e procès pour viol contre l’opposant sénégalais Ousmane Sonko, candidat déclaré à la présidentielle de 2024, a été renvoyé au 23 mai. Il s’est brièvement ouvert, mardi 16 mai, en son absence, à Dakar, dans un contexte de troubles à travers le pays.
La veille, lundi 15 mai, des affrontements ont opposé de jeunes partisans d’Ousmane Sonko et les forces de sécurité. Des actes de saccage ont été recensés, notamment à Ziguinchor, fief de l’opposant, et dans la région de Dakar. Les autorités ont fait état de trois morts, sans les lier directement aux heurts. Mais elles évoquent un contexte propice, selon elles, aux violences.
Ousmane Sonko, président du parti Pastef-les Patriotes, était censé se présenter, mardi, devant une chambre criminelle à Dakar. Il devait y répondre de viols et menaces de mort sur une employée d’un salon de beauté de la capitale.
Il a toujours nié les faits et crié au complot du pouvoir pour l’écarter de la présidentielle. Il a annoncé qu’il ne répondrait plus aux convocations de la justice, instrumentalisée selon lui.
Son accusatrice, Adji Sarr, jeune femme d’une vingtaine d’années, et la co-accusée, Ndèye Khady Ndiaye, patronne du salon de beauté de Dakar dans lequel les faits se seraient produits, étaient bien présentes, dans un palais placé sous haute protection policière. “Je suis en forme. J’ai confiance. On va gagner. C’est dommage qu’après une attente de deux ans pour un procès, il (Sonko) ait fui“, a déclaré Adji Sarr, en robe blanche, avant l’ouverture de l’audience.
La cour a ordonné le renvoi de l’affaire au bout de quelques minutes. Le troisième de la présidentielle en 2019 se trouvait alors à plusieurs centaines de kilomètres de là, à Ziguinchor, capitale de la Casamance, ville dont il est le maire. Il s’y est retiré il y a quelques jours, selon le porte-parole de son parti, Ousseynou Ly. Des groupes de jeunes hommes, déterminés à empêcher qu’on vienne le chercher pour le traîner de force devant la cour, y ont affronté les forces de sécurité une grande partie de la journée de lundi.
Troubles à Dakar et en Casamance
Mardi, toutes les rues menant au domicile de l’opposant de 48 restent bloquées par des manifestants résolus et exaltés pour nombre d’entre eux. Des jeunes, le visage masqué, barre de métal ou cailloux à la main, montent la garde aux coins de rue de la ville.
Des heurts sporadiques ont également été rapportés, lundi, à Dakar et dans sa région. Un incendie a totalement détruit une vingtaine de véhicules dans un dépôt de la compagnie nationale de bus à Keur Massar, dans la banlieue de la capitale. La presse a rapporté des attaques contre deux magasins de l’enseigne française Auchan, cible habituelle de tels actes.
Feuilleton de plus de deux ans
L’affaire Sonko, feuilleton aux confins de la politique et des mœurs, tient le Sénégal en haleine depuis plus de deux ans. Ousmane Sonko a reconnu être allé se faire masser pour apaiser des douleurs de dos chroniques pendant le couvre-feu en vigueur lors de la pandémie de Covid-19. Mais il a toujours réfuté les viols et les menaces dont il est accusé. Une condamnation contrecarrerait encore davantage sa candidature à la présidentielle. Il risque d’être arrêté s’il persiste dans son refus de se présenter devant la chambre criminelle.
Habituellement très communiquant, il opte pour le silence depuis plusieurs jours. Il a auparavant expliqué être en “désobéissance civile” face au harcèlement dont il se dit la cible.
Heurts en 2021
Il a été condamné, en mai 2022, à six mois de prison avec sursis pour diffamation contre un ministre, un autre coup fourré selon lui. Cette peine à elle seule pourrait le priver de son éligibilité.
Ses rendez-vous avec la justice ont régulièrement donné lieu à des incidents ou paralysé Dakar. Ses adversaires l’accusent de s’en remettre à la rue pour échapper à la justice, ou d’être un agitateur fomentant un projet “insurrectionnel.” Son interpellation en 2021 a contribué à déclencher plusieurs jours d’émeutes qui ont fait au moins 12 morts.
Le cas de d’Ousmane Sonko, populaire chez les moins de 20 ans, qui représentent la moitié de la population, monopolise le débat public depuis deux ans. Tout comme les intentions du président, Macky Sall. Ce dernier, élu en 2012, réélu en 2019, entretient le flou sur une nouvelle candidature en 2024. La perspective d’un troisième mandat de sa part compte de nombreux adversaires. Elle serait, selon eux, contraire à la Constitution.
Source: tv5monde