Enfin le RPM appelé pour diriger le gouvernement. Enfin de ses rangs est sorti le locataire de la Maison jaune de la Cité administrative. L’appel du pied a pris les allures de menaces exprimées par les parlementaires qui ne sont pas allés de main morte pour exprimer leur malaise au président, le camarade IBK.
Frustré d’être confiné au rôle très inconfortable de parti majoritaire qui ne dirige pas, le RPM a attendu le meilleur moment pour assener le coup de grâce à un Premier ministre à bout de souffle.
Non aphone, le président a entendu et compris le message. A première vue, on peut dire que le RPM a gagné à imposer enfin un des siens au chef de l’Etat. Abdoulaye Idrissa Maïga est le 1er vice-président du parti, ancien directeur de campagne d’IBK pour les législatives de 2007 (second tour), et les présidentielles de 2013. C’est dire !
Cependant, rien n’est moins sûr pour le parti, car le président a maîtrisé le calendrier et en plus, il a porté son choix sur un homme qui, de notoriété publique, lui est d’une loyauté au-delà de toute considération politique.
Jamais Abdoulaye ne prêtera le flanc pour une prise en otage du président. La tension sociale a mis à rude épreuve la carapace du sage Premier ministre qui a montré tout son engagement malgré la conjecture. La Conférence d’entente nationale a donné son épilogue. Ce sont là des conditions bien réunies pour justifier une dynamisation de l’équipe d’où le changement acté.
Homme de conviction, Abdoulaye n’est pas de la race de politiciens volages au gré de leurs intérêts personnels. Il ne s’est jamais accroché à un poste dès lors que ses convictions sont contrariées ou qu’il juge son apport non nécessaire. Il a rendu le tablier à plusieurs fois démentant dans la discrétion qui le caractérise l’assertion selon laquelle le Malien ne démissionne pas. Oui, Aliou comme l’appellent les parents de Gao, a bien démissionné à plusieurs occasions.
Son expérience gouvernementale est l’une des plus solides au sein du RPM, pour avoir été en si peu de temps ministre dans au moins deux portefeuilles régaliens. Avoir été ministre de la Défense en temps de crise n’est pas une mince moisson dans la besace d’expérience d’un homme politique. Il l’a été et ça doit compter !
Sa connaissance des arcanes sociales avec pour preuve l’ouvrage collectif dans lequel il fait preuve d’une très grande finesse d’analyse, est un atout majeur pour démêler l’écheveau de cette crise pour laquelle on n’a pas que besoin de muscle ou d’arme. Il peut s’appuyer sur de solides relations au nord, voire à Kidal où lui et celui qu’il sert, sont les seuls à avoir effectué le voyage pour y rencontrer l’amenokal Intallah à une époque où peu d’hommes pouvaient s’y aventurer.
Ceux qui ont pratiqué Abdoulaye, retiennent au premier abord un homme vertueux, très à cheval sur les valeurs de notre société ; et au dernier abord un homme ouvert, sympathique et progressiste. Ceux qui le découvrent, restent pantois devant sa modestie, sa révulsion de l’extravagance et de l’argent. Abdoulaye a le cuir épais face aux épreuves et l’a démontré tout au long de sa carrière politique et professionnelle. Ce sont là des valeurs et qualités qui ne peuvent laisser un président indifférent et de surcroit un président qui lui-même a le cuir épais.
Grand lecteur devant l’Eternel, passionné d’écriture, Abdoulaye que j’ai vu venir à la maison de Sanèye en compagnie de mon oncle du même nom, y passer des journées, a laissé sur le petit garçon que j’étais, une forte impression avec son éternel boubou “pipao” et ce type de bonnet que j’ai fini par adopter moi-même.
C’est un homme convaincu que j’ai revu bien des années plus tard à l’Hippodrome avec cette élégance caractéristique des hommes bien nés et promis à de grand destin. Ceux qui avancent sans bruit mais vont loin.
Ce témoignage qui n’a rien de panégyrique, ne doit point exclure l’abordage de la suite de cette consécration politique pour lui. L’oncle doit continuer à se tenir droit dans ses bottes face à l’adversité qui va redoubler en raison bien évidemment du poste prestigieux ainsi confié.
Le dialogue qui le caractérise doit se renforcer pour apaiser les esprits sur le front social sans bien sûr céder sur les intérêts supérieurs du Mali. Connaisseur des dossiers politiques et de défense, il doit mettre cet atout à profil pour faire avancer le pays vers l’apaisement, lui pour qui le calme est un trait de nature.
Moussa Cissé
Ecrivain-diplomate, Genève le 10 avril 2017
Nomination d’un nouveau pm : 44 mois de pouvoir et déjà 4 Premiers ministres
Le pouvoir d’IBK bat tous les records en termes d’instabilité gouvernementale. En seulement trois ans et 8 mois de pouvoir, le président Ibrahim Boubacar Keita a déjà changé quatre Premiers ministres et sept gouvernements. Une première dans l’histoire du Mali. Et quelle nécessité ?
C’est officielle depuis le samedi soir la nomination d’un nouveau Premier ministre en la personne d’ Abdoulaye Idrissa Maiga. Attendu depuis quelques mois, le désormais ancien ministre de la Défense devient le chef du gouvernement après Oumar Tatam-Ly (septembre 2013-mars 2014), Moussa Mara (avril 2014-janvier 2015) et Modibo Keita (mai 2015-avril 2017).
Le nouveau Premier ministre aura donc la lourde tâche de réussir là où ses prédécesseurs ont échoué. Il aura entre autres missions de mener la réconciliation nationale par la mise œuvre de l’Accord issu du processus d’Alger, la gouvernance du pays trop fragilisée par différents mouvements sociaux et enfin réconforter la stabilité sur le plan de la sécurité sur toute l’étendue du territoire national.
Âgé de 59 ans, Abdoulaye Idrissa Maiga a déjà rencontré les forces vives de la nation notamment les partis de l’opposition et de la majorité pour la composition de la nouvelle équipe gouvernementale.
Natif de Gao et ingénieur de formation, Abdoulaye Idrissa Maiga est aussi le vice-président du parti au pouvoir (RPM). Il fut le directeur de campagne d’IBK en 2013.
Si, la nomination du nouveau Premier ministre est vue par certains comme un simple changement de fauteuil, d’autres analystes par contre croient en l’homme fort de la Primature.
Le changement de gouvernement intervient pendant que le climat social est fortement tendu en particulier dans le secteur de la santé et l’enseignement.
Les Maliens attendent impatiemment de la nouvelle équipe un issu favorable et immédiat des problèmes sociaux.
A.K