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08 juin 1992 – 08 juin 2013: il y a 26 ans

8 juin 1992-8 juin 2016, il y a 26 ans que que le président du Comité de Transition pour le Salut du Peuple, CTSP en abrégé, a passé officiellement le pouvoir au nouveau président démocratiquement élu, Alpha Oumar Konaré. Il y a 26 ans que cette date fut inscrite en lettres d’or dans les annales de l’histoire de notre pays. Une date mémorable, qui consacre non seulement la victoire du Mouvement démocratique sur le régime défunt de l’UDPM, mais devenue un repère pour les Présidents successifs (AOK et ATT) de faire un bilan rétrospectif des actions réalisées au cours de l’année écoulée ainsi que les perspectives pour les années à venir. C’était aussi un moment de communion entre le Président de la république et le peuple à travers la traditionnelle conférence de presse au cours de laquelle le locataire de Koulouba rendait compte directement au peuple de sa gestion du pouvoir.

Si le 8 juin 1992 marqua la fin de la dictature et annonça le début de la longue et exaltante marche vers un Etat démocratique dans lequel les droits et libertés publiques seront garantis, force aussi a été de constater la revanche du pouvoir Kaki avec la perpétration d’un coup d’Etat, le 22 mars 2012, par une junte militaire. Un acte stupide pour les uns et salutaire pour les autres mais dont les conséquences sont aujourd’hui la remise en cause de la date symbolique du 8 juin à laquelle les Maliens s’étaient si habitués.
1992: au terme d’un maraton électoral, Alpha Oumar Konaré élu Président

Un an plus tôt, le 26 mars 1991, une partie de l’armée dirigée par Amadou Toumani Touré renversait le régime de Moussa Traoré, au pouvoir depuis 1968. L’arrestation du dictateur faisait suite à des mois d’émeutes et de grèves générales à répétition qui avaient débouché sur trois jours de soulèvement populaire sanglant les 22, 23 et 24 mars. Sur ordre de Moussa Traoré, l’armée avait tiré sur la foule des jeunes manifestants, faisant 112 morts et près d’un millier de blessés, selon le bilan officiel.
Une fois la dictature par terre, les événements se précipitèrent, sans heurts, ce qui, aujourd’hui encore, vaut au Mali d’être considéré comme un « modèle « de transition démocratique. Le 27 mars, Amadou Toumani Touré (« ATT « pour tout le monde, depuis) prenait la tête d’un Conseil national de la réconciliation (CNR), qui suspendait toutes les institutions et promettait d’aller rapidement vers un régime démocratique. Quelques jours plus tard, le CNR était remplacé par un Comité transitoire pour le salut du peuple (CTSP) composé de civils et de militaires. En avril, un gouvernement de transition était constitué, sous la direction d’ATT, et les partis politiques autorisés.
Du 29 juillet au 12 août, une Conférence nationale réunit 36 partis et plus d’un millier d’associations pour adopter un projet de Constitution, une charte des partis et un code électoral. Six mois plus tard, le 12 janvier 1992, les Maliens adoptent par référendum, avec 98,35 % des voix, la Loi fondamentale de la IIIe République. Dans la foulée, des élections législatives couronnent la victoire écrasante (deux tiers des sièges) du parti de l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema) menée par Alpha Oumar Konaré. Enfin, le 12 avril, les Maliens se rendent aux urnes pour élire démocratiquement leur chef d’État, pour la première fois de leur histoire.
Neuf candidats sont en lice, dont le chef de l’Adema, donné favori. C’est un militant syndical et associatif, un professeur d’histoire et un patron de presse. En 1983, il a fondé la maison d’éditions et la revue culturelle Jamana, puis Les Échos, premier quotidien indépendant du pays en 1989, et, enfin, une radio privée en 1991. Fort de son image d’intellectuel ouvert et de panafricaniste convaincu, il remporte 45,19 % des suffrages au premier tour, devant Tiéoulé Konaté de l’Union soudanaise du rassemblement démocratique africain (USRDA, le parti du premier président du Mali, Modibo Keïta), qui obtient 14,51 % des voix, et Me Mountaga Tall du Congrès national d’initiative démocratique (CNID), qui en recueille 11,41 %.
Le deuxième tour, le 26 avril, consacre sa victoire. Avec 69,02 % des suffrages exprimés, Alpha Oumar Konaré devient, à 46 ans, le premier président du Mali démocratique. Le jour de son investiture, le 8 juin 1992, le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré (il sera fait général le lendemain) lui rend publiquement les honneurs des militaires, tenant ainsi ses promesses jusqu’au bout et signant la soumission de l’armée au nouveau pouvoir démocratique, un symbole fort.
La tâche qui attend le nouveau président, élu avec un taux de participation à peine supérieur à 20 %, est difficile. Il doit certes consolider la démocratie et redorer l’image de l’État après trente ans de dictature. Mais, dans l’un des pays les plus pauvres du monde, il doit plus immédiatement répondre aux aspirations de changement et aux revendications socio-économiques dont la population exige légitimement la satisfaction.
Le régime démocratique tient bon. Malgré des contestations, les résultats de l’élection présidentielle de 1997 sont validés. Le scrutin de 2002 se déroule dans de bien meilleures conditions. Alpha Oumar Konaré ne brigue pas de troisième mandat, ainsi que le prévoit la Constitution, et c’est le général Amadou Toumani Touré qui revient au pouvoir, par les urnes, dix ans après l’avoir quitté.

Alpha Oumar Konaré élu président du Mali
En ce dimanche 26 avril 1992, les Maliens se rendent aux urnes avec calme pour élire le premier président de leur IIIe République. Au bureau de vote du quartier Djikoroni, à Bamako, le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré glisse son bulletin dans l’urne. Tout un symbole. Un an plus tôt, dans la nuit du 25 au 26 mars 1991, il renversait le régime de Moussa Traoré, au pouvoir depuis 1968, prenait la tête du pays et promettait, dans la foulée, de rendre le pouvoir aux civils. Il a tenu parole.
Dans les nombreux grins – lieux de rassemblement informel où les Maliens se réunissent pour boire le thé, discuter et écouter la radio – l’ambiance est solennelle. Les mines sont graves. Pour la première fois depuis bien longtemps, la démocratie malienne a rendez-vous avec l’Histoire.
En juillet et en août 1991, quelque 36 partis politiques, 1 070 associations et 1 200 délégués, dont 500 venant du monde rural, réunis autour de la même table, ont donné naissance à la nouvelle Constitution, adoptée par référendum le 12 janvier 1992. Avec l’élection présidentielle des 12 et 26 avril 1992, le pays est en passe d’achever sa transition démocratique. De manière exemplaire.
Des deux finalistes issus du premier tour – deux anciens ministres de Moussa Traoré -, le professeur d’histoire et syndicaliste Alpha Oumar Konaré, 46 ans, part grand favori. Deux semaines auparavant, il avait obtenu 44,95 % des voix, contre 14,51 % pour son adversaire Tiéoulé Konaté, un économiste de 59 ans. À la différence de ce dernier – qui a longtemps travaillé à l’étranger comme fonctionnaire au Fonds monétaire international (FMI) et à la Banque mondiale -, Konaré n’a vécu que quatre ans hors du Mali, pour effectuer son doctorat de troisième cycle en histoire et archéologie à Varsovie, de 1971 à 1975. Il apparaît donc comme bien en prise avec les réalités sociales de ses concitoyens. Son parti, l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (Adéma-PASJ), a, en outre, remporté 76 sièges sur 116 lors des législatives du 9 mars.
S’il possède une bonne longueur d’avance, Konaré n’est pas à l’abri d’une défaite. Dans les rangs du parti de l’abeille (l’emblème de l’Adéma), d’aucuns craignent que ses adversaires ne forment une coalition pour le second tour. Mais c’était compter sans les nombreuses dissensions qui règnent au sein des formations rivales, au premier rang desquelles l’Union soudanaise-Rassemblement démocratique africain (US-RDA), le parti historique de l’indépendance malienne auquel Konaté est affilié.
C’est donc logiquement que Konaré s’impose avec 69,01 % des voix, contre 30,99 % pour Konaté. Le décompte des suffrages a lieu le lendemain du vote. En fin de journée, alors que plus de 90 % des bulletins ont été dépouillés sans qu’aucun incident notable n’ait été signalé, les partisans de l’Adéma crient victoire au rythme des djembés. Des scènes de liesse ont lieu un peu partout dans le pays, jusque dans les villages les plus reculés.
Les « abeilles ont bien butiné «, mais le plus dur reste à faire : relever un pays – l’un des plus pauvres au monde – profondément marqué par vingt-deux ans de dictature

Jeune Afrique

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