Le chef des talibans aurait été blessé par balle le 1er décembre, alors que le Pakistan tente de relancer le dialogue entre Kaboul et les insurgés.
Mort ou vif ? Le porte-parole de la vice-présidence afghane a annoncé mercredi que le chef des talibans, le mollah Akhtar Mansour, avait été grièvement blessé lors d’une réunion avec un commandant taliban, Abdullah Sarhadi, près de Quetta, auPakistan. Aux dires de la vice-présidence, le ton serait monté durant l’entretien mardi, si bien que les deux parties auraient sorti les armes. Cinq talibans auraient été tués, dont Abdullah Sarhadi. Akhtar Mansour aurait survécu, « mais nos sources indiquent qu’il est très grièvement blessé et qu’il est hospitalisé. Nous tenons cette information de plusieurs contacts en Afghanistan, et le NDS, l’agence de renseignement afghane, a confirmé mercredi matin. Nous ne savons rien d’autre pour l’instant », affirme Sultan Faizi, le porte-parole du vice-président afghan.
Les talibans démentent
Le site officiel des talibans s’est empressé de démentir mercredi. « Cette affirmation n’est qu’une fabrication des services de renseignements ennemis. Nos sources indiquent que l’émir des croyants (Akhtar Mansour) n’est pas dans la région de Quetta, et il n’a pas été attaqué. » À ce stade, le communiqué des talibans manque de crédibilité. L’organisation s’était acharnée à faire croire pendant au moins deux ans que son chef historique, le mollah Omar, était vivant, avant de reconnaître sa mort en juillet. Ensuite, jeudi matin, Akhar Mansour n’avait donné aucun signe de vie alors que des sources talibanes confirmaient l’incident sous couvert d’anonymat.
Vraie ou fausse, la rumeur tombe mal. Le Pakistan tente de redémarrer le processus de paix entre le gouvernement afghan et les talibans. Lundi, le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif a rencontré le président afghan Ashraf Ghani, en marge de la COP21 à Paris. Dans la foulée, Nawaz Sharif a déclaré, dans un communiqué : « Nous avons confiance dans la capacité du gouvernement afghan et des talibans à formuler des solutions concrètes et à engager un dialogue. Le Pakistan est prêt à les aider. » Plusieurs hauts responsables talibans séjournent au Pakistan depuis 2001, et les services secrets pakistanais peuvent faciliter les prises de contact entre les insurgés et les autorités afghanes. Mais les relations entre les deux pays sont tendues. Les forces de sécurité afghanes accusent l’armée pakistanaise de protéger les bases arrière du réseau de Sirajuddin Haqqani, un groupe allié aux talibans.
Trêve hivernale
Malgré tout, Ashraf Ghani n’a pas rejeté l’offre pakistanaise. L’hiver s’est installé en Afghanistan et la saison n’est guère propice aux combats. Cette trêve hivernale offre l’occasion d’entamer des pourparlers. « Nous allons nouer le dialogue avec certains groupes talibans et si certains d’entre eux veulent discuter avec nous, via le Pakistan, on peut en parler. Le Pakistan peut être un intermédiaire », a indiqué Ashraf Ghani lors d’un entretien à France 24, réalisé à Paris.
Problème : si Akhtar Mansour est partisan du dialogue avec Kaboul, l’incertitude autour de son état de santé laisse planer le doute sur de nouvelles négociations. Ce dernier développement n’est pas sans rappeler les circonstances de l’annonce de la mort du mollah Omar en juillet. À l’époque, c’étaient les services de renseignements afghans qui avaient diffusé l’information alors qu’une rencontre venait d’avoir lieu au Pakistan entre émissaires talibans et représentants du gouvernement afghan, une première depuis l’investiture d’Ashraf Ghani en septembre 2014. Une seconde rencontre devait se dérouler peu après, jusqu’à ce que l’information sur le décès du mollah Omar fasse tout capoter. Cette fois, la rumeur autour d’Akhtar Mansour est venue du bureau du vice-président afghan, Abdul Rashid Dostum, un ancien seigneur de guerre qui n’a jamais caché sa haine envers les talibans.
Source: Le Point.fr