« Quand le fanatisme s’empare des esprits, les femmes crient, les fous se débattent, les imbéciles croient et voilà le plus méprisable des êtres, le plus maladroit fripon, le plus lourd imposteur qui eût encore paru, le voilà Dieu, le voilà fils de Dieu égal à son père (…) ». Cette pensée est extraite de Justine, t. I, p. 79-80, de Donatien Alphonse François de Sade. Ce grand homme de lettres du XVIIIème siècle, romancier, philosophe, homme politique français et contemporain de Robespierre, résume l’embrigadement intellectuel et religieux auquel sont assujetties les populations des régions du centre du Mali.
A cause de l’absence notoire et prolongée de l’Etat, des fanatiques religieux se sont rendus maîtres des lieux, en prêchant un islam rigoureux et extrémiste. Comme « la nature a horreur du vide », ces hommes sans loi, ni âme, sont en train de proposer une « alternative meilleure » aux populations des deux régions du centre du Mali. Ils commettent régulièrement des attentats et enlèvements aveugles, empêchant les braves populations de s’adonner à leurs activités agricoles, d’élevage et de pêche. Ce qui a pour conséquence, une paupérisation générale de la population dont la couche juvénile, qui n’arrive pas à quitter les lieux à la recherche d’un avenir meilleur, se résigne, de gré ou de force, à adhérer aux thèses fanatiques.
Cette situation périlleuse, si les autorités maliennes ne cherchent pas immédiatement à l’arrêter, risque de provoquer une gangrène généralisée dans les régions du centre du Mali. Le Premier ministre sortant, conscient de l’insécurité grandissante et du manque de services régaliens de base de l’Etat, avait fait le déplacement dans ces localités. A cette occasion, il avait émis l’idée de faire la paix avec les repentis. Entre temps, il a quitté les affaires et la première visite de son successeur, Soumeylou Boubèye Maïga, a été consacrée à ces deux régions.
Pour éradiquer le mouvement terroriste d’obédience religieuse dans ces localités du centre, Soumeylou Boubèye Maïga a menacé d’aller chercher les bandits armés et terroristes où qu’ils se cachent pour les neutraliser. Ce qui va nécessiter le déploiement progressif d’un effectif considérable des Famas dans la région de Mopti « pour qu’il n’y ait plus un mètre carré du territoire qui soit hors de notre contrôle… Nous ferons tout pour récupérer tous ceux qui sont récupérables et nous combattrons ceux qui devront être combattus. C’est le moment de choisir son camp ».
Mais, il y a vraiment un problème. Car, si l’actuel Premier ministre et son prédécesseur sont en phase sur la question de la récupération des terroristes repentis, le Président de la République, dans une récente interview, remet en cause toute possibilité de négociation avec les radicaux, quels qu’ils soient. Le Chef de l’exécutif malien va jusqu’à minimiser le terrorisme qui sévit dans ces régions, en confiant à notre confrère le « Monde » que ce ne sont que des phénomènes sporadiques et qui ne visent que les troupes de l’armée et celles de la Minusma. Une excroissance, d’après lui, du phénomène terroriste au nord du Mali. IBK compte alors désormais sur les seules forces de l’armée malienne pour endiguer le phénomène terroriste dans la région de Mopti.
Pourtant, il ne faut pas que notre cher président continue de se méprendre, puisque que les régions de Ségou et Mopti appartiennent à ce que l’on appelle communément « le Mali utile ». Pour la simple raison qu’elles constituent à elles seules, le principal grenier du Mali, mais aussi, la zone d’élevage et de pêche par excellence pour notre pays. Il y a donc vraiment urgence à stopper la gangrène afin qu’elle ne se généralise, en allant de la gangrène spirituelle pour atteindre le tissu économique et social.
Gaoussou Madani Traoré
Source: le Challenger