Suite à l’échec des négociations avec le gouvernement, les syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016, ont une fois de plus décrété un mot d’ordre de grève de 240 heures, qui a débuté le lundi 21 janvier pour se terminer au vendredi 1 février. Pour expliquer ce qui constitue le goulot d’étranglement avec le gouvernement, le porte-parole des dits syndicats, Adama Fomba a bien voulu se prêter à nos questions. Selon lui, ce qu’ils demandent, n’est pas au-dessus des moyens de l’Etat. Que leurs doléances ne concernent que l’école et le personnel enseignant.
Le Sursaut : Des écoles primaires et secondaires paralysées depuis quelques jours sur plusieurs localités du pays, parlez-nous des raisons de cette grève ?
AdamaFomba : La raison est toute simple. Il s’agit de l’insatisfaction de nos points de revendications. Nous sommes à notre troisième préavis de grève depuis le début de cette année scolaire. Le gouvernement du Mali, ne s’est pas inscrit dans le cadre du dialogue.
Les syndicats de l’éducation ont souhaité rencontrer le ministre de l’Education dès le mois d’octobre à l’ouverture des classes. Nous lui avons soumis notre cahier de charges (doléances) composé de 11 points de revendications, cela, pour qu’on puisse trouver ensemble une solution dans le cadre du dialogue social. Mais, malheureusement le gouvernement ne s’est pas inscrit dans cette logique. Du coup, les syndicats n’avaient pas d’autre choix que d’aller en grève. Aujourd’hui, nous sommes en grève autour de 10 points de doléances.
Parmi ces 10 points de revendications, le gouvernement s’est-il montré favorable à l’application de certains ?
AF : Avant cette grève du 21 janvier au 1er février 2019, nous avons eu trois jours (partant du jeudi 17 janvier à la fin de la semaine) de négociation avec les autorités. Nous sommes convenus sur quatre points de doléances. Il s’agit, de la régularisation de la situation administrative et financière pour des sortants des grandes écoles comme l’ENSUP et autres, de l’application effective et immédiate du décret relatif aux primes des fonctionnaires dans le cadre de leur mission, de l’intégration des fonctionnaires non enseignants dans les corps des enseignants et l’adoption immédiate du projet de décret portant plan de carrière du personnel enseignant.
Les autres six points de revendications non retenus par le gouvernement sont : l’octroi d’une prime de documentation, l’octroi d’une prime de logement, la relecture du décret 529, l’annulation des décrets 0800 et 0801, l’accès des fonctionnaires enseignants des Collectivités aux services centraux de l’Etat.
Quelle est la situation des négociations avec les autorités ?
AF : Les syndicats de l’éducation sont ouverts au dialogue à tout moment, nous sommes disposés à aller les écouter. Le gouvernement nous a demandé un moratoire sur plusieurs mois, nous leur avons dit que nous ne sommes pas des plaisantins. Un mouvement qui a commencé depuis le mois d’octobre et si c’est aujourd’hui que le gouvernement nous demande de leur accorder un moratoire, cela veut dire que l’éducation n’est pas sa préoccupation. C’est regrettable vraiment qu’on ne prenne au sérieux l’Education.
Nos doléances ne concernent que l’école et le personnel enseignant. On ne peut pas aller à un enseignement de qualité sans le personnel enseignant dans le minimum de conditions.
En principe, votre mot d’ordre de grève s’expire le vendredi 1er février 2019, quelles seront vos futures actions si les points de revendications ne sont pas satisfaits ?
AF : Nous allons nous réserver de ne pas dévoiler ce que nous avons planifié comme actions dans les jours à venir. Mais ce qui est sûr, il y aura d’autres préavis et actions, au moment opportun, nous allons informer la presse de ces actions.
Etes-vous en collaboration avec les parents d’élèves ou l’Association des Elèves et Etudiants du Mali (AEEM), car après tout leur avis doit être considéré quand-même ?
AF : Nous n’avons pas de collaboration avec l’AEEM ni avec leur représentant. Nous sommes organisés en syndicat, nous ne pouvons que compter sur le personnel enseignant (nos militants). Il n’y a aucun lien avec l’AEEM. Pour les parents d’élèves, ils sont là comme la partie de conciliation entre nous et l’autorité.
En cas de non aboutissement de vos doléances, est-ce qu’on peut s’attendre à une année blanche ?
AF : Cela dépendra de la responsabilité du président de la République, du Premier ministre et des membres du gouvernement. Parce que si toutefois, ils donnent un traitement acceptable à nos points de revendications, il n’y a pas lieu d’aller à une année blanche. Mais s’ils prouvent à l’opinion nationale et internationale que l’école n’est pas leur priorité, les grèves vont s’en suivre.
Alors qu’il y a un temps d’apprentissage à atteindre pour que l’année ne soit pas menacée. Ce que nous demandons n’est pas au-dessus des moyens de l’Etat. Nous avons dit la paix, c’est vrai ! Mais nous avons beau acheté les armes, des bombes atomiques, des avions et autres, si la nation n’est pas construite, si les générations qui devraient prendre la relève ne sont pas bien formées, nous partons droit au mur. La priorité des priorités doit être la prise en charge du personnel enseignant pour une école de qualité.
Quel appel lancez-vous à l’opinion nationale ?
AF : A l’opinion nationale et internationale, nous leur disons qu’aujourd’hui, les syndicats de l’éducation sont unis et cela pour une école performante. Nous disons aux parents d’élèves que ce mouvement est pour un enseignement de qualité. Il n’est nullement contre l’intérêt des enfants.
Aux autorités, nous leur disons que s’occuper du personnel enseignant, satisfaire les points de revendications des syndicats de l’éducation est de joindre l’acte à laparole. Car au regard des discours du président de la République, l’éducation semble être au cœur de ses préoccupations.
Propos recueillis par Mariam SISSOKO
Le Sursaut