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Amnesty International dénonce la détention d’enfants soldats au nord

Combats entre militaires maliens et français et islamistes, le 21 février dernier à Gao. REUTERS

Combats entre militaires maliens et français et islamistes, le 21 février dernier à Gao.
REUTERS

Pour la première fois, le Mali apparait dans le rapport annuel de l’ONU sur les enfants et les conflits armés. Dans son rapport sur l’année 2012, l’organisation des Nations unies accuse les groupes islamistes, les rebelles touaregs et les milices pro-gouvernementales d’avoir exploité et recruté des centaines d’enfants durant le conflit dans le nord du pays. De son côté, Amnesty International a mené une enquête auprès de certains de ces enfants, aujourd’hui détenus à Bamako dans des conditions inacceptables.

L’Onu a dénoncé « l’exploitation et le recrutement massifs » de centaines d’enfants – principalement des garçons de 12 à15 ans – par le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), par Ansar Eddine et al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Des milices pro-gouvernementales ont également été pointées du doigt : « Dans la région de Mopti-Sévaré, sous contrôle du gouvernement, des informations ont été reçues concernant le recrutement d’enfants par les milices Ganda Izo, Ganda Koy et les Forces de libération du Nord », lit-on dans le document.

 

 

Selon le rapport, ces enfants ont été recrutés – ou enlevés de force – en raison, souvent, de leur pauvreté ou de leur appartenance ethnique. Il arrivait ansi que MUujao et Ansar Dine donnent de l’argent aux parents en leur promettant que leurs enfants recevraient un enseignement coranique. Certains enfants ont combattu dans les montagnes de l’Adrar  avec les islamistes et ont été utilisés comme boucliers humains contre les armées française et tchadienne, début 2013. Plusieurs d’entre eux ont été tués ou mutilés.

 

 

Le rapport de l’ONU recense également 211 cas de sévices sexuels – viols, esclavage sexuel, mariages forcés – contre des fillettes par des combattants du MNLA, du Mujao, Ansar Dine et Aqmi.

 

 

Joint par RFI, le colonel Adghaïmar ag al Housseini dément ces informations. « Nous avons fait plusieurs campagnes de sensibilisation pour éviter le recrutement d’enfants dans les rangs des combattants », a-t-il déclaré.

 

 

Démenti également de Djibril Diallo, chef d’Etat major des Ganda Koy, milice sédentaire pro gouvernementale accusée d’avoir enrôlé des filles et garçons mineurs dans leurs rangs. « On prend des personnes entre 18 et 35 ans. Nous avons un système de contrôle. Quand la personne n’atteint pas 18 ans, on la refoule. On n’en n’a pas besoin parce que nous, nous avons besoin d’hommes », a-t-il précisé à RFI.

 

 

Détention d’enfants soldats à Bamako

 

 

L’inquiétude du moment, c’est le sort de ces enfants soldats dont certains sont détenus dans les prisons maliennes. Gaëtan Mootoo, chercheur pour Amnesty International, s’est rendu tout récemment à Bamako où il a pu rencontrer neuf enfants en détention dont six à la prison civile et trois au camp 1 de la gendarmerie.

 

 

Gaëtan Mootoo a recueilli leurs témoignages. Certains de ces enfants lui d’abord raconté comment ils ont été enrôlés par le Mujao qui leur promettait de l’argent et comment ils ont été, par la suite, arrêtés.

 

 

Leur arrestation est survenue au moment de l’arrivée des troupes françaises et maliennes, principalement à Gao. Certains de ces enfants se sont eux-mêmes rendus après avoir entendu, à la radio, des annonces invitant les personnes qui avaient collaboré avec le Mujao, de se rendre à la gendarmerie. Une fois auditionnés, ils ont alors été transférés à Bamako.

 

 

D’autres enfants racontent qu’ils ont été arrêtés par des patrouilles mixtes – à la fois par les soldats maliens et par les soldats français – ou encore par les troupes françaises.
Ces enfants ont, pour certains, à peine 13 ans et sont poursuivis pour atteinte à la sureté de l’Etat et association de malfaiteurs.

 

 

Joint par RFI, Gaëtan Mootoo s’inquiète : leur détention ne respecte pas la législation malienne ni les conventions internationales sur les droits des enfants. Le témoignage d’un enfant soumis à des mauvais traitements, notamment dans les locaux de la sécurité d’Etat , est effrayant : « On l’a attaché et suspendu à un plafond et il y est resté pendant 15 minutes. On l’a menacé avec des décharges électriques. Il y avait des menaces de mort qui étaient proférées contre lui », a rapporté l’enquêteur d’Amnesty International.

 

 

L’armée française est, elle aussi, pointée du doigt : les Français ont remis plusieurs enfants soldats à l’armée malienne et, pour l’un d’eux au moins, les droits de l’enfant n’ont pas été respectés.

 

 

« Il nous nous a raconté que lors des entretiens qu’il a eu avec les Français, il avait les mains attachées. On ne lui a jamais demandé son âge. Nous estimons que c’est contraire au droit international et aux engagements pris par les Français », dénonce Gaëtan Mootoo.

 

 

De son côté, Leila Zerrougui, représentante spéciale de l’ONU pour les enfants et les conflits armés, rappelle qu’il existe des agences qui s’occupent notamment de la protection des enfants. « Ils doivent les remettre aux humanitaires. L’Unicef est là pour prendre ces enfants. Il faut continuer à le dire : ce sont des victimes ; des victimes des adultes ».

 

 

Amnesty international mais aussi l’ONU demandent aux groupes armés de renoncer à l’enrôlement des enfants soldats et demandent instamment aux autorités de Bamako de ne pas laisser plus longtemps ces enfants en prison.

 

Par RFI

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