Près de deux ans après sa réélection à la magistrature suprême du Mali, le Président Ibrahim Boubacar Keita (IBK) fait face à un mouvement populaire, exigeant sa démission et la fin de son régime. Jamais depuis l’avènement du mouvement démocratique au Mali, en 1991, un Président de la République n’avait autant été contesté.
« IBK dégage. On a perdu Kidal », « Armée divisée », « IBK nous étouffe depuis plus de 7 ans, maintenant ça suffit ! ». Autant de slogans hostiles au Président de la République qui ont été affichés et scandés le 5, et le 19 juin dernier, à la place de l’indépendance.
Beaucoup de ceux qui mènent ce mouvement de contestation étaient hier encore des proches collaborateurs du régime, y compris l’Imam Mahmoud Dicko, considéré comme le plus influent du regroupement, qui avait d’ailleurs appelé ses partisans à voter IBK en 2013.
Une « erreur » qu’il veut manifestement corriger à travers ces dernières manifestations, et les appels à la démission du président IBK, dont il est à l’origine, avec le Chérif de Nioro. La mauvaise gestion des affaires publiques est la principale cause de la grogne de la rue.
« Aucune suite judiciaire, ou très peu, n’est donnée aux différents scandales de corruption, qui en sont aujourd’hui à des proportions jamais atteintes au Mali. Les Maliens n’ont pas d’eau, ni d’électricité. Leurs conditions de vie sont très clairement loin d’être satisfaisantes et le pouvoir ne donne pas l’impression de s’en soucier », relève l’enseignant Abdoulaye Dansoko .
Encombrants collaborateurs
Les différents scandales financiers ou administratifs qui collent à l’image du Président IBK, et qui attisent le rejet de sa gouvernance par bon nombre de Maliens, impliquent le plus souvent ses plus proches collaborateurs. Jamais le Président lui-même n’a été personnellement pointé du doigt dans des affaires encombrantes. « Vous ne trouverez aucun Malien qui vous dira qu’IBK a détourné 1 seul franc du Mali. Même si l’on reconnaît qu’il est aujourd’hui en incapacité de gouverner le pays, il est quand même de bonne foi. Mais on a l’impression qu’il est pris en otage au sommet de l’État par un clan machiavélique. Son entourage ne lui dit pas la vérité », tranche Moustapha Berthé. Pour lui, les revendications qui se sont accumulées depuis des années et qui sont restées presque intactes, sont à l’origine ce ras-le-bol généralisé des Maliens
Apaiser la crise actuelle, le Chef de l’État a reçu en audience à Koulouba, les acteurs du M5 le dimanche 5 juillet dernier. «J’ai pris connaissance des doléances du M5 à travers le mémorandum qui m’a été remis, je respecte les positions exprimées par vous et là-dessus, je vous invite à continuer et approfondir les échanges avec la majorité présidentielle. La libération de notre frère l’honorable Soumaila Cissé est l’une des priorités du moment »a affirmé le Président de la République. Le Chef de l’État a également renouvelé l’invitation au M5 d’intégrer le gouvernement d’union nationale qu’il propose et dont la formation urge.
Son élection assez confortable en 2013 et sa réélection en 2018 semblent être, pour le chercheur Pascal Dakono, des éléments qui l’ont certainement induit en erreur, et aussi son entourage, le rendant sourd aux différentes protestations jusque-là formulées à son égard.
Pour lui, le président IBK donne l’impression que le pouvoir est déconnecté des réalités. « Comment peut-on échouer à régler une crise qui dure depuis bientôt deux ans et qui concerne le secteur le plus important de l’État ? », interroge-t-il.
Solo Minta
Source : Le Tjikan