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Accueil mitigé du gouvernement Choguel : Entre réserves et oppositions, des prémices de brouilles !

Visiblement, le nouveau Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, semble avoir été à la bonne école : choisir comme ministres des personnalités sans l’avis de leurs partis ou associations. Du coup, s’attacher ainsi des fidélités et semer les graines de la division au sein des formations concernées au risque de les affaiblir ! Si bien évidemment, le nouveau chef du gouvernement n’a plutôt pas été un peu bousculé, voire mis devant le fait accompli dans le choix des membres de son équipe.

Choguel l’avait assuré : son équipe était attendue au plus ce dimanche 13 juin. Mais dans l’après-midi de ce vendredi, l’annonce a été plus qu’une surprise dans nombre d’écuries politiques. L’anecdote assure qu’un regroupement, en chemin avec les CV de ses ministrables choisis, a appris l’annonce sur les antennes de l’ORTM. Comme pour dire que bien des structures ont été cueillies à froid. Et les réserves ne manquent pas, même dans les rangs du Mouvement dirigé par le président lui-même devenu Premier ministre.

 Tièdes réactions au M5-RFP

Il est vrai que la vice-présidente du M5, Mme Sy Kadiatou Sow, certainement dans le rôle de suppléante du coordinateur du Comité stratégique, a ainsi fait le service minimum, en assurant dans un communiqué que «Le Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) félicite le Président de la Transition le colonel Assimi Goïta et le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga pour la mise en place diligente d’un gouvernement d’ouverture». Mais sans plus !On ne peut en effet guère dire que l’enthousiasme soit particulièrement débordant, du côté de la contestation populaire, pour accueillir ce nouveau gouvernement de la Transition, pourtant dirigé par son principal coordinateur.

Mieux, les réserves l’emportent largement, avec plus ou moins de verdeur, après l’annonce, ce vendredi 11 juin, de la composition du nouvel exécutif. Déjà, au niveau du M5-RFP, dont pourtant ce devrait être «la grande affaire». Du moins, à en croire ces propos du cinéaste Cheick Oumar Sissoko, chef de file de la plate-forme EMK, l’un des fers de lance politico-associatifs ayant initié le regroupement de la contestation contre le défunt régime de IBK.

L’ancien secrétaire national de SADI a jeté une douche froide sur l’échiquier en déclarant nettement n’avoir pas été associé, de près ou de loin, au supposé choix du M5 porté sur le président intérimaire du FSD et président du Comité stratégique pour devenir le futur Premier ministre, un poste dévolu à l’ancienne contestation par le patron de la junte, se préparant à devenir de fait le nouveau président de la Transition. «Je n’ai pas participé au choix de Choguel Maïga comme Premier ministre», a-t-il tenu à préciser comme pour prendre date.

On aura tout aussi noté le silence assourdissant des principaux leaders du M5-RFP, notamment Me Mohamed Aly Bathily ou Koniba Sidibé, entre autres, pour les moins aptes à transiger sur leurs opinions, ou de Me Mountaga Tall, l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, pour ne citer que ceux-ci qui n’ont pas été très prolixes en chaleureuses félicitations. Même dans les rangs de l’URD, dont pourtant deux cadres ont été retenus, l’accueil paraît mitigé.

Sur les vingt-huit membres de son équipe, Choguel a certes pu placer huit ministres issus du M5-RFP, mais à des postes plus ou moins honorifiques et peu à même de peser davantage sur le cours des événements.Ainsi, en est-il d’Ibrahim Ikassa Maïga de l’Urd, dont le troisième rang protocolaire ne rime pas du tout avec le poids de son département de la Refondation de l’Etat, chargé des Relations avec les institutions, quant à imprimer activement les orientations contenues dans les dix mesures ou exigences du M5 pour rectifier la Transition.

De même, cela semble une opinion largement partagée concernant les ministres du gouvernement, au titre de la contestation populaire anti-IBK comme la syndicaliste, Mme Sidibé Dédéou Ousmane à l’Education nationale, Mme Diawara Aoua Paul Diallo, second membre de l’URD, au département du Travail, de la Fonction publique et du Dialogue social, le CNID  Bréhima Kaména à l’Urbanisme, l’Habitat, les Domaines, l’Aménagement du Territoire et la Population,  les associatifs Bakary Doumbia et Mme Wadidiè Founè Coulibaly, respectivement aux départements de l’Entrepreneuriat national, l’Emploi et de la Formation professionnelle ainsi que de la Promotion de la femme, de l’Enfant et de la Famille. Modibo Koné vient compléter ce tableau, à l’environnement, à l’Assainissement et au Développement durable, quand l’Imam Ouamarou Diarra se retrouve délégué auprès du ministre de la Santé et du Développement social, pour prendre en charge l’Action humanitaire, la solidarité, les réfugiés et les déplacés.

Cependant, tout porte à croire que le Comité stratégique n’a pas eu son mot à dire quant à ces choix et encore moins les formations ou associations d’origine des personnalités choisies. Ce qui suscite des interrogations quant à l’implication et la contribution du Mouvement hétéroclite, en tant qu’entité, dans la formation de cet exécutif.

D’où apparemment les réserves polies des responsables des formations et associations concernées. Les rencontres successives de ce lundi 14 juin, entre le Premier ministre et ses prédécesseurs ainsi que les différents démembrements du M5-RFP, Comté stratégique et coordinations des femmes et des jeunes, participent certainement des efforts de l’ancien président à gommer les aspérités de relations internes en passe de devenir conflictuelles.

Réserves, défiance et condamnations au sein de la classe politique

Pour les autres structures associatives et politiques du landernau, la dynamique inclusive n’aura pas été au rendez-vous, en dépit des promesses du colonel Assimi et de Choguel et comme le présageaient les consultations préliminaires. Du moins, l’assure-t-on, dans une certaine unanimité tant du côté de ce qui reste de l’alliance EMP autour du RPM que de l’Adema et du Parena, autant que du FSD-SAP, la dissidence de l’opposition autour de Tiébilé Dramé qui avait rejoint IBK en 2018. Si l’ancien parti majoritaire dit prendre «acte de la formation du gouvernementl’Adema-PASJ constate (néanmoins) avec regret que la composition du nouveau gouvernement ne reflète pas la promesse d’inclusivité faite avant sa formation».

Le Parena ne prend guère de gants pour dénoncer avec virulence, à travers la composition de ce gouvernement, «les jalons d’une transition non inclusive et de la fuite en avant». Mieux, le parti du dernier ministre des Affaires étrangères d’IBK se dit inquiet «des risques d’instabilité liés à une transition non consensuelle et aux manquements des engagements pris solennellement devant le peuple malien et la communauté internationale», tout en condamnant «la violation flagrante des conclusions du Dialogue national inclusif et de la Charte de la Transition qui fixent le nombre de ministres au maximum à 25», au lieu des 28 actuels avec des saignées financières consécutives jugées inacceptable.

L’imam en embuscade…

Mais le plus sérieux avertissement, à travers l’interview qu’il a accordée à Jeune Afrique, est venu de l’Imam Mahmoud Dicko, dont on sait que les proches ont été écartés de ce gouvernement. Certes, le Premier ministre semble couper l’herbe sous le pied de l’ancienne autorité morale de la contestation anti-IBK. Ainsi, Youba Bah, le président de l’ADP-Mali, la formation d’obédience hamalliste et un des très fidèles du Chérif de Nioro, a été sollicité comme ministre délégué auprès du ministre du Développement rural, pour être chargé de l’Elevage et de la pêche.

Mais cette intervention au vitriol du prêcheur wahhabite, à la fois contre la France et accessoirement contre la Russie (pour ceux qui en nourrissent la lubie) et les mises en garde contre les autorités de la Transition, n’en laissent pas moins apparaître qu’il entend conserver toute son indépendance de jugement  et donc d’action.

Si bien que ce n’est pas la présence d’un proche du Chérif de Nioro, son mentor, qui le retiendra dès lors que même la présence de ses proches dans l’équipe Moctar Ouane, comme Mohamed Salia Touré d’ailleurs écarté par Assimi et Choguel, ne l’avait retenu en son temps.

Choguel Maïga a beaucoup de pain sur la planche autant qu’il a encore du grain à moudre pour filer une métaphore meunière. Le second exécutif, bien qu’ayant bénéficié d’assez de préjugés favorables, semble cependant naître avec de sérieux handicaps. Ne serait-ce que par la manière à la hussarde de sa composition !Un remake relooké du gouvernement Moctar Ouane ?

 

Mohamed Ag Aliou

Source: Nouvelle Libération
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