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Sous les mains des artistes du tatouage au henné

Ce jeudi matin, une foule de jeunes filles crée une atmosphère de fête autour de la tatoueuse au henné, Fatim Sidibé. Ces jeunes célibataires et futures mariées font la queue pour se faire tatouer les mains et les pieds. Nous sommes arrivés vers 10h30mn, au quartier de Djicoroni-Para chez l’artiste. Elle est installée sous un hangar dont l’intérieur est éclairé par des rayons de soleil qui transpercent le toit. Il y fait chaud et le thermomètre marque 30 degrés.

 

Les clientes sont impatientes d’être prises en main par l’artiste. Elles seront belles demain lors du mariage ou le baptême. Le tatouage moderne au henné indien exige de la praticienne beaucoup de dextérité, contrairement au produit traditionnel.

La jeune cliente, d’une vingtaine d’années, à la taille fine, Aminata Kebé, prépare le baptême de l’enfant d’une amie. La fête aura lieu ce dimanche. Elle veut en mettre plein la vue aux autres filles invitées. Tout le monde doit sentir, à travers son tatouage cher, qu’elleest proche des parents du nouveau-né. Elle attire les regards des autres femmes, lors des cérémonies de mariage ou de baptême de tous ses proches, de mariage ou de baptême, en apparaissant dans des parures dont la qualité est rehaussée par l’éclat des tatouages au henné malien. Comme elle, les femmes mariées et les filles célibataires ornent leurs pieds et leurs mains en utilisant la poudre magique.

Certaines personnes utilisent d’autres produits qui s’apparentent au henné naturel local. Il est vraiment difficile, pour une profane, de faire la différence entre le vrai et le faux henné.

Selon la tatoueuse Fatim, autrefois, seules les nouvelles mariées et les femmes adultes se tatouaient avec le henné. Autrefois, les valeurs culturelles étaient respectées dans tous les terroirs. L’enfant qui n’avait pas l’âge de faire le tatouage, n’osait pas en parler à ses parents. « De nos jours, déplore Fatim, les mamans encouragent les petites, en leur achetant la poudre de henné ». « Mais, nous avons l’impression de vivre dans un monde à l’envers, avec une nouvelle génération qui fait fi de nos traditions », déplore la dame.

A une certaine époque, aujourd’hui révolue, selon nos coutumes africaines, seules les femmes mariées, et les jeunes filles fiancées, prêtes à convoler en noces étaient autorisées à utiliser la pâte de henné. Elles l’étalaient, de façon artistique, sur les pieds et les mains pour les tatouer. Cette tradition est encore observée lors des grands événements : mariages, baptêmes, fêtes religieuses et voyages.

Mais, de nos jours, le caractère sacré, qui justifiait l’interdit aux pucelles, aux adolescentes, aux femmes célibataires endurcies, a disparu. Les femmes de tout âge utilisent aujourd’hui le henné pour le simple plaisir de se faire belle.

Rien de surprenant ou d’étonnant, « car même les mères ne se souviennent plus de nos anciennes coutumes, encore moins de les transmettre à l’enfant », se désole la vieille Aminata Oueleguem, marraine d’une future mariée. « Il est du devoir des parents d’expliquer nos us et coutumes à l’enfant, afin de lui donner des bonnes normes et valeurs sociétales », ajoute-elle.

Chez Fatim, les prix des modèles varient entre 1.500 et 15 000 Fcfa. « Ce métier est difficile, depuis mes débuts, à plus forte raison maintenant. Je suis courbée, toute la journée, pour dessiner sur des dizaines de pieds et de mains. C’est un travail éreintant », avoue-t-elle. Fatim tatoue une dizaine de clientspar jour, sauf le dimanche. A la fin de la journée, elle rentre tard à la maison, souffrant de courbatures et d’autres douleurs sur tout son corps.

La flore du Mali renferme des arbustes aux multiples vertus esthétiques. C’est le cas du henné ou « lawsonia inermis ». Le dictionnaire français le décrit comme un arbuste de la famille des lythracées. De par la disposition de ses feuilles, le henné ressemble à un buisson. Les petites feuilles vertes de cet arbuste sont très riches en molécules actives. Ces feuilles cueillies, elles seront séchées au soleil avant d’être pilées.

La poudre recueillie est mélangée à une certaine quantité d’eau dans une calebasse ou tout autre récipient pour obtenir une pâte colorante. L’ocre du départ se transforme en une sorte de noir brillant agréable au regard. Les élégantes femmes s’en servent pour colorer leurs pieds et leurs mains. Certaines dessinent des figures artistiques sur ces parties de leur corps.

D’après certains récits très anciens, les femmes égyptiennes, les premières, ont intégré l’usage du henné dans leurs rituels de beauté. A présent, il existe plusieurs variétés de poudre sous cette appellation.

En Bambara, la poudre de henné est connue sous des appellations populaires. Les vendeuses proposent le « indou diabi » importé et/ou la variété locale, le « farafin diabi ». La palette de choix va du henné indien au henné traditionnel de chez nous.

FC/MD (AMAP)

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