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Assises spéciales de Bamako : Proxénètes au cachot

Elles ont miroité l’eldorado à trois de leurs compatriotes, mais en réalité, c’était les pousser à la prostitution dans le but d’amasser de l’argent. Elles ont payé de leur acte

 

Parallèlement aux dossiers de terrorisme au rôle de la session spéciale actuellement en cours à la Cour d’appel de Bamako, les juges n’ont pas exclu de trancher d’autres affaires parmi lesquelles, celle portant sur la traite de personne. Ces faits sont prévus et punis par les dispositions des articles 1 et 7 de la loi n°2012-03 du 12 juillet 2012 relative à la lutte contre la traite des personnes et pratiques assimilées.

I.O alias Ifema et R.O sont deux jeunes Nigérianes qui ont eu le malheur de tomber sous les coups des dispositions du code pénal punissant l’infraction suscitée. Quadragénaires, elles sont toutes deux célibataires et évoluaient dans le monde de la prostitution. Avec le temps, elles gagnaient beaucoup d’argent. C’est pourquoi, elles ont fini par faire de cette pratique leur métier. L’appétit vient en mangeant, dit-on. Pendant le temps que ces deux filles pratiquaient le plus vieux métier du monde, les rentrées d’argent dans leurs caisses étaient quasi continues.

C’est ainsi qu’elles ont visé plus loin dans l’espoir de tirer le plus grand profit de ce travail afin d’amasser davantage plus d’argent. Pour ce faire, les deux jeunes dames ont, de commun accord, décidé d’élargir leurs champ d’action. C’est ainsi qu’elles ont décidé de procéder par le recrutement d’autres jeunes filles pour le même travail.

C’est ainsi que I.O est parvenue à contacter trois jeunes filles, toutes des compatriotes à elle. Elles les convainc en miroitant une vie de rêve à Bamako et Dakar. à ses futures employées, elle a expliqué qu’elle faisait le commerce entre ces deux villes de l’Afrique de l’Ouest. C’était une façon pour elle de les exploiter. Sans grande difficulté, son plan a marché comme sur des roulettes. Elle a pu convaincre ses trois compatriotes qui ont plié bagages pour la rejoindre à Bamako. Mais avant, la jeune dame avait tout mis en place. Une fois que ses futures employées ont mis les pieds à Bamako, elle les a dirigées directement chez « R », une de ses complices également compatriote.

Pendant un bon moment, les trois filles ont été sexuellement exploitées sans état d’âme par I.O et R.O qui, en retour tiraient le maximum de profit de leur travail du point de vue financier.
« Chaque chose a une fin », dit un adage. Pendant longtemps, les trois jeunes filles travaillaient dur nuitamment. Mais en réalité, aucune d’elles ne tirait réellement profit du fruit de son labeur. Lasses de s’être adonnées à fond pour ce métier qui ne leur rapportait plus quasiment grande chose, avec le temps, elles ont fini par ouvrir leurs yeux, comme on le dit. Elles se sont ainsi concertées pour saisir la justice.

Les juges ont instruit aux enquêteurs de se mettre à la tâche pour éclaircir cette affaire dans laquelle les deux dames citées plus haut étaient impliquées. Elles ont été interpellées et renvoyées devant les jurés de la Cour d’assises, afin d’ y être jugées conformément à la loi.
Comme c’est le cas dans la plupart des affaires de ce genre, dès l’information de leurs dossiers, les deux présumées auteures ont nié les faits. Mais face à la rigueur des auditions, elles ont fini par avouer leurs actes. Pour se justifier, I.O n’est pas allé par le dos de la cuillère.

Elle a clairement expliqué que les filles victimes étaient venues chez elle pour approfondir leurs connaissances dans le domaine de la prostitution. Cependant, elle a écarté toute idée tendant à faire croire qu’elle a reçu de l’argent de la part de ses victimes, si ce n’est le remboursement de la somme qu’elle a mise dans leur transport.

Quant à sa co-accusée R.O, elle a focalisé sa défense sur le fait qu’elle ne sait rien du voyage des victimes, lorsque ces dernières ont quitté leur pays pour rejoindre le Mali. Mieux, pour se montrer plus convaincante, l‘accusée a soutenu mordicus qu’elle n’a joué aucun rôle dans le métier que ses compatriotes exerçaient depuis qu’elles sont arrivées à Bamako.

Les inculpées sont restées fidèles à leur stratégie de défense durant tout leur procès. Chose qui a semblé faciliter la suite des évènements pour les jurés. Dans la même veine, pour éclairer la lanterne de la Cour, I.O a expliqué la façon dont elle avait enrôlé les trois filles pour ensuite organiser leur voyage sur la capitale malienne.

Mais dans l’espoir d’amoindrir le cœur des juges, l’accusée a préféré parler d’emploi dans le plus vieux métier du monde, que d’exploitation sexuelle de ses trois compatriotes. « Oui, elles travaillaient pour elles-mêmes et devaient me rembourser l’argent que j’avais dépensé pour assurer leur transport », a-t-elle répondu à une question du président qui voulait comprendre si les filles étaient autonomes ou soumises à une exploitation.

Partant de tout ce qui précède, la Cour s’est montrée sceptique quant aux dires des deux accusées. Ainsi, ils ont confronté leurs déclarations et celles des victimes, tenues pendant l’enquête préliminaire. De cette confrontation, il a été établi que les trois jeunes filles faisaient de la prostitution pour le compte des deux dames accusées. « Vous avez intérêt à nous dire la vérité tout comme cela ressort dans les procès-verbaux », a indiqué l’un des juges. En réponse, les accusées sont restées silencieuses. Après quelques instants de silence, l’une d’elles a fait savoir qu’elle ignorait que son acte était interdit par la loi malienne. Le ministère public a rappelé les circonstances dans lesquelles les faits se sont passés.

Dans son rôle de défenseur des citoyens, le parquet a chargé les mis en cause avant de requérir de les retenir dans les liens des accusations. L’un des conseils des accusées a sollicité la Cour de décharger R.O des faits car, dit-il, celle-ci semble n’être mêlée ni de près ou de loin. Leur avocat a centré sa plaidoirie sur le fait que les accusées ignoraient l’acte qu’elles ont posé c’est pourquoi, il a sollicité la clémence de la Cour. Après délibération, elles ont été reconnues coupables. Elles n’ont pas aussi bénéficiées de circonstances atténuantes et ont été condamnées à 10 ans de réclusion criminelle chacune.

Zoumana Tiedie DOUMBIA

Source : L’ESSOR

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