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Présidentielle 2024 : Rien n’a bougé pour solliciter la candidature du colonel Assimi Goïta

La volonté n’a qu’un but: l’action. Mais notre Afrique vit de paradoxe. Nous sommes sans doute le continent le plus riche du monde par les dons de la nature par sa créativité de sa jeunesse par son appétit de sortir des siècles sombres qui nous ont précédés. Mille exemples montrent que les miracles sont possibles. Les exemples des président Jerry Rawlings du Ghana et Paul Kagamé du Rwanda sont édifiants. Le Ghana était tombé économiquement et les Ghanéens avaient quitté leur pays pour se retrouver dans les pays voisins dans le boulot dodo, le Rwanda a subi un génocide mais a pu se relever grâce au dynamisme d’un homme.

Au Mali, rien n’a bougé pour qu’on puisse donner quitus au colonel Assimi Goïta à se présenter à la présidentielle de 2024. Mais des voix se lèvent. Quel pacte lie le citoyen-électeur et le candidat à des postes de pouvoir quand il se résume à un billet de 2 000 F CFA et un tee-shirt ?

Six (06) petits mois nous séparent de la tenue des prochaines échéances présidentielles. À cet effet, la précampagne a commencé. Quel avenir pour les 60% de la population qui a moins de vingt (20) ans ?

Peuplé de 20 millions d’âmes, reparties sur 1 241 238 km2, le Mali regorge sur son sol de plusieurs ressources naturelles. Il est classé parmi les pays les plus pauvres du continent. Un Malien moyen dispose annuellement d’environ 1 000 dollars de produit national brut par habitant (PNB/hbt) pour vivre. La population du Mali croit au rythme de 6,5% par an: 60% ont moins de vingt (20) ans et plus de la moitié vit en zones urbaines. Cette croissance démographique pose des problèmes d’éducation, de formation et d’emploi, de nutrition et de santé, etc., en dépit des dysfonctionnements de l’État (gangréné par la corruption et le népotisme). Depuis le renversement d’Ibrahim Boubacar Keïta, la transition n’a fait aucun changement de système de gouvernance.

Depuis trente (30) ans, le système de gouvernance demeure. Ce sont les mêmes personnes et leurs familles élargies qui gèrent le Mali. Les propos tenus par la junte à la place de l’Indépendance ne sont plus respectés. Elle a parachevé la lutte du peuple pour ensuite s’accaparer de tout le pouvoir. Or les Maliens dans leur majorité espèrent voir un changement radical s’opérer dans tous les domaines, surtout dans le domaine de la lutte contre la corruption, le détournement de deniers publics et les malversations financières. Rien de tout cela.

À notre grande surprise, le président de la transition, face à des interlocuteurs de marque dixit: «Koni kiri tilé na ko bè bi minè». «Avec une justice juste et équitable tout le monde ira en prison». Monsieur le président de la transition, ces propos ne doivent pas venir de vous, car vous êtes le médecin de tout le peuple malien pour nous guérir et nous protéger contre les fléaux. Lorsque vous tenez de tels propos d’impossibilité votre peuple prend peur. La désespérance est quasi générale et la délicatesse de la situation actuelle contribue à la consolider. Ce sentiment d’amertume s’entend à travers les cris de détresse des Maliens: «ça ne va pas», comme le clament avec désespérance la majorité des Maliennes et des Maliens. Quand on observe son état et sa détresse, le Mali d’aujourd’hui ressemble à un patient agonisant aux urgences d’un hôpital sans médecin, ni infirmier de garde. Cela doit changer monsieur le président de la transition. Vouloir le changer et agir pour le changer, cela démarre par un autre état d’esprit.

La maladie dont souffre notre pays est potentiellement mortelle, nécessite un traitement de choc, une trithérapie seule capable d’interrompre la gangrène qui le démembre. Si le Mali est riche par sa culture, sa pauvreté extrême est un frein à l’action. La misère complique le quotidien de milliers de Maliens. Trouver le prix de condiments, payer les céréales (mil, riz), payer une ordonnance, nourrir ses téléphones en crédit (Malitel, Orange, Télecel), se déplacer, se marier, assurer la survie de ses enfants, leur instruction, leurs repas. Tous ceux-ci nécessitent un trésor de débrouillardise. À ces complications, s’ajoute le délicat problème de terrain ou de maison. Pas de tranquillité familiale si la propriété d’un terrain ou d’une maison est soumise aux manigances en tous genres, qui permettent aux puissants de déloger les faibles.

«Le Mali nous a oubliés», entend-t-on dans bien de localités du pays

C’est parfois pire encore. En 2017, la traversée annuelle du fleuve par les troupeaux transhumants à Diafarabé avait été protégée non par l’État, mais par les milices djihadistes d’Amadou Koufa, affilié à Al-Qaida. On entendit des bergers sans illusion dire: «Avec ces hommes-là, au moins, on n’est pas rackettés». Allusion aux pratiques de certaines autorités étatiques dans le passé. Mais la pratique continue. Quand on circule à Bamako ou dans les environs des fermes privées, on voit les vaches du Nord qui ont la robe très rouge avec des grandes cornes. Ces vaches ont été volées dans le nord de notre pays pour les ramener à Bamako. Elles appartiennent à ceux qui ont exercé des responsabilités dans les régions du nord du Mali. Une fois ces vaches volées par les bandits, elles seront reprises par certains responsables des localités en proie au terrorisme. Il n’y a plus de bétail dans cette partie du pays. Or ces habitants ne connaissent que l’élevage. Cette guerre contre le terrorisme serait un fonds de commerce pour certaines personnalités. Un ancien gouverneur de Gao aurait ramené avec lui deux (02) remorques remplies de bovins.

Monsieur le président ouvrez des enquêtes sur le vol de bétail dans les régions du Nord.

Le Trésor public est un réservoir percé

Deux (02) grosses fuites en laissent échapper le carburant nécessaire au bon fonctionnement des services publics et à la construction de l’avenir. La première est constituée par des dépenses inutiles. Notre pays n’a pas besoin de cortèges somptueux quand ses dirigeants se déplacent, ni de voyages internationaux incessants qui paralysent le sommet de l’État, et pas davantage d’une diplomatie pléthorique. Les dépenses d’électricité, d’eau, de carburant ou de téléphonie des administrations centrales frisent parfois le délire. L’autre est constituée par les malversations et les abus de biens publics; nombreux et massifs.

Au Mali, une personne qui travaille fait vivre de 10 à 15 personnes. Ce qui explique la majorité des Maliens ne vivent plus; ils survivent. Celui que vous voulez imiter. Le régime de Moussa Traoré a connu en fait deux phases assez différentes. Durant les dix ans qui suivirent le coup d’État, la totalité du pouvoir fut effectivement entre les mains du Comité militaire de libération nationale (CMLN), nom que s’était donné le groupe d’officiers qui avait fait tomber le «régime de Modibo».

En 1978, le CMLN explosa. Plusieurs de ses membres les plus influents, soupçonnés de complot, furent arrêtés. Ce fut des déchirements dans l’armée à l’époque. Le président Moussa Traoré avait désormais les mains plus libres. Il engagea un long retour à une vie constitutionnelle normale, avec la fondation en 1979 de la deuxième République, et la création de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM), un parti unique comme c’était le cas dans nombre de pays d’Afrique, mais aussi d’Europe, d’Asie et d’Amérique.

La transition a-t-elle été trop longue, qu’est-ce qu’elle a réglé ? Nous n’avons pas la réponse.

 

ATT, premier colonel a dirigé une transition

Le colonel Amadou Toumani Touré (ATT) a dirigé la transition de 1991 sans pour autant montrer une grande capacité à gérer le Mali, n’eut été son Premier ministre Soumana Sako à faire face aux multiples demandes du peuple. Il fallut toute l’habilité et le courage de ce dernier pour mener le bateau à bon port. Amadou Toumani Touré s’était engagé à ne pas tenter de se présenter aux élections prévues au terme de la transition; il respectera sa promesse. L’histoire contemporaine de l’Afrique montre abondamment que de tels engagements peuvent ne pas être tenus. L’exemple du Mali fera d’ailleurs jurisprudence pour les coups d’État qui interviendront dans d’autres pays.

Amy SANOGO

Inter De Bamako

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