent être dûment traduits en justice.

Le Monde

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