Le gouvernement malien a annoncé la «fin immédiate» de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (APR), issu du processus d’Alger, dans un communiqué publié jeudi dernier (25 janvier 2024). Et dans un autre communiqué publié le même jour, nos autorités ont manifesté leur «vive préoccupation» face à la multiplication d’actes inamicaux ainsi que des cas d’hostilité et d’ingérence dans les affaires intérieures du Mali par les autorités algériennes.
Issu du processus d’Alger, l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali (APR) est mort de sa belle mort ! Il a été définitivement enterré par un communiqué publié par le gouvernement malien jeudi dernier (25 janvier 2024). Cette décision a été justifiée par «la transformation de certains groupes signataires en acteurs terroristes poursuivis par la justice malienne après des actes terroristes revendiqués». Le communiqué a également évoqué «l’échec de la médiation internationale à faire respecter les obligations des groupes armés signataires, malgré les plaintes du gouvernement de la transition exprimées dans une lettre datée du 24 février 2023».
Les autorités maliennes ont également justifié cette décision par «les actes d’hostilité et d’instrumentalisation de l’accord par les autorités algériennes, chefs de file de la médiation internationale…». Face à ces événements jugés suffisamment graves, a-t-on indiqué, le gouvernement de la transition déclare «l’inapplicabilité de l’Accord de 2015 et annonce sa fin immédiate». Le Mali a néanmoins réaffirmé son engagement pour «une résolution pacifique de la crise malienne», en «tirant les leçons des accords précédents et en consolidant leurs acquis».
Et d’inviter les groupes signataires non terroristes et les partenaires du Mali à participer au dialogue intermalien promu par le président de transition malien dans «un esprit de paix et de justice». En effet, lors de ses vœux du nouvel an, le président de la Transition a annoncé un «dialogue direct intermalien» pour la paix et la réconciliation afin d’éliminer les racines des conflits communautaires et intercommunautaires et pour «privilégier l’appropriation nationale du processus de paix». A cette occasion, le Colonel Assimi Goïta a indiqué que «l’unicité, la laïcité de l’Etat et l’intégrité du territoire ne feraient pas partie des sujets de discussion». Il a aussi assuré que «la lutte contre les groupes armés terroristes» se poursuivrait «jusqu’à la pacification totale du pays».
Les intentions malveillantes de l’Algérie mises en évidence
Selon des observateurs, si cette décision semblait aujourd’hui inexorable depuis cette annonce et la reprise de Kidal (fief des rebelles/terroristes), elle a été précipitée par les manigances de l’Algérie portant atteinte à la sécurité nationale et à la souveraineté de notre pays. En tout cas, cette décision a été suivie d’un autre communiqué dans lequel le gouvernement malien a condamné l’attitude malveillante de notre voisin à notre égard. Il s’a notamment dénoncé la «multiplication d’actes inamicaux, de cas d’hostilité et d’ingérence dans les affaires intérieures du Mali par les autorités de la République algérienne démocratique et populaire».
Notre gouvernement a déploré, entre autres, l’imposition d’un délai de transition aux autorités maliennes de manière unilatérale ; l’accueil sans concertation ou notification préalable et au plus haut sommet de l’Etat algérien de citoyens maliens subversifs et de citoyens maliens poursuivis par la justice malienne pour actes de terrorisme ; l’existence sur le territoire algérien de bureaux assurant la représentation de certains groupes signataires de l’APR devenus aujourd’hui des acteurs terroristes.
Les autorités maliennes ont également dénoncé la volonté des autorités algériennes à maintenir le régime de sanctions des Nations unies concernant le Mali. Et cela au moment où le Mouvement des Non Alignés et la Fédération de Russie s’y opposaient dans l’intérêt du Mali qui demandait la levée dudit régime. Elles ont aussi dénoncé «la main cachée des autorités algériennes dans une manœuvre consistant à imposer un chapitre sur le Mali dans le document final du 19e sommet du Mouvement des non-alignés à Kampala (Ouganda, du 15 au 20 janvier 2024), sans le consentement des autorités maliennes».
Le Mali a donc invité l’Algérie à se remémorer également leur responsabilité dans la détérioration de la situation sécuritaire au Sahel. S’il est vrai que l’intervention de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) a exacerbé la menace terroriste, il n’en demeure pas moins que c’est l’installation dans le Sahara du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) algérien, puis son allégeance à Al-Qaida qui marquent l’avènement du terrorisme international dans la région.
Le Mali a réaffirmé son attachement à la promotion des relations amicales et harmonieuses avec l’ensemble des Etats du monde, sous réserve du respect des principes qui lui sont désormais chers. Il s’agit du respect de la souveraineté du Mali ; du respect des choix de partenariat et des choix stratégiques opérés par le Mali ; et de la prise en compte des intérêts vitaux du Peuple malien dans toutes les décisions.
Il faut aussi rappeler que l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali a été signé les 15 mai et 20 juin 2015 à Bamako afin de mettre fin à la rébellion armée dans le nord. Il a été signé entre le gouvernement malien, la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014 sans jamais être soumis à l’approbation de l’Assemblée nationale. Mais, la grande majorité des Maliens n’y a jamais adhéré car le jugeant comme un piège devant consacrer la partition de notre pays.
Moussa Bolly
Un nouveau processus de paix en marche
Partager avec les différentes tendances la volonté des autorités de transition d’enclencher un processus de paix plus national ; préserver les acquis de l’APR et soutenir ensemble la consolidation de la paix et la réconciliation dans la perspective du dialogue intermalien prôné par le président de la Transition dans son adresse à la Nation le 31 décembre dernier ! Tels étaient les objectifs de la rencontre que le ministre de la Réconciliation, de la Paix et de la Cohésion nationale a eu vendredi dernier (26 janvier 2024) avec les leaders et représentants des mouvements qui sont restés aux côtés du gouvernement.
Organisée au lendemain de l’annonce par le gouvernement de la fin de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali (APR), cette rencontre a offert au le Colonel-major Ismaël Wagué l’occasion de réitérer «l’engagement indéfectible» du gouvernement de transition envers le processus de paix, le rétablissement de la stabilité au Mali et le bien-être des populations.
Les représentants des mouvements ont saisi l’opportunité pour saluer cette décision historique du gouvernement et réaffirmer leur détermination à collaborer étroitement avec les autorités tout en soutenant leur vision politique et leur mission de rallier l’ensemble des parties. Ils n’ont pas manqué de témoigner leur gratitude envers le ministre Wagué pour avoir réussi à entretenir un climat de paix et de cohésion entre toutes les parties ouvertes au dialogue inclusif. Enfin, avant de lever la séance, le Colonel-major Ismaël Wagué a chaleureusement remercié les parties pour leur volonté d’accompagner les autorités de transition dans un dialogue national indispensable au retour définitif de la paix et de la stabilité auxquelles aspire le peuple malien.
A noter que vendredi dernier (26 janvier 2024) le président de la transition, Colonel Assimi Goïta, a institué par décret (décret N°2 P24-0053 PTRM) le Comité de pilotage du dialogue pour la paix et la réconciliation nationale. Son objectif principal est la préparation et l’organisation du dialogue. L’élaboration des termes de référence du dialogue et leur validation ; l’assurance de la programmation, de la coordination et de la supervision des différentes activités ; la conception et la mise en œuvre du plan de communication ; ainsi que l’élaboration du rapport final du dialogue et du rapport d’exécution de ses activités sont ses missions.
Naby