Plage de Ouakam! Djaraf Samba et ses collègues pêcheurs discutent à l’ombre des pirogues colorées accostées sur la plage. Tous se plaignent de la raréfaction des poissons et pointe du doigt les chalutiers européens et chinois qui épuisent le stock de poisson, une ressource vitale pour les pêcheurs.
“Il y a de moins en moins de poissons parce qu’il y a de plus en plus de gros bateaux qui viennent pêcher dans nos eaux”, soupire Djaraf Samba. Le pêcheur d’une quarantaine d’années explique : “Les grands bateaux d’Europe et de la Chine viennent pour pêcher dans nos eaux et ils prennent tous nos poissons”.
“Le poisson rare et cher”
Une baisse des ressources confirmée par les chiffres du ministère sénégalais des Pêches et de l’Economie maritime. Le total des prises de poisson a chuté de 43 % entre 2000 et 2022. Cette diminution contribue au renchérissement des prix du kilogramme du poisson sur le marché.
Une situation qui fait grincer les dents d’Aïta Sène, mareyeuse de plusieurs décennies. “Les prix ont considérablement grimpé, le poisson est devenu à la fois cher et rare. Autrefois, on pouvait acheter un kilo à 1500 francs, aujourd’hui c’est entre 4500 et 5000 francs. Les bateaux étrangers ont ravagé nos eaux. Si nous arrêtons de faire affaire avec ces bateaux, la mer redeviendra normale”.
“Nos océans seront des désert liquides”
Au Sénégal plus de 600 000 personnes vivent de la pêche, de manière directe ou indirecte. Un sujet qui a pris une place importante dans l’élection présidentielle. Des usines de transformation de poissons en farine envahissent l’Afrique de l’Ouest. “Ces usines chinoises et européennes pêchent nos poisons pour les transformer en farine pour des animaux en Occident. C’est un vol”, estime Dr. Aliou Bah de Greenpeace Africa.
Les acteurs de la pêche se sont organisés pour soumettre une charte pour une pêche durable aux 19 candidats à la présidentielle. 13 candidats avaient signé la charte dont le président élu Bassirou Diomaye Faye. Le document propose en 13 points de geler l’octroi de nouvelles licences pour les ressources surexploitées.
Mamadou Sarr est le porte-parole de la Coalition pour une pêche durable. Les pêcheurs espèrent voir le nouveau président prendre le sujet au sérieux. “La diminution du nombre de poisson pousse les jeunes à l’immigration irrégulière. S’il y avait du travail, ils n’iront pas ailleurs. Les pêcheurs doivent garder un œil sur le président qui a signé cette charte”.
Le président Bassirou Diomaye Faye devra mettre en place un gouvernement dans les prochains jours. Dans les pirogues et sur les marchés de poissons ses décisions sont fortement attendues.
Georges Attino Coulibaly
(Envoyé spécial)