L’Association malienne de lutte contre la corruption et la délinquance Financière (AMLCDF) soupçonne la mairie urbaine de Ségou de s’approprier des domaines de l’Etat et de les vendre. En violation de la loi sur la gestion des domaines des collectivités, elle a cédé une partie de la zone du centre commercial à des particuliers. Des actes assimilables à de l’enrichissement illicite, pour l’AMLCF qui a adressé une lettre de dénonciation au Procureur du Pôle économique et financier de Bamako afin d’ouvrir une enquête judiciaire sur ces accusations.
En accompagnant les autorités dans leur lutte contre la corruption, l’Association malienne de lutte contre la corruption et la délinquance Financière a saisi le Pôle économique et financier, à travers une lettre de dénonciation relative à la violation de la loi portant sur la constitution et la gestion du domaine des collectivités par la mairie de la commune urbaine de Ségou.
L’Association pense que la mairie de Ségou est en train d’outrepasser ses prorogatives en touchant à des biens ne relevant pas de son patrimoine, contrairement à la loi du 16 octobre 1996 portant principes de constitution et de gestion du domaine des collectivités.
En violation cette loi, des responsables de ladite collectivité auraient monnayé des parcelles de la zone du centre commercial. Ce deal entre des élus et des particuliers est à l’origine des tensions entre des responsables de ladite collectivité et la population qui a d’ailleurs a organisé plusieurs manifestations de protestation.
Selon l’AMLCDF, en la matière, la loi du 16 octobre 1996 est sans équivoque. En son article 1er, elle précise le domaine des collectivités : « le domaine des collectivités territoriales comprend un domaine public et un domaine privé. Le domaine des collectivités territoriales se compose de l’ensemble des biens meubles et immeubles acquis à titre onéreux ou gratuit par lesdites collectivités territoriales ou attribués à celles-ci par la loi »
Cependant, en dérogeant à cette disposition, la mairie de la commune urbaine de Ségou serait en train de s’approprier des domaines de l’Etat pour s’enrichir illégalement, malgré les mises en gardes des services de l’Etat, en l’occurrence la préfecture et la direction régionale des domaines et du cadastre. L’une comme l’autre a clairement notifié à la mairie l’illégalité de la vente des parcelles de la zone du centre commercial.
« Suite à votre transmission ce jour des 9 copies du CUH N0086, 087, 088, 089, 090, 091, 093, 094 et 095/2018 délivrés dans la zone du centre commercial après vérification et analyse par les soins des services techniques, il est établi que les CUH sont délivrées sur les parcelles qui n’ont pas été affectées ni cédées à la commune donc relèvent du domaine privé immobilier de l’Etat », avait indiqué le préfet dans sa correspondance du 7 mars 2019. Par conséquent, affirme le représentant de l’État, Dramane DIAKITE, lesdites CUH étant délibérées en violation de la réglementation en vigueur sur le foncier sont frappées de nullité, tout en sommant, dès réception de la présente, à les retirer sans délai.
Le directeur régional des domaines et du cadastre enfonce le clou en confirmant « que le site en question est bien une portion du titre foncier N°306 du Cercle de Ségou, propriété de l’État». À l’instar du préfet, il soutient également que la mairie est dans le faux en attribuant une partie de ces parcelles à des particuliers.
En dépit de ces lettres, la mairie n’est pas revenue sur sa décision en annulant les ventes, a nous expliqué hier lundi le président de l’Association malienne de lutte contre la corruption et la délinquance Financière, Moussa TOURE. Pour lui, les actes, dont la mairie est accusée, sont graves et ne sauraient être tolérés. « En tant qu’organisation de lutte contre la corruption, ces actes sont des faits d’enrichissement illicite s’ils s’avèrent. C’est pourquoi, nous avons saisi le Pôle économique et financier afin d’ouvrir une enquête », a indiqué le président Moussa TOURE.
Outre ces situations, la lettre de dénonciation de l’AMLCDF attire également l’attention du Procureur sur d’autres cas de prédation foncière à Faayan, à Safo, Tassan, à Zorokoro, à Ouarala et dans bien d’autres localités de la Commune du Cercle de Ségou. Dans ces localités, la mairie est aussi indexée de vendre des titres fonciers des populations sur plus de 1 000 hectares.
Par Sikou BAH