Le Gouvernement de Soumeylou Boubèye Maïga a ouvert une autre brèche de soulèvements populaires en accordant l’augmentation de l’âge à la retraite de trois ans à l’UNTM (Union nationale des travailleurs du Mali). La jeunesse qui compose les 70% de la population malienne n’en revient pas à propos de la signature de ce point. Elle estime que sa préoccupation majeure, étant l’emploi, demeure moins importante pour l’équipe du Hérisson.
«Un chat échaudé a peur de l’eau chaude». Cet adage plein de sagesse prend, pour qui veut voir la réalité des choses, de corps avec cette résignation ahurissante du Gouvernement du Hérisson Soumeylou Boubèye Maïga face au Secrétaire Général de l’UNTM Yacouba Katilé. C’est annoncé depuis une semaine et ça y est. La grève des 120 Heures qui devrait être entamée ce lundi 11 février 2019 n’aura plus lieu. Le Gouvernement, après avoir constaté la faille de sa politique de « diviser pour mieux régner », a fini par ouvrir la voie des négociations objectives qui ont abouti à un dénouement consensuel de la crise axée sur 11 points d’Accord (il s’agit des points 1,2,3,4,5,6 ,7,8,9,10,11 ), et le 12e point qui a aussi fait l’objet d’Accord partiel sur les 12 points du cahier des doléances de la plus grande centrale syndicale du pays. Une victoire presque historique à saluer, car selon nos archives, M. Katilé serait le premier Secrétaire Général de cette organisation syndicale à projeter deux grèves en une mandature. Mais ça, c’est une autre histoire !
Après la réaction du Président du Conseil National de la Jeunesse, Souleymane Satigui Sidibé, dans une note adressée au Premier Ministre. Sans langue de bois, le Président du CNJ a désapprouvé l’esprit de cet Accord au motif que ce relèvement de l’âge à la retraite constitue un frein à l’insertion professionnelle de la jeunesse et qui a même souhaité sa réduction à 58 ans pour «offrir toutes les chances à la jeunesse». Et le parti de l’ancien Premier Ministre Moussa Mara, dans un communiqué rendu public le 4 février dernier, a lui aussi réagi. Ce, en invitant les autorités à faire en sorte que cette disposition ne soit pas de nature à « empêcher les jeunes d’accéder suffisamment et tôt aux postes dans l’Administration publique et à freiner leur promotion ». Le sujet continue d’animer le débat sur les lieux de rassemblements des jeunes et singulièrement dans les « grins ». C’est du moins ce que votre serviteur a constaté au cours d’un déplacement, le weekend dernier, à Kati, à 15 kilomètres de Bamako.
Pour la petite histoire, c’est un jeune paraissant pour un universitaire en tee-shirt bleu qui a ouvert la balle. «Le thé n’est pas prêt encore ? Toi, tu es toujours en retard», s’adressa-t-il à son ami qui se faisait face à la théière. Et quelques instants après, c’est un autre qui s’exclame: « Au moment où nous, les jeunes, nous plaignons de la rareté d’emplois, la situation se complique. Si ceux qui doivent partir refusent d’y aller comment nous les futurs entrants allons-nous rentrer ? Avec cette augmentation de l’âge de la retraite à trois ans de plus, on nous condamne à la mendicité comme ça». Le débat était houleux et chacun de ces jeunes du grins voulait dire ce qu’il a au fond de son âme. À la synthèse de leurs dires, ce relèvement de l’âge à la retraite devait faire l’objet de consultations à la base bien avant son application. « Il y a la galère partout. L’auto-emploi qui est aussi indispensable pour tout développement n’est pas une préoccupation de l’État. Ceux qui bénéficient du financement débloqué chaque année sont connus de tous. S’il faut faire des études primaires, secondaires et supérieures pour ensuite être dans une situation sans couverture socioprofessionnelle. À quoi bon d’étudier alors?», s’indigna un jeune frustré avant de démarrer sa moto …
Seydou Konaté
LE COMBAT