Il est de notoriété publique que sous nos cieux, le processus électoral a toujours été marqué par des tumultes, avec en toile de fond des divergences de vue quant à la conduite des opérations tendant à l’amélioration de la transparence et de la crédibilité des scrutins. Les prochaines élections générales censées consacrer la fin de la période de transition ne feront certainement pas exception à la règle. Bien au contraire, les tumultes pourraient même se corser davantage, en tout cas au regard de l’atmosphère de suspicion qui s’est installée entre, d’un côté, les autorités de la transition et de l’autre côté, la classe politique et les organisations de la société civile.
Le moins que l’on puisse dire est qu’une telle atmosphère, on ne peut plus délétère, n’augure pas bien d‘une transition qui se terminera en beauté. Nous savons que du début de la période transitoire à nos jours, nombreux ont été les actes posés par les autorités de la transition mais qui n’ont pas rencontré l’assentiment de la classe politique et des organisations de la société civile. De telles sortes qu’une espèce de ressentiment semble définitivement s’installer entre les autorités de la transition (adossées à la junte) et la classe politique (soutenue par les forces vives de la nation).
Si cette espèce de ressentiment devait perdurer, il ne se fait l’ombre d’aucun doute que la transition en pâtira sérieusement et pourrait même se solder par un échec pur et simple avec des conséquences dramatiques.
Nous touchons du bois pour cela, mais mieux vaut prévenir que guérir. On serait vraiment fondé d’être appréhensif au regard de certains agissements des autorités de la transition et qui dénotent un certain mépris vis-à-vis des recommandations formulées par le peuple. On se souvient que dans l’espoir de réussir à instituer une gestion saine et pérenne du processus électoral au Mali, de fortes recommandations avaient été faites, de façon unanime, par des missions d’observation nationales et internationales des élections, des partis politiques, des organisations de la société civile malienne et surtout par le Dialogue National Inclusif (DNI), la voix du peuple souverain du Mali. La principale et commune recommandation faite par toutes ces structures et instances était de mettre en place ‘’un Organe technique, unique et indépendant de gestion pérenne des élections’’. Mais au lieu de chercher à satisfaire à cette recommandation unanime, les autorités de la transition semblent plutôt mues par la satisfaction de leurs ambitions inavouées.
C’est ainsi, à la surprise générale, que le Premier ministre de transition Moctar Ouane, lors de son ‘’Grand Oral’’ devant les membres du CNT, le lundi 22 février 2021, a annoncé que l’organe unique de gestion des élections ne pourrait pas être mis en place à cause des contraintes liées au temps imparti à la transition.
Mais là où le bât blesse est que cette décision, de mettre en ‘’stand-by’’ la création d’un Organe Unique de Gestion des Élections, a été prise unilatéralement par le gouvernement de transition. Alors que la recommandation de l’instauration de cet organe émanait du peuple souverain du Mali.
On en déduira donc que c’est un véritable camouflet que les autorités de la transition viennent d’infliger à la classe politique, à la société civile et à tous les partenaires techniques qui appuient le processus électoral au Mali.
Cependant au cours de son ‘’Grand Oral’’ devant les conseillers du CNT, le Premier ministre Ouane a reconnu sans ambages que la charte et la feuille de route assignées à la transition doivent jeter les bases des réformes y compris la Création de l’Organe Unique et Indépendant de Gestion des Elections. A cet effet il avait déclaré que « La transition est confrontée à des contraintes majeures et ne dispose pas de temps nécessaire, pour rendre fonctionnel l’organe de gestion des élections afin de prendre en charge tout le processus électoral, dans le respect strict de la durée de la transition ».
El Hadj Mamadou GABA
Source : Le Soir De Bamako