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Attaque de Nice : un agresseur au profil indétectable ?

Le profil de l’agresseur de trois militaires en faction devant un centre communautaire juif de Nice, mardi 3 février, illustre la nouvelle menace à laquelle sont confrontés les services de renseignement. Un petit délinquant comme il y en a tant, au parcours erratique sans être inquiétant, sans connexion connue avec les cercles djihadistes, qui décide un jour de brandir un couteau de cuisine.

Peu après 14 heures, mardi, un jeune homme s’est approché d’un trio de soldats positionné place Massena dans le cadre du plan Vigipirate. Il a sorti une lame de son sac et a blessé légèrement deux militaires à la joue, à la main et au bras. Aussitôt interpellé, l’agresseur a été identifié par sa carte d’identité comme étant Moussa Coulibaly, 30 ans, originaire de Mantes-la-Jolie (Yvelines). La section antiterroriste du parquet de Paris s’est saisie de l’enquête, confiée à la Sous-direction anti-terroriste et à la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI).

Moussa Coulibaly est connu depuis plus de dix ans des services de police pour des faits de petite délinquance : vol, usage de stupéfiants, outrage à agents… Rien de bien méchant. Il a été condamné à six reprises entre 2003 et 2012 à des peines d’amende ou de prison avec sursis, la plupart du temps à Mulhouse, où il a vécu quelques années, selon une source judiciaire.

TENTATIVE DE VOYAGE VERS LA TURQUIE

Il y a peu, le jeune homme est apparu dans le viseur des services de renseignement pour des signes de radicalisation. Remarqué pour son « prosélytisme agressif » dans la salle de sport qu’il fréquente à Mantes-la-Jolie, il était devenu peu aimable avec les dames, explique une source policière. Il se serait par ailleurs échauffé sous la douche avec un homme au motif que ce dernier se lavait « nu ». Le 18 décembre, le service du renseignement territorial (SDRT) le signale à la DGSI. Pas de quoi mettre le jeune homme sur écoutes, estime la sécurité intérieure, qui laisse tout de même le soin au SDRT de garder un œil sur lui.

Début 2014, Moussa Coulibaly disparaît brièvement des radars. Il réapparaît le 27 janvier à Ajaccio, en Corse, dans une agence de voyages. Il demande un aller simple pour Ankara, en
Turquie. L’employé lui explique qu’il serait plus économique de prendre un aller-retour pour Istanbul. Le jeune homme en convient. Il prend donc un billet pour cette destination, le lendemain à 13 h 40, et fixe sans grande conviction une date de retour au 21 février. Mais il insiste pour que son vol comprenne de brèves escales à Nice et Rome.

Intrigué par ses exigences, sa destination et quelques doutes sur son passeport, l’employé appelle Air France, qui prévient la police aux frontières, laquelle alerte la DGSI. Le renseignement intérieur ressort de ses dossiers le signalement de Mantes-la-Jolie et fait le lien avec l’épisode de la douche. Faute de pouvoir l’empêcher légalement de prendre son vol, la DGSI prévient les Turcs de le renvoyer en France dès réception. Une surveillance physique est mise en place pour sa seule nuit à Ajaccio avant l’embarquement : l’homme a pris une chambre avec vue sur le golfe à l’hôtel Dauphin, ne voit personne, lave son linge, fait sa prière, puis prend l’avion.

A peine arrivé à l’aéroport d’Istanbul le 29, il est réexpédié à Nice, où les enquêteurs de la Direction régionale de la sécurité intérieure l’interrogent sur ses motivations. Le jeune homme assure qu’il entendait faire du tourisme en Turquie, et demande qu’on le laisse rentrer à Ajaccio pour y retrouver sa petite amie, dont il est incapable de fournir le nom ni l’adresse. Faute d’éléments suffisants pour ouvrir une procédure judiciaire, les policiers le relâchent, et mettent en place une surveillance à Ajaccio.

Mais le jeune Mantais ne retourne pas en Corse. Il prend une chambre dans un hôtel niçois. Intrigués par son soudain intérêt pour la côte d’Azur, les services de renseignement mettent en place un dispositif de « surveillance d’environnement », afin de déterminer s’il a des relations dans la région. Peine perdue : le jeune homme erre pendant quelques jours, « picole un peu, tape des clopes dans la rue, discute avec des SDF », explique une source proche du dossier. Intriguant, mais toujours rien d’alarmant.

UNE AGRESSION « RÉVÉLATRICE D’UN CLIMAT »

Mardi, place Massena, Moussa Coulibaly a fait tomber un sac devant un militaire qui s’est empressé de le ramasser. Ce dernier a eu la joue transpercée. Le jeune homme n’a pas crié « Allah Akbar ». Il n’a rien dit. Le parquet antiterroriste s’est saisi de l’enquête en raison de ses cibles et de sa volonté de rejoindre la Turquie. Le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, s’est gardé d’évoquer une attaque « terroriste », préférant parler d’« acte criminel ».

« C’est une agression d’une gravité relative, mais elle est révélatrice d’un climat, explique une source proche des services de renseignement. Un type un peu paumé, difficile à détecter, qui passe subitement à l’acte. On s’attend à ce que ce phénomène se répète ». La question se posera peut-être du suivi de ces velléitaires du djihad qui, frustrés de n’avoir pu rejoindre la Syrie, se lancent dans des opérations désespérées sur le sol français.

L’agression de Moussa Coulibaly n’est pas sans rappeler celle commise le 20 décembre par Bertrand Nzohabonayo, qui avait attaqué trois policiers au couteau de cuisine au commissariat de Joué-les-Tours. Il s’agissait déjà d’un profil « signalé » à la DGSI pour des signes de radicalisation religieuse, mais pas assez inquiétant pour justifier la mise en place d’une surveillance physique.

Le jour de l’attaque de Nice, l’Etat islamique a diffusé une vidéo intitulée « Faites exploser la France (2) ». Un homme masqué, armé d’une kalachnikov et entouré de ses « frères » d’armes, exhorte en français ceux qui sont « dans l’incapacité » de partir en Syrie à « passer à l’action ». « Tuez à l’aide d’un couteau un policier (…) ou un militaire », lance-t-il. Le premier épisode de ce film avait été mis en ligne la veille de l’attaque de Joué-les-Tours.
source : Lemonde

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