Dans une tribune publiée sur sa page Facebook, l’ancien ministre de la Justice et des Droits de l’homme, garde des sceaux, Me Malick Coulibaly a appelé les autorités maliennes et les leaders des organisations sous régionales, la CEDEAO et l’UEMOA, à prioriser le dialogue pour une sortie de crise. Lisez plutôt !
En mai 1963, lors du Congrès fondateur de l’Organisation de l’Unité Africaine à Addis-Abeba, le Président feu Modibo Keita s’est résolument engagé pour l’unité africaine. A ce titre, il a inlassablement œuvré pour une relation apaisée avec nos voisins. C’est ainsi qu’en juin 1963, il a signé une série d’accords à Bamako pour rétablir les relations entre le Mali et le Sénégal, après la rupture intervenue lors du différend relatif à la Fédération du Mali. Il a également rencontré le Président Senghor à Kidira le 29 octobre 1963 pour sceller la paix. Toujours sous l’égide du Président feu Modibo Keita, le Mali joua un rôle d’arbitre dans la sortie de la « guerre des sables » qui opposa le Maroc et l’Algérie en réunissant à Bamako, Hassan II, Ben Bella et le négus Haïlé Sélassié d’Ethiopie pour obtenir un cessez-le-feu.
Notre pays a toujours été une nation de paix qui a souscrit à l’unité africaine dans sa Constitution. Nous avons toujours prôné le dialogue dans le règlement des différends avec nos frères d’Afrique et privilégié les moyens diplomatiques pacifiques dans la gestion des relations avec nos pays voisins et nos partenaires internationaux.
Compte tenu de la crise multiforme qui frappe notre pays actuellement ainsi que de la situation de fragilité extrême, nous devons résolument privilégier le dialogue comme l’ont toujours fait nos pères des indépendances.
Indubitablement, les sanctions prises par la CEDEAO et l’UEMOA le 09 janvier 2022 à Accra sont sévères. Elles sont regrettables à plus d’un titre. Nous sommes ainsi doublement sanctionnés d’une part en subissant de plein fouet les conséquences dévastatrices des attaques de groupes extrémistes violents, mais aussi celles de la crise humanitaire qui se caractérise par une hausse des prix, ainsi que la perte des récoltes liée au conflit. Nos populations souffrant déjà le martyre paieront un prix très élevé si ces sanctions devraient être maintenues.
A cet égard, je voudrais lancer un appel à nos pays frères de la CEDEAO pour prendre en compte les conséquences désastreuses des sanctions qui ne manqueront pas de fragiliser davantage notre tissu social déjà fortement entamé par de longues années d’insécurité et de conflit.
Mais, je voudrais surtout, tout en saluant la disponibilité de dialogue affirmée par les autorités de la transition, les inviter à nouer un dialogue franc et constructif avec les acteurs politiques nationaux et les partenaires internationaux en vue d’une désescalade rapide et une issue de la transition réfléchie et basée sur des éléments concrets en fonction de la réalité du terrain. Assurément, l’échéance du 27 février 2022 n’est pas tenable. A moins d’opter pour un remède potentiellement pire que le mal, il faut trouver un compromis dynamique en fixant un chronogramme permettant la tenue d’élections libres, crédibles et inclusives dans un délai raisonnable. A cette fin, il urge de commettre des techniciens avertis pour proposer un chronogramme qui sera validé par l’ensemble de la classe politique et soumis par la suite à la CEDEAO.
Enfin, tout en reconnaissant les difficultés auxquelles elle est actuellement confrontée, je voudrais néanmoins lancer un appel solennel à la diplomatie malienne afin qu’elle remplisse sa mission, à savoir concilier les intérêts du Mali avec ceux de ses partenaires internationaux, à travers des méthodes de négociation pacifique. Dieu nous confère la sagesse de percevoir ce qui est bon pour notre pays, le courage de le défendre et la volonté de le mettre en œuvre.
Maître Malick COULIBALY,
Ancien ministre de la Justice et des Droits de l’homme, Garde des Sceaux
NB : Le titre et le chapô sont de notre rédaction
Source: LE PAYS