Boxeur dans l’adolescence (il finira d’ailleurs par en porter le sobriquet), le football finira par prendre le dessus sur cette passion du noble art qui animait Adama Traoré. Parce qu’il passait plus de temps avec ses amis sur le terrain de football du quartier. L’ancien capitaine de l’AS Réal de Bamako est notre héros de la semaine pour l’animation de la rubrique ” Que sont-ils devenus ? “. C’est pratiquement le seul joueur qui n’a pas voulu quitter le club en 1985, lorsqu’une affaire de primes a provoqué un clash entre les dirigeants et certains cadres de l’équipe.
Il a écopé d’un simple avertissement dans cette affaire. Une raison de plus pour ne pas se laisser entrainer par la fougue de la jeunesse, pour contester les différentes sanctions infligées à ses camarades, dont une bonne partie a tourné dos au club. Cette décision sage du jeune Adama lui a valu le brassard de capitaine des Scorpions jusqu’à sa retraite. Reconnaissant vis-à-vis de tous les dirigeants de son (seul) club, qui lui ont toujours porté en estime, il tient à rendre hommage et à remercier un homme. Il s’agit de Moussa Keïta dit Moïse le sauveur, kinésithérapeute du Réal et des équipes nationales du Mali durant plusieurs années. Celui-ci a été d’un soutien infaillible depuis ses premières heures dans le club, jusqu’à la fin de sa carrière. Selon Adama boxeur, Moïse a un sens élevé du social hors norme. Grand supporteur du Djoliba, paradoxalement, Boxeur n’a jamais voulu opter pour un transfert. Dans l’entretien qu’il nous a accordés, Adama boxeur donne les raisons de ce paradoxe, et revient sur les péripéties qui ont caractérisé son départ du centre de formation des Rouges, piloté à l’époque par un certain Aly Koïta dit Faye. En franchissant le seuil du salon d’Adama boxeur, une image semblait nous souhaiter la bienvenue. C’est cette photo où l’on voit le joueur sauter plus haut, et prêt à donner un coup de tête magique au ballon. C’était la finale de la coupe du Mali de 1989 remportée par l’AS Réal face au Djoliba (2-1). L’action sur la photo est le premier but des Scorpions, marqué par Adama boxeur sur un coup franc magistral de feu Sory Ibrahim Touré dit Binkè (l’enfant du Débo de Mopti, Arouna Coulibaly ” Diégo” parachèvera la victime des Scorpions d’un 2è but assassin). Quelle explication à ce but extraordinaire ? Est-ce un hasard ? Non ! C’est plutôt le fruit de l’audace et de la confiance en soi, répond-il.
dama boxeur était l’un des rares joueurs que la nature a doté d’un cœur d’acier. Autrement dit, on ne sentait pas la fatigue chez lui du début à la fin du match. Toujours engagé, il était l’ange gardien du médian réaliste pour neutraliser des joueurs comme Bourama Traoré dit Allah ka Boura du Djoliba au top de sa forme.
Un fruit de Faye
Contre le Cameroun, le 28 avril 1991 (éliminatoires de la CAN de Sénégal 1992), son excès d’engagement obligea l’entraineur Kidian Diallo à le sortir dès la première mi-temps. C’était pour éviter un carton rouge, dont les conséquences fausseraient toutes les données tactiques de l’encadrement technique. Il venait de prendre un carton jaune sur Emile M’Bouh, après avoir fauché François Oman Biyick dans une tentative d’appel de balle. Bref, Adama boxeur était un combattant au sens réel du terme.
C’est sur le mini espace, situé devant la maison paternelle de la cantatrice Tata Bambo Kouyaté, à Bolibana, qu’il a commencé à jouer au ballon. Et c’est là que son club, les Jeunes Sportifs de Bolibana (JSB) s’entrainaient, et livraient des matches amicaux au milieu de l’année 1977.
L’année suivante, en 1978, un grand frère l’inscrit au centre de formation des minimes du Djoliba dirigé par Aly Koïta dit Faye. Yacouba Traoré dit Yaba, Moussa Kéïta dit Dougoutigui, Bakary Bété, Ibou Coulibaly dit Tom Foot de Dravéla, y étaient déjà.
Après cette étape, le groupe rejoint les cadets du centre, où les Dramane Kéïta dit Bafing, Tiémoko Traoré dit Zembla, Cheick Diallo, Alou Kéïta les accueilleront à bras ouverts. Parce que les nouveaux promus qu’ils ont vus évoluer, renforceront l’équipe cadette pour défier parfois leurs ainés (junior et sénior) à l’occasion des matches d’entrainement.
Ils auraient dû progresser logiquement vers la catégorie junior, au bout de deux années, si Adama boxeur ne les avait pas faussés compagnie, en quittant définitivement le Djoliba pour le Réal. L’élément déclencheur de ce transfert a été la coupe Corpo. Adama joue avec l’équipe des Travaux Publics (TP) coachée par Moussa Diakité dit UTA.
Immédiatement après ladite compétition, il abandonne les entrainements au Djoliba, et profita de ce silence pour signer la licence au Réal de Bamako entrainé par le même U.T.A. Quand Faye a appris ce “coup de poignard” de l’un des fruits de son centre, il s’est mis dans tous ses états, et n’hésita pas à effectuer une descente dans la famille du joueur pour exprimer son ras de bol. Adama qui l’a vu venir s’est caché dans la chambre, tout en disant à sa mère d’informer Faye de sa sortie depuis le matin. Il a dit tout ce qu’il pense et laissé un message fort pour Adama, qui, compte tenu de son âge, a été totalement indifférent aux vociférations de son ex formateur. Comment pouvait-il se permettre de quitter un club qui l’a formé, et dont l’avenir est radieux ? Adama soutient être parvenu à la conclusion que son intégration rapide dans l’équipe senior du Djoliba relevait d’un miracle à la fois incertain. Or, le temps de jeu est primordial dans la carrière d’un joueur.
Quinze ans, cinq couronnes
Donc, il intègre directement l’équipe sénior de l’AS Réal en 1982. U.T.A le connaissant déjà ne pouvait prendre aucun risque en l’envoyant à un autre niveau. Et lorsque l’occasion lui a été donnée pour se faire valoir, Adama boxeur réussit son baptême de feu face au Djoliba. Ce jour, il s’est occupé de Bourama Traoré. Ce qui inspira même le journal Podium à titrer sur lui. Evoluant au début comme milieu défensif, il finit au poste de libéro après avoir comblé le vide à chaque fois que l’équipe était confrontée à un problème de latéral. Son engagement et sa détermination sur le terrain traceront les sillons de sa carrière au Réal de 1982 à 1997. Date à laquelle il décide d’arrêter. Pour quelles raisons ? Selon lui, il a joué au Réal avec ses ainés, ses jeunes frères, et ses neveux, donc chaque chose a une limite.
Au terme de quinze ans de carrière dans le nid des Scorpions, quels sont ses bons et mauvais souvenirs ? Adama boxeur les énumère : “L’ambiance en équipe nationale lors des différents regroupements constitue pour moi des souvenirs inoubliables. Autres bons souvenirs : mon premier match en coupe d’Afrique des clubs champions à Brazzaville, ma première coupe du Mali gagnée, et les poignées de mains avec le président Moussa Traoré au moment de me remettre le trophée national en 1989. Cependant, ma carrière a enregistré également des mauvais souvenirs, qui sont entre autres, l’élimination du Réal à Lumumbashi en 1984, la défaite en coupe du Mali contre le Sigui de Kayes en 1987. Pour cette finale, il faut rappeler que nous avons été défavorisés par l’arbitrage. Mais …. “
Avec le Réal, il a joué quatre coupes du Mali (1987-1989-1991-1992) et remporté deux (contre le Djoliba en 1989 et face à l’AS Mandé en 1991). A son actif également trois titres de champion (1983-1986-1991). Adama boxeur a joué les éliminatoires de deux CAN : Maroc 1988 et Sénégal 1992. Il a participé à trois tournois Amilcar Cabral (1986 en Mauritanie, 1987 en Guinée Conakry et 1988 en Guinée Bissau). Il a raté malheureusement l’édition de 1989, jouée à Bamako et remportée par les Aigles du Mali. A la veille de ladite compétition, il s’est blessé au Gabon, lors de la préparation.
Après sa retraite, les dirigeants de l’AS Réal le sollicitent pour rejoindre la barre technique comme adjoint de Moussa Keïta dit Dougoutigui. Ensuite, il dirigea l’encadrement du COB pour la saison 2008-2009, après avoir été l’adjoint d’Aly Badra Diallo dit Conty un an plus tôt. Il retourne encore à l’AS Réal comme coach titulaire (2009-2010). Conty lui fera appel une fois de plus pour le seconder comme entraineur adjoint de l’USFAS.
Après toutes ces aventures, Adama boxeur s’occupe aujourd’hui de l’encadrement et de la Direction Technique de l’INPS, avec à la clef une coupe Corpo.
Marié et père de 4 enfants, l’ancien capitaine des Scorpions travaille toujours à l’Institut National de Prévoyance Sociale, où il a été recruté en 1986, par les soins des dirigeants de l’AS Réal de Bamako.
O. Roger Sissoko
Source: Aujourd’hui-Mali