Ouverte depuis quatre jours seulement, la première et unique mosquée de Polynésie a du rester fermée vendredi. Son inauguration a provoqué un tollé à Tahiti, mettant en lumière les craintes suscitées par l’islam sur l’île.
Quatre jours seulement après son inauguration, la première mosquée de Polynésie ouverte sur l’île de Tahiti a été contrainte, vendredi 18 octobre, de garder portes closes. L’établissement se trouve sous le coup d’une interdiction de la mairie de Papeete, pour qui ce local qui n’est “pas prévu pour recevoir du public” doit être mis aux normes. Pourtant, la présidence de la Polynésie française avait publié un communiqué le 15 octobre indiquant qu’il n’était “pas nécessaire d’obtenir une autorisation particulière.” Le texte soulignait également que “l’islam est une grande religion monothéiste”.
Population hostile et xénophobie
Mais dans cette collectivité d’outre-mer où la religion musulmane est très peu connue, l’ouverture de la mosquée s’est avant tout heurtée à la vive hostilité de la population locale, mettant en lumière les craintes suscitées par l’islam en Polynésie.
Des propos très hostiles, parfois xénophobes, ont inondé les réseaux sociaux. Le site Tahiti-Infos, le premier à avoir traité de l’ouverture de la mosquée, a été contraint, pour la première fois, de fermer ses pages de commentaires sur les articles abordant le sujet. Des pétitions et appels à manifester ont également été lancés et le jeune imam de l’établissement, Hicham El Barkani, tout juste débarqué de Seine-Saint-Denis, a “reçu des menaces de mort”, selon son avocat.
La Polynésie française compte seulement quelques centaines de musulmans, originaires de France, du Sénégal, de Djibouti ou encore du Maghreb. La plupart, enseignants et militaires, ne sont là que pour quelques années.
L’islam assimilé au terrorisme
De nombreuses obédiences religieuses, des sectes également, cohabitent dans une Polynésie très fervente, mais elles sont toutes d’influence chrétienne. Et l’islam est souvent assimilé dans l’île au terrorisme. La diffusion à la télévision locale d’images de femmes voilées se rendant à la mosquée, dont deux Polynésiennes, ont également alimenté les craintes. “Les vahinés à la plage, les maillots de bain, les bringues, les cheveux lâchés, tout ça c’est notre coutume, et on veut rien changer”, s’alarme ainsi Heiti, employée d’une société d’assurances attenante à la mosquée.
La vague de contestation est telle que le président Gaston Flosse, dans son communiqué du 15 octobre, a dû rappeler qu’en Polynésie “de nombreux cultes cohabitent parfaitement.” “Bien que terre traditionnellement chrétienne, la Polynésie est aussi une terre accueillante, et il ne faut pas tomber dans l’islamophobie”, a-t-il ajouté.
“Ils pensent que les musulmans sont des Ben Laden, faut pas rester sur des a priori”, regrette une jeune femme issue d’une famille musulmane. “La religion musulmane est pour la tolérance”, assure-t-elle, en préférant toutefois rester anonyme, “par peur des réactions”.
“Il faut faire la distinction entre les différentes formes d’intégrisme et ce qu’est vraiment l’islam: une grande religion avec de grandes valeurs”, a déclaré Taaroanui Maraea, président de l’Église protestante. Du côté de la communauté catholique, on se montre plus circonspect. “Ce n’est pas la salle de prières qui est inquiétante, ce sont ceux qui sont venus l’installer”, a commenté Monseigneur Hubert Coppenrathen, décelant chez le jeune imam “une attitude un peu conquérante”. “Il faut être sur ses gardes”, a-t-il ajouté.
Source : France 24