Sous la conduite du Président de la Maison de la Presse, une forte délégation de la presse malienne a pris part aux travaux du FILEP 2023 à Ouagadougou. Cette délégation en plus des présidents des différentes faitières de la presse malienne, ASSEP (Boubacar Yalkoué), APPEL-Mali (Modibo Fofana) était composée des patrons de presse et des journalistes-reporter.
La 10ème édition du FILEP a rassemblé plus de 200 festivaliers venus des différentes régions du continent africain, d’Europe, d’Amérique, d’Océanie, ainsi que de la diaspora africaine dans le monde. Sa cérémonie de clôture a réuni le président de l’organisation du FILEP, Moussa Ouédraogo, le Secrétaire général du ministère de la Communication de Namibie et le ministre de la Communication du Burkina Faso.
La protection des droits des journalistes au centre des préoccupations !
Au cours des travaux, les participants ont souligné que la plupart des pays africains sont confrontés à un déficit démocratique et à des crises multidimensionnelles. Ces crises se traduisent par un développement sans précédent de plusieurs formes d’insécurité, telles que le grand banditisme, la criminalité transfrontalière, la guerre civile et le terrorisme, qui affectent plusieurs pays de la corne de l’Afrique, du bassin du Lac Tchad et de la bande sahélo-saharienne. Ils ont souligné que cette situation affecte plus particulièrement la liberté d’expression et de presse, dont les médias demeurent des canaux institutionnels.
En effet, en raison de l’option prise par de nombreux gouvernements tendant clairement à opposer aujourd’hui la lutte contre le terrorisme et les autres formes d’insécurité à la liberté d’expression et de presse, les acquis démocratiques des peuples sont constamment menacés. Il ressort ainsi des travaux que dans ces contextes, les journalistes et les médias ont un rôle crucial à jouer en fournissant aux citoyens des informations justes, vraies et utiles afin de contrer les rumeurs et la propagande nuisible à la paix et à la cohésion sociale. Il est indéniable que le traitement des informations liées à l’insécurité est indispensable pour permettre aux populations de comprendre les enjeux de la crise et de développer des postures citoyennes à la hauteur des exigences de la crise sécuritaire. Les médias ne peuvent répondre au besoin d’information du public que si les journalistes jouissent de tous leurs droits, en commençant par celui de l’accès à l’information et aux sources d’informations.
Malheureusement, dans de nombreux pays, les journalistes font plutôt face à la répression des différents pouvoirs en place, comme on le constate au Tchad où deux journalistes ont été assassinés en 2022. Le Cameroun a enregistré, lui, au cours de l’année, quatre assassinats de journalistes en février 2023. Cependant, ce qui est encore plus révoltant, c’est l’impunité qui entoure ces crimes contre les journalistes.
Il est essentiel pour les gouvernants africains de comprendre que les médias africains ne s’opposent pas à la lutte contre l’insécurité et ne refusent pas d’y participer, pour autant que l’on s’accorde sur cette participation en précisant les rôles et responsabilités de chaque acteur. En outre, l’engagement et la participation des médias à la lutte contre l’insécurité ne signifient pas que ceux-ci doivent fermer les yeux sur la conduite des affaires de l’État et sur la déontologie et l’éthique professionnelle. Autrement, s’inscrire dans une telle démarche reviendrait à une démission pure et simple de leurs missions de service public, car le devoir du journaliste lui impose toujours d’exiger des gouvernants la transparence et la redevabilité dans la gestion de la chose publique. C’est pourquoi, en temps de crise, les médias doivent faire preuve de professionnalisme et de responsabilité dans la recherche de solutions au nom de l’intérêt général.
Une fédération des Maisons et Centres de presse élue !
Les participants ont également souligné que les médias n’ont pas vocation à s’opposer aux pouvoirs établis, ni à se réduire à des accompagnateurs embarqués obligés à ne prendre en compte que les discours officiels, surtout quand ceux-ci sont contraires au devoir de vérité ou confondent les intérêts et ambitions politiques des gouvernants avec l’intérêt général. Les participants à cette 10ème édition du FILEP ont également insisté sur le fait que la liberté d’expression et de presse ne saurait être un frein à la lutte contre le terrorisme, comme certains voudraient le faire croire. Bien au contraire, cette lutte contre le terrorisme vise essentiellement la promotion des conditions d’exercice effectif des libertés individuelles et collectives, dont celle de la presse. Elle ne saurait donc être efficace en employant les mêmes méthodes de terreur que les groupes terroristes. Elle vise plutôt à créer les conditions de sécurité et de justice nécessaires à la cohabitation entre communautés, à la construction et la consolidation d’une société démocratique, riche de sa diversité et résiliente face aux tentatives de destruction du vivre-ensemble.
Les participants au FILEP ont déclaré que même en temps de guerre, les peuples ont droit à l’information pour mieux comprendre la situation et adopter des postures citoyennes et les engagements individuels et collectifs qu’exige la situation. Les médias et leurs professionnels sont des acteurs et artisans de la paix. Ils ne peuvent et ne doivent pas être assimilés à de simples instruments de propagande au service des pouvoirs politiques.
Au cours de ce FILEP, une fédération des Maisons et Centres de presse a été mise en place par les différents présidents des Maisons de la presse. L’objectif de cette fédération, selon le président de la Maison de presse du Mali, Bandiougou Danté, est le développement de relations d’amitié et de fraternité entre les Maisons et Centres de presse, la mutualisation de leurs efforts dans le cadre de la lutte contre les menaces qui pèsent sur les médias en matière de terrorisme et la promotion de la liberté d’expression.
Envoyée spéciale à Ouagadougou, Fatoumata Coulibaly
Source : Le Sursaut