Cet engrais est un produit contenant des micro-organismes vivants qui contribuent à améliorer la croissance des plantes et réactiver la structure du sol
L’agriculture malienne, tributaire des aléas climatiques et malgré sa très faible mécanisation, reste le poumon de l’économie nationale. Elle occupe près de 70% de la population active et contribue à plus de 40% au Produit intérieur brut (PIB) du pays.
L’apport du système coton en est une parfaite illustration. Son chiffre d’affaires est de l’ordre de 260 milliards de Fcfa en moyenne, soit à peu près 20% du budget national, selon des données de 2011. Ce sont aussi 18 milliards de Fcfa de recettes fiscales et douanières.
À cet égard, si ce secteur vital venait à s’écrouler, ce serait comme donner le coup de grâce à une économie nationale exsangue. Les signes avant-coureurs d’un tel désastre sont perceptibles à travers les effets combinés du changement climatique et les mauvaises pratiques agricoles comme l’usage abusif de produits chimiques de synthèse.
Ces phénomènes réduisent drastiquement le taux de matières organiques dans les sols, conduisant à une mort lente des terres en les rendant inaptes à l’agriculture. S’y ajoutent les effets de la monoculture qui appauvrit les terres cultivables. Pour y faire face, certaines entreprises recommandent l’utilisation d’intrants biologiques notamment les bio fertilisants.Un bio fertilisant est un produit contenant des micro-organismes vivants contribuant à améliorer la croissance des plantes et réactiver la structure du sol, explique Dr Amadou Hamadoun Dicko, microbiologiste agricole à l’Université de Ségou.
Ces microorganismes, précise l’expert, sont identifiés pour leurs intérêts agronomiques sur le sol et la plante avec des effets qui peuvent être d’ordre nutritionnel, fixation de l’azote, solubilisation du phosphore pour une occupation physique du sol et la minéralisation organique.
Leur rendement est moindre, comparé aux intrants chimiques, selon des observateurs, qui estiment que la balance penche vers les engrais bio quant à la qualité de la production et de la conservation. Dans ces derniers cas, les intrants bio sont meilleurs, confirme Kokogé Traoré, producteur à N’golokounadougou, à une trentaine de kilomètres de Sikasso. Interrogé, le paysan précise qu’il utilise exclusivement les engrais biologiques depuis 2015 sur son champ de 20 hectares où il cultive du riz et du maïs.
Ils sont moins chers et enrichissent le sol, témoigne-t-il. Comptable de formation, Abdoul Karim Ouattara tient un champ de 12 hectares à Gongasso, Région de Sikasso. Celui qui est également maraîcher cultive du maïs, de la patate douce, des oranges, des bananes, des papayes, des aubergines, des choux et de l’arachide. Depuis trois ans, il utilise les bio fertilisants. «L’engrais bio est rentable, efficace et plus abordable que celui conventionnel», déclare-t-il, argumentant que le sac de 50 kg coûte 7.500 Fcfa, contre 21.000 Fcfa pour l’engrais chimique et le complexe céréale. Son impact dure trois ans dans le sol, ajoute Abdoul Karim Ouattara.
MAINTIEN DU SOL EN BONNE SANTE– Le président de la Chambre d’agriculture de Sikasso, lui, utilise les deux sur différentes parties de son champ. Abdoulaye Bamba dit constater que la partie où il met l’engrais bio produit plus que l’autre. «Le prix subventionné du sac de 50 kg de l’engrais bio est de 1.000 Fcfa, contre 11.000 Fcfa pour l’engrais chimique», détaille-t-il.
Nouhoum Traoré est vendeur d’intrants bio. À la lumière des remontées d’information fournies par les clients, ces produits améliorent le rendement des champs surtout ceux appauvris par l’usage abusif d’engrais chimiques et par la monoculture, rapporte le commerçant.
Ce constat s’explique par le fait que les bio fertilisants sont des sources renouvelables d’éléments nutritifs qui maintiennent le sol en bonne santé tout en augmentant sa productivité et sa nutrition de 10 à 40%, explique Dr Amadou Hamadoun Dicko.
Le microbiologiste agricole précise qu’ils n’ont aucun effet néfaste sur la croissance des plantes et la fertilité du sol. «Pour les paysans, les bio fertilisants participent à la réduction des frais de production et la redynamisation du champ contribuant ainsi à une augmentation significative du rendement», explique le microbiologiste.
En utilisant les produits non chimiques sur la culture, on obtient des produits bio, ajoute le spécialiste. Toutefois, renseigne l’expert, ils sont utilisés sur les sols très ou moyennement pauvres en éléments nutritifs nécessitant l’utilisation de bio fertilisants. Les sols où l’agriculture intense est pratiquée avec l’utilisation à outrance d’engrais chimiques, nécessitent également l’usage de bio fertilisants, selon lui, précisant qu’ils diffèrent selon leur nature et leur fonction.
Il existe les bio fertilisants azotés qui aident à corriger les niveaux d’azote dans le sol. Les bio fertilisants au phosphore aident le sol à atteindre son niveau optimal. Ceux à base de compost sont utilisés pour l’amélioration des processus bactériens qui décomposent les déchets de compost, explique Dr Amadou Hamadoun Dicko. Le bio compost, précise-t-il, est un autre engrais organique respectueux de l’environnement, préparé à partir de déchets de l’industrie sucrière décomposés et enrichis de diverses plantes et bactéries et champignons…
Anne-Marie KÉITA
Source : L’ESSOR