Bien que le M5 RFP était un mouvement hétéroclite, sans programme, ni vision commune, mais mû seulement par la passion dévorante d’en découdre avec un régime qui a montré toutes ses limites, il a réussi, tant soit peu à fédérer toutes les forces hostiles à IBK et surtout à drainé une masse populaire pour faire chuter IBK. Le bilan humain de la chute du régime a été très lourd, plus de 14 jeunes à la fleur de leur âge ont été arrachés à la grande affection des leurs parents et pour le Mali, afin que la gouvernance vertueuse pour laquelle ils ont accepté ce lourd sacrifice soit une réalité. Quatre ans après l’insurrection, quatre ans après la chute du régime IBK, les fruits sont loin de tenir la promesse des fleurs, car ni justice pour les martyrs, encore moins changement n’ont été faits. Le M5 RFP qui a tant soit peu suscité l’espoir est allé à vau-l’eau, à cause des querelles byzantines et de lutte de positionnements de ses leaders.
Pourquoi le 4ième anniversaire du soulèvement populaire de 2020 contre le régime IBK est-il passé inaperçu ?
L’histoire a donné raison à l’un des leaders du M5 RFP, qui avait affirmé avec force conviction que le Mouvement était mort de sa belle mort. Il s’était à l’époque attiré la foudre des critiques de ses camarades, mais le temps a fini par lui donner raison, car il n’a dit que la vérité. Le M5 RFP n’est plus que l’ombre de lui-même, fissuré en plusieurs morceaux, empêtré dans une guerre de positionnement et de recherche de strapontins, malade du fait d’un manque de leadership. Comme si ces maux qui minent le Rassemblement du 5 juin ne suffisait pas, la deuxième composante de la transition qui le CNSP, branche militaire, a profité de la situation pour lui donner le dernier coup fatal en le mettant à l’écart de toutes les prises de décisions importantes. C’est pourquoi le quatrième, tout comme les autres anniversaires, est passé inaperçu, car toutes les tendances se font plus la guerre de positionnement et de la recherche des gains qu’un véritable combat pour le changement. Les martyrs sont relégués au second plan, la justice reste le grand corps malade de l’administration, la corruption, le clientélisme, la gabegie financière se sont fortement accrus bref le Mouvement est devenu l’ombre de lui. Ses leaders en débandade totale, certains en exil forcé, d’autres en prison, les derniers sont sommés de se taire où de subir le même sort que les autres qui sont dans des beaux draps. Victimes de leurs turpitudes et de leur cupidité ils n’ont plus que leurs yeux pour pleurer. En attendant des jours meilleurs le sacrifice des martyrs, pour le moment, semble être vain. Le quatrième anniversaire de l’insurrection populaire de 2020 passera inaperçu à cause des querelles de clochers de ses leaders, tous affaiblis et incapables d’élever la voix au risque de se retrouver au Gnouf. Comme pour dire que la révolution finira toujours par manger ses enfants.
En définitive, les 14 martyrs de l’insurrection populaire de 2020 ont été trahis par ceux qui ont pris l’engagement de se battre pour que justice leur soit rendue. Ils ont été trahis par tous les tenants du pouvoir qu’ils soient militaires ou civils, car sans le sacrifice ultime de ces jeunes l’insurrection n’allait jamais aboutir. Si les tenants du pouvoir se la coulent douce aujourd’hui c’est parce que certains ont accepté de donner leur vie, donc ne pas rendre justice à ces victimes pour punir les auteurs de cette barbarie, ne pas rendre la gouvernance vertueuse est tout simplement de la trahison.
Youssouf Sissoko
Source: L’Alternance